Sommaire :
L’éditorialiste expose les bonnes
raisons, pour les Lausannois, de refuser un «shootoir» le 8 juillet prochain
Où il est question du CICR, de la synagogue de Malagnou, de
cyclistes, d’une manif «contre la droite», d’égalité, de missions
militaires à l’étranger, de modernisme liturgique et de seringues.
Max s’émerveille des applications du
dogme démocratique dans la bande de Gaza. Il se met à l’heure de la
communication par SMS et il s’inquiète néanmoins de la fragilité
psychologique de nos enfants.
Pollux décode la définition d’une publicité «sexiste» selon
les nouveaux critères de
Appel au peuple ou la question
avortée
A l’occasion du procès des leaders de l’association
«Appel au peuple», Michel de Preux commente l’action de ces justiciers
égarés par l’orgueil.
Claude Paschoud constate qu’une grande agitation atteint les
milieux sionistes extrémistes après la proposition irréfléchie de Mme Micheline
Calmy-Rey d’organiser à Genève un colloque sur les «différentes perceptions
de l’Holocauste»
Gérald Berruex a lu, une fois n’est pas coutume, des propos
frappés au coin du bon sens dans Le Matin dimanche du 17 juin.
L’auteur de cette prose rafraîchissante n’était pas, évidemment, la
journaliste maison, mais l’interviewé Me Bonnant, illustre avocat
genevois.
On le sait de
toute éternité : les expériences des apprentis sorciers qui nous gouvernent
débouchent toujours sur des bilans positifs, parce qu’ils sont toujours
«évalués» par des experts et autres partenaires de projets mandatés et payés
par lesdits apprentis sorciers. On l’a vu voilà quelques années avec la
distribution d’héroïne gratuite pour laquelle
Prenons
l’exemple du local d’injection Quai 9 de Genève. On apprend1
que «Après cinq ans, le centre pour
consommateurs de drogues affiche un bilan positif. Même les habitants du
quartier reconnaissent son utilité».
Peut-être, mais ces mêmes habitants souhaitent refiler à d’autres
quartiers le si utile local, en raison des nuisances qu’il engendre notamment du fait des trafiquants attirés
par les lieux. Ils sont fous ces gens !
Et drôlement égoïstes en plus ! D’ailleurs, «Certes les dealers
officient toujours dans le périmètre, mais les professionnels sont unanimes
pour ne pas en attribuer la cause à Quai 9.» A quoi donc l’attribuent-ils alors ? On ne nous le dit
pas. Peut-être ne le savent-ils pas. Sans doute est-ce pure coïncidence, à
moins que les trafiquants ne soient attirés par le marchand de sucettes du
coin ! Quoi qu’il en soit, cette nuisance non causée par Quai 9 ne saurait en aucun cas affecter le local
lausannois, car ceux qui disent que les trafiquants de Lausanne ont tendance,
comme les autres, à s’approcher de la clientèle plutôt qu’à
l’attendre à dix kilomètres sont des imbéciles, des menteurs et des
fascistes.
Autre
exemple : «Selon une étude
canadienne, un local d’injection contrôlée conduit à la cure de
désintoxication»2. Hourrah ! s’écrie l’ami du
toxico à la lecture de cette bonne nouvelle. Hélas, il faut bien vite
déchanter : la fameuse étude montre tout au plus qu’un local
d’injection conduit dans un certain nombre de cas à la cure de
désintoxication, ce qui n’est pas pareil, on en conviendra. Il faut bien voir une chose : à l’instar
du fumeur qui souhaite arrêter de fumer ou de l’alcoolique qui voudrait
cesser de boire mais n’y arrive pas sans aide, il y a des toxicomanes qui
souhaitent rompre avec la drogue mais n’y parviennent pas tout seuls. Ils
ont besoin de secours. Et si le seul secours qu’on leur offre se présente
sous la forme d’un local d’injection largement pourvu de coûteux
travailleurs sociaux payés pour être à l’écoute de leurs problèmes entre deux distributions de seringues, il est
normal qu’ils se tournent vers cette «structure sociale», même si ce
n’est qu’un pis-aller. De là à prétendre qu’un local
d’injection est la seule forme d’accueil adéquate pour les
candidats à la désintoxication, il y a des milliers de pas infranchissables.
D’ailleurs, pour que l’information soit objective, il faudrait
qu’on nous dise aussi combien de toxicomanes ont renoncé à se
désintoxiquer suite de la création de confortables espaces de consommation de
stupéfiants. Curieusement, cette statistique n’apparaît nulle part.
Il
s’ensuit que, pour les authentiques candidats à une cure de désintoxication,
la «structure sociale» ne doit pas être un «shootoir» de dix places ( !)
(six dans le local d’injection, quatre dans celui d’inhalation),
alibi commode face à la paresse des autorités qui, sous prétexte
d’humilité - il n’y a pas de
réponse miracle - et d’uniformité
- toutes les grandes villes de Suisse
ont adopté cette merveilleuse stratégie –, mais surtout pour masquer
l’échec de toutes les tentatives d’enrayer le phénomène de la
toxicomanie en aidant les drogués à se détruire proprement, trouvent tellement
plus simple de faire un pas
supplémentaire dans la mauvaise direction.
Ce
qu’il faut, c’est une prise en charge personnalisée et
bienveillante, mais aussi basée sur le respect d’une autorité. Les paumés
n’ont pas besoin de laxisme ; ils ont besoin d’encadrement.
Reste à déterminer quelle forme doit prendre celui-ci. Mais si
Il faut que
les lausannois refusent massivement l’ECStup !
Le
Pamphlet
1 http:/www.lecourrier.ch , 26 mai 2007.
2 http:/www.agauchetoute.info, 26 mai 2007.
Horreur
20minutes du 31 mai, page 1 : «Le CICR a aidé un bourreau nazi à fuir». Même canard, même jour,
p. 3 : «Le CICR a favorisé la fuite
d’un cerveau du nazisme». Nom d’une pipe ! Les
voyous !
En fait, il ressort de l’article qu’Adolf
Eichmann a réussi à se faire passer pour un autre et à obtenir du CICR un titre
de transport qui lui a permis de gagner l’Argentine après la guerre. Il
s’agissait donc d’une erreur et nom d’une abominable
complicité avec un criminel de guerre comme le laissent supposer les titres
précités. Compte tenu du chaos qui régnait en Europe juste après la fin des
hostilités, du nombre de personnes déplacées, réfugiées ou apatrides, il
n’est pas surprenant que des fuyards aient réussi à duper le CICR et il faut être très très bête et très très
malhonnête pour en faire tout un plat. (mp)
La faute à Blocher
Le conseiller national socialiste
vaudois Roger Nordmann, qui n’en rate pas une, estime que le conseiller
fédéral Blocher est indirectement responsable de l’incendie de la
synagogue de Malagnou. A l’heure qu’il est, personne ne
sait encore qui est l’auteur de cet incendie criminel survenu fin mai.
Mais début juin, Roger Nordmann savait déjà, lui, qu’il s’agissait
de désaxés incités à passer aux actes par la proposition énoncée par Christoph
Blocher de supprimer – ou de modifier – la norme contre le racisme
et l’antisémitisme.
Les élections fédérale approchent ! Il est temps
de lécher des bottes ! (mp)
Sécurité
Le 7 juin, à l’initiative de l’association
Pro Vélo, une cinquantaine de
cyclistes ont ralenti la circulation pendant une heure au centre de Lausanne,
au motif qu’ils ne se sentent pas en sécurité sur la route et veulent
plus de pistes cyclables. Ils ont donc résolu de sensibiliser les
automobilistes et
A part ça, nous aimerions bien
qu’il y ait des pistes cyclables partout. Cela nous permettrait, à nous
piétons, de nous sentir en sécurité sur les trottoirs. (mp)
Efficacité
Autre manifestation, autres véhicules : la ville
fédérale a été témoin d’une course antifasciste à chaises de bureaux sur
le thème «rouler contre la droite».
Mussolini en tremble encore dans sa tombe et la bête immonde, terrorisée, se
barricade dans son antre. Nous n’avons pas de nouvelles de Monsieur
Blocher. Mais comme son suicide n’a pas été annoncé, il y a tout lieu de
penser qu’il a finalement survécu à ce qui a dû être la grande peur de sa
vie. Quant à nous, nous rigolons bien, merci. (mp)
Egalité
Le Matin Bleu du 15 juin nous apprend que «L’offre
de formation pour les nombreuses nouvelles élues genevoises, mise en place par
le bureau de l’égalité du canton a connu un franc succès. Au total, 137
femmes ont participé à des ateliers les préparant à leur mission politique
(gestion des séances, lecture d’un budget, communication avec les médias,
etc) (…)»
Voilà qui est fort réjouissant. Cependant, je
m’interroge : les politiciennes genevoises sont-elles à ce point
nulles qu’elles ne peuvent affronter leur destin communal ou cantonal
sans formation préalable comme le font apparemment leurs collègues
masculins ? Le bureau de l’égalité estime-t-il que les femmes sont
moins intelligentes et moins débrouillardes que les hommes ? Où sont nos
sourcilleuses féministes ? (mp)
Missions à l’étranger
Le général Christophe Keckeis, chef de
l’armée, trouve que
Bien
sûr, on peut tout envisager, même d’envoyer des militaires se faire
descendre en Irak. Mais dès l’instant où on raisonne en termes de nécessité, on s’aperçoit
qu’on n’a pas besoin
d’un seul soldat suisse à l’étranger.
Quelques heures après la déclaration du
général Keckeis, deux officiers d’état-major suisses en mission en
Afghanistan pour le compte de l’ONU ont failli sauter grâce aux bons
soins d’un kamikaze.
Mais
que font-ils donc dans cette galère ? (mp)
Modernisme
On découvre dans Le Matin Bleu du 18 juin
que l’Eglise réformée vaudoise, dont les lieux de cultes traditionnels
sont vides, a décidé de diversifier son offre, car «le processus d’adaptation au monde qui nous entoure est
permanent». Progrès parmi d’autres, il sera possible de faire bénir
les animaux domestiques le 30 juin, lors d’un culte à Montriond
(Lausanne). A n’en pas douter, on pourra aussi, dans pas longtemps, faire
bénir sa voiture, sa moto ou sa bicyclette. On pourrait les inviter à
Progrès
La dernière brillante idée en date dans les milieux
qui se préoccupent du confort et de la santé des toxicomanes consiste à fournir
gratuitement aux consommateurs de cocaïne du matériel leur permettant de priser
leur drogue en toute sécurité. En français, cela s’appelle des kits
gratuits permettant de sniffer de la cocaïne.
Bien entendu, et 20minutes du 22 juin le confirme par
la voix de Christophe Mani, porte-parole de l’association genevoise Nuit Blanche ?, ces kits gratuits
ne servent pas à faciliter la consommation de drogue dans les lieux festifs.
Pensez donc : cette année, cette association de bienfaisance n’a
distribué que vingt-six kits pour huit soirées ! Afin de souligner
l’insignifiance de ce chiffre, Monsieur Mani nous apprend que Première Ligne, association tout aussi
genevoise et tout aussi bienfaisante – la concurrence en somme !
– distribue chaque année cent
cinquante mille seringues.
Il n’y a pas de doute : grâce à ces apôtres
de la lutte anti-drogue, la toxicomanie est en pleine régression ! (mp)
Démocratie, quand tu nous tiens…
Nos démocraties modernes reposent, par ordre
chronologique, sur un risque et un mensonge : au moment des votes, c’est
le peuple qui décide. Après les votes, c’est le peuple qui
décide. Heureusement pour les sages qui entendent nous gouverner, le
mensonge est là pour corriger le risque. Ainsi, lorsque le peuple décide «tout
faux», on en arrive par d’étranges méandres à des situations «justes». En
Palestine, par exemple : à la consternation de la «classe politique
internationale» - expression consacrée
pour définir une sorte de méduse aux traits flous mais au pouvoir imposant - , les Palestiniens portent au gouvernement,
par leurs suffrages, le parti du Hamas. Passées la surprise et les
lamentations, la méduse fait en sorte (suspension conditionnelle des aides
financières et des bons offices, mise en demeure d’accepter des
conditions opposées à la ligne du nouveau gouvernement, sourires au Président,
grimaces au premier ministre, encouragement à la guerre fratricide Hamas-Fatah)
de déstabiliser un peu plus ce malheureux pays et crée toutes conditions utiles
pour en parachever la division et aboutir à en redistribuer la carte politique
à sa convenance. Il en résulte en Cisjordanie un «bon» gouvernement du Fatah à
la solde et à la disposition du Parti du Bien ; dans
Annonce sur les panneaux des divers organismes
gouvernementaux des Forces du Bien
Pendant les vacances, l’«hitlérisation» du
Président Mohammad Ahmadinejad continue.
Les aléas des SMS
Juan-Les-Pins - Max s’entretient avec son libraire favori,
Jean-François Fantutte1 ‒ un érudit dont les fiches de lectures en vitrine font
la joie des estivants en quête d’auteurs ‒ de la grande misère du laconisme et de la pauvreté
d’esprit des SMS. Ce dernier le corrige :
- Pas si laconiques que ça. Ainsi m’est-il
arrivé de recevoir quotidiennement et avec une régularité irréprochable, dix
jours durant, des messages d’insultes du même auteur dont
l’identité m’était cependant une énigme. Je vous assure qu’il
était prolixe et que les variations sur thème de noms d’oiseaux étaient
nombreuses et ont considérablement enrichi mon vocabulaire.
- Et le onzième jour, il s’est lassé ?
- Non. Le onzième jour, il a vraiment été
laconique : je n’ai reçu qu’une ligne sur l’écran de mon
portable : «Xkuz : faux n° !».
Ce qui arrive à nos enfants
France : Par défi (à la vie ?), deux adolescentes de
Corse se défenestrent, chacune chez soi, après s’être donné le top par
SMS (encore lui !) et les secours parviennent à empêcher in extremis
une troisième lycéenne de leur emboîter le faux pas. On ne compte plus les
enfants, bambins compris, qui s’expédient ad patres par le jeu du
foulard (et la recherche du grand frisson). Un correspondant me rapporte
qu’en Italie des gamins tentent le diable (et prouvent leur intrépidité)
en s’introduisant dans des boîtes en carton «semées» sur les voies
d’autoroutes. Aux Etats-Unis, de petits noirs se font carboniser en
flirtant avec l’induction sur les toits des trains.2
Nous avons tous connu, dans cette adolescence que
l’écrivain Jean Séverin qualifiait si justement d’«âge divinement
sot et sottement divin» et que le bon sens populaire résumait en «l’âge
bête», de discutables invitations à des défis gratuits. Les moins chanceux
d’entre nous en ont conservé des traces de points de suture. Il était
cependant rare que ceux-ci nous menassent jusqu’à la chambre froide. Et
puis, avec un peu de chance, nous finissions par accéder à la maturité.
D’ailleurs, il se trouvait souvent, à notre époque, quelque adulte pour
nous décourager d’une idée saugrenue par un simple «Non mais, ça va pas
mieux ?» ponctué, en cas de persistance du doute, par l’application
judicieuse d’une tatane sur notre séant.
Mais nos chers petits échappent désormais aux conseils
de leurs aînés. Maintenant, ils ont la télévision…
Pointe sèche n° 9 : Un joueur invétéré
« Cette fois, c’est décidé, j’arrête le
jeu ! », m’avait-il dit, au sortir d’une nouvelle déconfiture sur tapis
vert. Et devant mon air dubitatif, il avait renchéri :
« On parie ? »
Max l’Impertinent
1 Max espère que cet encyclopédiste appréciera le passage obligé par Mozart…
2 On serait tenté de se consoler en évoquant la sélection naturelle… mais les chiffres des pertes sont quand même alarmants.
Nous
apprenons ainsi qu’une publicité pourra être considérée comme sexiste
lorsque «des hommes ou des femmes sont
affublés de stéréotypes sexuels mettant en cause l’égalité des sexes».
Sans doute ne verrons-nous plus de femmes en tablier dans leur cuisine, ni de
secrétaires appliquées à dactylographier les lettres de leur patron, et encore
moins d’hommes au volant de voitures puissantes.
Dans
le même esprit, la commission en question a aussi décidé de bannir toute
publicité «qui met en scène une personne
aguichante dans une représentation purement décorative». Réjouissons-nous
donc de l’époque proche où les affiches et les spots télévisés continueront
de rivaliser de mauvais goût, mais en exhibant cette fois nos concitoyens et
concitoyennes les moins gâtés par la nature!
On
dit que la publicité doit faire rêver les consommateurs. Ils rêveront désormais
à un monde moins laid et moins stupide que le nôtre.
Pollux
Appel au peuple ou la question avortée
«Je n’avais pas mérité cela. - Tu l’as mérité puisque tu l’as. Cherche pourquoi et comment. - Qu’est-ce que cela me donnera ? - Tu cesseras de te lamenter pour rien. Ce que l’on mérite est moins douloureux que ce qu’on ne mérite pas.»
Jean Dutourd, de l’Académie française, Dutouriana, éd. Plon, Paris 2002, p. 108.
Pour qui fit des études
classiques, la confrontation à ce que les philosophes grecs anciens appelaient
l’«hybris», ou l’orgueil, plus précisément le fait de dépasser la
mesure de sa condition, était inévitable. L’«hybris» concernait le
rapport de l’homme à la divinité. Il y a de cela dans la justice,
fût-elle humaine, donc faillible, imparfaite. C’est une grave illusion de
croire que le fait de dénoncer les vices, réels ou supposés, de la justice
humaine vous donne le droit de vous poser vous-mêmes en juges des magistrats.
Le chef d’Appel au peuple1
et bien des membres de cette association le croient pourtant. Ils ont tort,
qu’ils le reconnaissent ou non et quelles que puissent être les bonnes
raisons de leurs critiques, dont les moins bonnes, ou les mauvaises,
discréditent automatiquement l’autorité et en diminuent l’impact
sur le public. A quel titre d’ailleurs disposeraient-ils d’une
infaillibilité dont ils sont les premiers à dire qu’elle n’est la
qualité d’aucun de leurs accusés ?
Ce qui était
réellement en jeu dans le procès d’Appel
au peuple, ce n’était donc pas l’opportunité d’une
critique de la justice passant du domaine privé au domaine public,
c’était que cette dénonciation cédait au même type de désordre que celui
qu’elle prétendait corriger : le soupçon de partialité. Mise en
cause par la justice, cette association rétablit elle-même le statu quo antérieur
à son existence. Elle a fait beaucoup de bruit et peu de bien. Or le bien ne
fait pas de bruit, disait un docteur de l’Eglise, évêque de Genève, Saint
François de Sales. L’éclat ou les éclats d’une lutte tonitruante
contre les injustices auront été le piège mortel causant l’échec final de
cette entreprise. Toujours le bien doit être modeste, laissant au mal sa
superbe.
L’injustice
n’est jamais tolérable, encore moins lorsque ce sont les organes de
justice qui en sont les agents. Personne ne contestera cette vérité. Mais les
difficultés commencent lorsque l’on passe à l’application. Il y a
des défauts mineurs que les seules personnes concernées sont habilitées à
corriger et qu’il serait non pas seulement excessif mais injuste de
traiter indépendamment des intérêts limités et privés qu’ils concernent.
Les voies de recours existent à cet effet. La justice n’est pas faite
pour ceux qui dorment, dit un adage. J’irais même plus loin : il y a
des injustices matérielles qu’il ne nous appartient ni de juger ni de
combattre sans condition, et ceci au nom même du respect de la chose jugée.
Cela semble paradoxal et choquant au premier abord, mais réfléchissons :
vous êtes condamné à tort pour un meurtre et aucune faute n’est imputable
aux magistrats ayant prononcé cette sentence contre vous : telle est mon
hypothèse. C’est le cas classique de l’erreur judiciaire. Sans
faits nouveaux susceptibles de vous disculper, faits qui vous donneront la
qualité de demandeur dans un procès en révision de votre jugement de condamnation,
ce jugement-ci gardera sa force de chose jugée, et ce n’est pas injuste ! La sécurité publique requiert
cette tolérance, qui n’est pas mince pourtant.
On le
constate, la marge de manœuvre d’une association comme Appel au peuple était plutôt étroite si
elle voulait échapper à deux écueils : ne pas substituer sa propre justice
à celle des tribunaux, car c’est alors le comble de l’injustice,
c’est-à-dire l’anarchie (n’était-elle pas latente dans
plusieurs de ses dénonciations publiques ?), et ne pas interférer sur les
voies de recours ordinaires, car dans cette hypothèse, ses initiatives, même
objectivement fondées quant au fond litigieux, resteraient illégitimes quant à
la forme, et ce serait un désordre.
Une voie s’offrait pourtant, une seule, non en
raison d’une lacune dans le droit, mais au contraire parce que les
tribunaux cessent d’appliquer le droit dans son intégrité ou dans son
intégralité. En Suisse, la responsabilité pénale des magistrats de
l’ordre judiciaire dans l’exercice de leur fonction est, de fait,
niée et elle est niée contre le droit en vigueur, qui la sanctionne par un
crime dûment mentionné dans notre code pénal fédéral. Contre de tels dénis de
justice, la rupture du silence éloquent de la presse, du silence des organes de
surveillance parlementaire de l’administration de la justice, du silence
des autorités spirituelles et religieuses s’impose comme un impératif
tant moral que civique.
S’il ne s’était agi que de cela dans le
procès d’Appel au peuple, tous
les palais de justice de notre pays auraient tremblé. Tous ne connaissent pas
ce crime, mais le seul fait que des citoyens puissent raisonnablement répandre
le soupçon fondé que certains ne l’ignorent pas aurait suffi à créer un
séisme dans tout le pays. Ce séisme n’a pas eu lieu. Appel au peuple n’a donc rien fait.
Voilà où conduit l’«hybris», piège du démon, car
la qualité de la cause motivant certains combats ne servait en réalité
qu’à masquer des ambitions secrètes, inavouées, qui en furent le mobile
profond.
Référons-nous à un exemple absolument
inattaquable : le Christ. Les pharisiens osent lui dire : «Tu te rends témoignage à toi-même; ton
témoignage ne vaut pas.» (Jean VIII, 13). Formellement, les pharisiens
avaient raison, comme toujours lorsqu’ils abordaient le Christ. Et, en
l’occurrence, comme toujours, le Christ leur reconnaît cette
raison : «Oui, je me rends
témoignage à moi-même, et toutefois mon témoignage vaut..» (v.14).
Autrement dit : oui, vous auriez raison si j’étais en tout semblable
à vous… Ne l’étant pas, le Christ leur enseigne, et il leur
enseigne quoi ? Que l’orgueil ne sied pas à un Dieu ?... Non,
pas exactement. Mais, sans aucune allusion morale directe, il leur enseigne que
Dieu est exactement le contraire de ce qu’ils sont, c’est-à-dire
qu’en Dieu même, l’humilité manifeste une grandeur insurpassable.
Le Christ part de l’inanité du témoignage de soi sur soi-même chez
l’homme pour nous dire en quoi, chez Dieu, il en va aussi de même par
analogie : «S’il
m’arrive de juger de moi, mon jugement est valable parce que je ne suis
pas seul; or il est écrit dans votre Loi que de deux personnes le témoignage
vaut.» (Ibidem, v. 16 et 17). Dieu, pour se révéler aux hommes, utilise la
mesure de l’homme. Aucune religion païenne n’a même soupçonné
pareille humilité de la part de Dieu !
En conséquence, nous sommes inexcusables de ne point
imiter Dieu, comme nous serions absolument condamnables de Lui appliquer nos
propres lois comme s’il ne l’était pas. Or que faisons-nous
d’autre lorsque nous osons Lui opposer la liberté de nos consciences et
de nos cultes ?...
Michel de Preux
1 Le Tribunal cantonal vaudois vient de confirmer la peine de vingt et un mois de prison ferme infligée à Gerhard Ulrich, président d’Appel au peuple, pour calomnie, diffamation et tentative de contrainte (n.d.l.r.).
Vacances Comme chaque année en juillet et août, la rédaction
du Pamphlet
se met au vert. Nous vous retrouverons en septembre plus décidés que jamais à
combattre les manifestations de l’arrogance et de la bêtise humaines. En attendant, nous vous souhaitons un bon été chaud
et ensoleillé. La
rédaction |
Les représentants en Suisse du sionisme extrémiste ont
bien des soucis. Il y a eu d’abord la bombe lancée par M. le conseiller
fédéral Blocher lors de son dernier voyage en Turquie, évoquant avec ses hôtes
la possibilité d’abroger ou tout au moins de modifier l’article 261bis
du code pénal, celui qui réprime non seulement le racisme mais aussi ce
qu’on appelle le révisionnisme
historique.
On sait que le paragraphe qui interdit toute négation
ou toute minimisation d’un génocide n’a été introduit que pour
protéger la mémoire d’un seul génocide, bien déterminé, celui qui fonde,
aujourd’hui encore, les prétentions d’Israël à des réparations et
qui justifie la condamnation à la prison ferme de tous les historiens,
chercheurs et publicistes coupables d’opinions hétérodoxes.
Le texte de la norme pénale n’était destiné à
figer aucune recherche historique sur le massacre des Incas, des Vendéens, ou
des Arméniens, évidemment pas non plus sur le massacre des Russes blancs par
les Soviétiques, des Tibétains par les Chinois ou des Blancs d’Afrique du
Sud par les amis du sinistre Mandela.
Sur ces événements, il est encore permis de procéder à
des recherches, d’en publier les résultats et d’organiser des
colloques.
Le seul chapitre dont il n’est pas permis de
débattre, dans toute l’histoire de l’humanité, au sujet duquel tout
travail de recherche et d’investigation est strictement interdit, le seul
dogme laïque dont il est même prohibé de douter en son for intérieur,
c’est
Les historiens turcs avaient bien compris cette
spécificité de la loi helvétique, et c’est pourquoi ils ont cru possible
de mettre en doute impunément que les massacres de 1915 pussent être qualifiés
de génocide. Le maladroit procureur général du canton de Vaud tomba dans le
piège, au grand dam à la fois des Turcs et des juifs sionistes extrémistes, ces
derniers ne pouvant admettre qu’il pût exister dans l’histoire de
l’humanité d’autres drames comparables au leur.
Le coup de grâce leur fut asséné par Mme Calmy-Rey,
qui crut bien faire en proposant au vice-ministre des affaires étrangères
iranien Saïd Dschalili qu’un colloque fût mis sur pied à Genève sur les
différentes perceptions de l’Holocauste.
Quelle horreur ! quelle hérésie ! Il ne peut
y avoir, bien évidemment, différentes
perceptions de l’Holocauste. Il a y une version officielle, laquelle
varie d’ailleurs au cours des temps, mais qui reste intangible sur le
point principal : l’existence de chambres à gaz homicides comme
instruments d’une extermination planifiée.
Des ingénieurs spécialisés, des chimistes hautement
compétents, après expertise des lieux, déclarent-ils que la version officielle
est techniquement, scientifiquement, rigoureusement impossible ? On les
condamne et on les enferme.
C’est dire si les maladresses de Mme la
présidente mettent la diplomatie helvétique dans l’embarras. C’est
un peu comme si Louis XIII avait proposé au pape Urbain VIII, en 1633,
d’organiser un colloque scientifique sur les différentes conceptions de
l’astronomie.
Comme à son habitude, le Centre Simon Wiesenthal se
surpasse dans le terrorisme intellectuel, exigeant
que Mme Calmy-Rey «nie publiquement ou
retire cette proposition scandaleuse et présente ses excuses pour cette offense
faite aux survivants de l’Holocauste et à la mémoire de ses victimes».
* * *
L’affaire est insignifiante en elle-même, et ne
manifeste que la panique des milieux sionistes constatant que l’opération
de sidération intellectuelle mise en place dans les années soixante est en
train de se lézarder et que, même sur ce sujet, les gens finissent par réfléchir.
Mais elle risque de poser un nouveau problème :
s’il est vrai, comme on l’a lu partout, que l’article 261bis
du Code pénal doit être interprété comme une interdiction générale et absolue de
remettre en cause les dogmes issus des procès de Nuremberg (non seulement dans
la négation ou la minimisation), il faudra alors poursuivre les auteurs qui se
sont écartés ou s’écartent de la vulgate par d’autres versions :
les assassinats en masse par balles, par l’électricité, par les vapeurs
d’eau chaude, par la chaux vive, par les gaz d’échappement des
moteurs diesel ou autres, inventés par d’illustres faux témoins comme
Elie Wiesel et ses disciples, procédés dont tous s’accordent
aujourd’hui à reconnaître le caractère mythique.
Va-t-on poursuivre et punir non seulement la
minimisation, mais aussi l’exagération ? Parmi toutes les versions
de
Les sionistes extrémistes ont cru mettre fin aux
controverses scientifiques et historiques par le bâillon et le code pénal.
Comme au temps du stalinisme et du Goulag, ils ont tenté de faire passer les
dissidents pour des criminels ou pour des fous. L’édifice se lézarde. Le
sommeil hypnotique se dissipe. La conférence de Téhéran n’a pas réuni des
buveurs de bière aux crânes rasés, mais des professeurs et même des rabbins.
La proposition de Mme Calmy-Rey partait sans doute
d’un bon sentiment. Elle est certainement persuadée que les révisionnistes sont soit de mauvaise
foi, soit mal informés et que la confrontation avec de vrais historiens tournera aisément à leur confusion.
Sur le site Israelnetz Nachrichten, la
communauté juive a estimé «naïfs et dangereux»
les propos de notre présidente.
C’est le cas de le dire !
Claude Paschoud
Il est rare que le journal Le Matin du
dimanche apporte des satisfactions à la mesure de son poids. Je me plais
toutefois à relever, dans l’édition du 17 juin, la relation d’un
excellent entretien accordé par Me Bonnant à la journaliste Ariane Dayer. On y
lit des propos qui, visiblement, sortent de l’ordinaire bien pensant dont
nous abreuvent journellement les médias de toutes espèces.
Mon propos n’est pas de résumer en quelques
lignes des réflexions d’un haut niveau, ce qui reviendrait à trahir
l’excellence d’un entretien à la fois intéressant par la pensée de
l’éminent juriste qui se prête au jeu des questions et la crédibilité du
rapport qu’en fait la journaliste. Néanmoins, pour ceux qui ne seraient
pas en mesure de retrouver l’article original, je me permets d’en
extraire la substantifique moelle.
Plusieurs sujets sont abordés, tous dans un même souci
du respect des traditions, de la sauvegarde d’une langue pure, du refus
d’un modernisme de mode et du rejet d’une socialisation
appauvrissante.
La langue tout d’abord. Me Bonnant constate avec
regret que la langue se meurt, et avec elle le goût de la lecture. «On est passé des cabinets de lecture à
l’écran visuel», constate-t-il. La lecture, c’est sérieux et
profond, alors qu’on regarde la télévision en grignotant du pop-corn.
J’ai beaucoup aimé cette image à propos du
laisser-aller de la langue : «On est
très proche du borborygme et de quelques signes brutaux qui disent nos
besoins élémentaires.»
Suivent quelques réflexions sur l’égalitarisme,
tarte à la crème des temps modernes. Pour Me Bonnant, l’égalité réduit
l’homme au plus petit dénominateur commun. J’ai aimé cette
phrase : «Je hais l'égalité. Je
crois que la nature ou Dieu nous a faits très inégaux et je trouve ça très
joyeux. Ça ne comporte aucun mépris pour la différence au contraire. Je crois
que la seule manière de mépriser les hommes c'est de les croire égaux,
c'est-à-dire de les réduire à la norme commune.»
Sont aussi abordées, toujours sous le même angle,
quelques réflexions sur l’école, une école dont le mode de fonctionnement
a été dominé par la notion d’égalité, une école où le savoir ne fait plus
rêver personne ‒ «L’école,
au lieu d'élever, console. Au lieu d'exiger, elle répare.» ‒, une école qui apprend à la jeunesse que
l’ignorance est libératrice et où on met en commun son indigence, une école
qui fabrique des êtres charmants, mais qui ignorent tout des anciens.
L’article n’échappe pas à quelques
considérations d’ordre politique. Pour Me Bonnant, la langue et la
culture sont conservatrices, même si, tel Aragon, il y a des écrivains de gauche
sublimes.
« La
gauche est fondatrice tandis que nous, gens de droite, sommes des héritiers.». D’une façon générale, si on se fonde sur une
longue période de l’histoire, on constate que la littérature est à droite
et la politique à gauche.
Au terme de ce compte rendu succinct, j’espère
avoir donné à quelques lecteurs du Pamphlet l’envie de retrouver
ces textes beaucoup plus riches que ne le laisse apparaître mon modeste
article.
Gérald
Berruex