Lausanne 37e année      «ne pas subir»      Janvier  2007 No 361

 

 

Sommaire :

 

Editorial

La rédactrice en chef s’interroge sur les vertus, supposées et réelles, de la démocratie

 

Dépendances

Claude Paschoud ne voit aucune raison de financer, de ses deniers de contribuable lausannois, des locaux d’injection et d’inhalation pour maintenir les drogués dans leur dépendance.

 

En direct de Sirius

Max imagine une courte lettre posthume de M. Saddam Hussein à George W. Bush. Retour de Téhéran, il rend un hommage chaleureux au président Ahmadinejad.

 

Eloge du film bête

Pollux ne supporte plus les série françaises aux prétentions pédagogiques et aux visions sociales proches de la caricature.

 

Arbitraire flagrant

Michel de Preux se penche sur le droit à la sépulture ecclésiastique, en cas d’euthanasie ou de suicide.

 

Police unique

Gérald Berruex plaide pour le maintien des polices municipales de proximité.

 

La gauche ratisse large

Xavier Savigny dévoile les motivations réelles des jeunes Verts zuricois, lorsqu’ils plaident pour le droit de vote à 16 ans

 

Ouf! on respire!

C.P. est consterné par la légèreté avec laquelle l’Université de Genève réagit aux scandales financiers qui ont éclaboussé le corps professoral.

 

Euro 2008

Pas question d’accorder aux villes organisatrices de l’Euro 2008 un seul soldat, un seul véhicule de l’armée, ou l’ombre d’un appui logistique !

 

 

 

 

Editorial

 

Lu dans Le Matin Bleu du vendredi 19 janvier : «Zurich. Une citoyenne demande au Grand Conseil de rendre le vote obligatoire pour lutter contre le déclin de la démocratie. Les abstentionnistes seraient frappés d’une amende de 50 francs. Tout scrutin devrait être répété avec un taux de participation inférieur à 52%.»

 

La démocratie décline. Les taux de participation sont bas. C’est indubitable et pas seulement dans le canton de Zurich. Mais il est tout de même paradoxal de proposer de remédier à la situation par une mesure dictatoriale et punitive dont le seul mérite serait d’alimenter les caisses cantonales.

 

En Suisse, un seul canton connaît le vote obligatoire. C’est le canton de Schaffhouse. Mais comme le montant de l’amende en cas d’abstentionnisme est de trois francs, on peut considérer que l’obligation est symbolique.

 

En chauds partisans de la démocratie directe, nous souhaiterions nous aussi que nos concitoyens s’intéressent davantage à la chose publique. Combien de fois n’avons-nous pas pensé au soir d’une votation que notre camp avait perdue : quel dommage que trop de gens ne votent  que lorsqu’ils sont directement concernés !

 

Mais, dans un contexte où les libertés des individus disparaissent les unes après les autres, nous refusons de leur voir contester aussi le droit de ne pas voter si tel est leur bon plaisir.

 

D’ailleurs, si la démocratie décline, c’est bien parce qu’elle ne tient pas ses promesses. Tout se passe comme si la démocratie était  seulement le droit de voter, d’élire et d’être élu. Dans cette optique, la plupart des pays du monde peuvent se prévaloir d’être démocratiques. Il n’est bruit, chaque jour que Dieu fait, que des élections plus ou moins régulières qui se sont tenues ici ou là, y compris au Zimbabwe, dont le moins qu’on puisse dire est que son président Mugabe n’est pas un champion des droits de l’homme. Mais cela ne fait rien : du moment qu’on vote, la démocratie est sauve. C’est pour cela que les pays riches et vertueux subordonnent leur aide aux pays déshérités à l’établissement ou à la restauration de régimes démocratiques. Et tant pis si, en vérité, les populations sont maltraitées, spoliées, voire assassinées. Pensez donc ! Elles ont le droit de vote !

 

La démocratie, c’est censé garantir aussi des libertés. L’ennui, c’est que tout le monde n’est pas d’accord sur le contenu de ces libertés. Dans les pays occidentaux, on ne le sait que trop, on peut tout dire, sauf ce qui risque de choquer les grandes consciences. Or, les grandes consciences sont à ce point sensibles que tout les choque. Le porte-parole de Madame Royal fait-il publiquement une innocente plaisanterie ? Hop ! Suspendu ! Un pédopsychiatre tient-il des propos non conformistes sur le viol ? Hop ! Menace de sanction ! Et ne parlons pas  de vous-savez-quoi !

 

En fait, nous profitons de le dire avant qu’un loi ne nous l’interdise, la démocratie n’existe pas. En l’absence de monarchies dignes de ce nom, il n’existe que des dictatures à visages variés. Il y a des dictatures où le pouvoir est aux mains d’une oligarchie, il y a des dictatures où le pouvoir est aux mains d’un seul hommes, il y a des dictatures où le pouvoir est aux mains d’une majorité. Le seul avantage de ces dernières, c’est que le citoyen peut passer de la position de dictateur à celle d’opprimé et vice-versa. Mais il est dictateur tout le temps s’il est suffisamment asservi à la correction politique.

 

Propos pessimistes. Mais que dire d’autre dans un monde où les régimes prétendument démocratiques sont majoritaires et qui permet néanmoins que, au nom de la démocratie, on pende un dictateur barbu, alors qu’on s’acharne à maintenir en vie un autre dictateur barbu ? Un monde où de respectables chercheurs doivent à une théocratie islamique la possibilité de s’exprimer, non pas librement – ils seront punis à leur retour dans leurs pays démocratiques –, mais sans se faire injurier à chaque phrase ? Un monde où l’on interdit progressivement la cigarette, alors qu’on s’achemine vers la dépénalisation de drogues autrement dangereuses ? Un monde où raconter une blague raciste risque de vous attirer plus d’ennuis que voler vingt francs à une vieille dame sans défense ? Un monde, enfin, où les hypocrites, les menteurs et les profiteurs se parent des plumes de la démocratie et de ses «valeurs» immortelles ?

 

Soyons honnêtes : les Suisses sont moins à plaindre que les autres, en matière de «démocratie». Mais, de grâce, que nos démocrates cessent de considérer cette dernière comme une déesse à qui il convient de tout sacrifier, y compris le droit du citoyen de ne pas participer à la vie politique du pays.

 

Le Pamphlet

 

 

 

 

Dépendances

 

«Créer un espace de consommation de stupéfiants (ECstup), d'injection et d'inhalation (un mode de consommation de plus en plus fréquent en Suisse). Une première estimation évalue entre 82 et 135 le nombre de passages par jour - remise de matériel et consommation comprises. Sur le même modèle qu'à Genève, il comprendra une salle d'accueil et un endroit pour l'échange de matériel stérile, qui servira également de salle d'attente et de repos; deux espaces de consommation, l'un de six places pour les injections et l'autre de quatre places pour les inhalations; une salle de soins et d'entretien avec les consommateurs, ainsi que des bureaux administratifs. Ouvert 6 jours sur 7, de 12h30 à 19h30, cinq professionnels (infirmiers, travailleurs sociaux et de rue, médecin, personnel d'accueil et administratif) en assureront la gestion sous la direction de la Fondation ABS. Une phase préparatoire d'environ six mois permettra d'affiner les modalités pratiques de ce projet, dont le lieu d'ancrage n'est pas encore déterminé. Il sera suivi par un groupe de référence, intégrant tous ses partenaires, et fera l'objet d'une évaluation qu'il est prévu de confier à l'Institut universitaire de médecine sociale et préventive.»

 

C’est en ces termes que s’exprime la Municipalité de Lausanne1, où la gauche occupe tous les sièges sauf un, pour justifier la création d’un local d’injection et d’inhalation, avec distribution gratuite de produits stupéfiants illicites.

 

Sous prétexte d’aider les plus démunis et de prendre en compte les besoins spécifiques des toxicodépendants et les besoins élémentaires des personnes vivant en situation de précarité (sic), on poursuit une politique qui a pour effets inévitables le maintien des drogués dans leur dépendance.

 

Ces locaux d’injection, ouverts il y a quelques années dans d’autres cantons, ont-ils eu des effets positifs ? Oui proclame le lobby de la drogue avec aplomb : le nombre d’héroïnomanes a diminué depuis une dizaine d’années à Zurich !

 

Mais est-on bien sûr que ce résultat soit en rapport avec la politique libérale de la drogue du côté de la Limmat ? Ne serait-ce pas plutôt un effet de mode, qui a vu les drogués préférer la cocaïne et le cannabis fortement dosé à l’héroïne, elle-même considérée comme un produit de «loser» ?

 

De 1999 à 2003, le nombre de surdoses mortelles a pourtant passé de 181 à 212 dans l’ensemble de la Suisse, et de 45 à 63 dans le seul canton de Zurich.

 

Il faut donc une sérieuse dose de culot pour nous affirmer que les locaux d’injection sont, dans le traitement contre les dépendances, un succès !

 

Grand ami des libertés, y compris de la liberté de se faire à soi-même du mal, je ne suis pas sûr qu’il faille interdire aux adultes la consommation de produits stupéfiants, ni d’alcool2, ni de tabac, ni même de pornographie.

 

Ce qui me dérange, c’est que le contribuable soit appelé à financer de ses deniers les locaux, le salaire des infirmiers, des travailleurs sociaux, des animateurs de rues, des médecins, du personnel d’accueil et d’administration nécessaires à la distribution de produits hautement toxiques (que ce contribuable paiera aussi, bien entendu), alors que cette distribution n’aura pour seul effet que de maintenir les bénéficiaire dans leur état de dépendance… et de procurer des recettes supplémentaires aux barons de la drogue.

 

Pour tirer un «bilan» de cette opération, il ne sera pas nécessaire de financer une étude onéreuse auprès de l’Institut universitaire de médecine sociale et préventive. Il suffira d’orienter à l’avance les questions posées aux chercheurs de cet institut dans la direction voulue pour obtenir les réponses qu’on souhaite.

 

Et je sais à l’avance, avant même que l’expérience n’ait débuté, quelles seront les conclusions des experts si la Municipalité de Lausanne est toujours, à l’époque, constituée des mêmes forces politiques : l’expérience sera positive. On observera un recul des surdoses mortelles à Lausanne ainsi qu’une diminution de la transmission du SIDA par la faute de seringues infectées.

 

En revanche, les violences urbaines, les rixes au couteau, les viols collectifs seront en augmentation, mais il faudrait avoir mauvais esprit pour supposer que les «incivilités» des adolescents de banlieue puissent avoir un rapport quelconque avec le laxisme des autorités dans la distribution de drogue.

 

Claude Paschoud

 

1 le 21.12.2006 sur son site Internet officiel : www.lausanne.ch

2 Les prescriptions de la loi sur la circulation routière sur l’aptitude à conduire lorsqu’on se trouve sous l’effets de certains produits étant expressément réservées.

 

 

En direct de Sirius

 

Lettre à un chef de gang1

 

«Pas un de ces invalides n'a de raisons de porter Saddam dans son cœur. Pourtant je suis sûr qu'aucun n'approuve la manière dont les Etats-uniens le traitent.»

 

(Un haut responsable iranien d'une multinationale européenne désignant à Max des vétérans de la Guerre de Huit Ans2 – Shiraz, 26.12.2006, 10h30)

 

Cher collègue,

 

Ce matin, dans la lueur glacée des projecteurs, devant tes caméras, dans ce minable cube de béton brut, à la sauvette, en petit comité, comme de règle quand il convient de supprimer un témoin gênant, tu m'as fait pendre.

 

Si j'ai su mourir avec courage, tu n'as pas eu, petit homme aux ordres d'autres qui ne sont pas les tiens, celui de te tenir devant moi. Je suis mort debout, ici, en louant mon Dieu, et toi, là-bas, vautré, tu regardais la «télé».

 

Que n'as-tu jadis accepté mon offre de combat singulier au lieu de réduire les miens à l'impuissance avec ta ferraille qui sentait notre huile lourde et tes robots à air conditionné, après m'avoir fait désarmer !

 

Car je t'attends.

 

Et c'est toi, l'infâme, dans ton ranch, tout à l'heure, qui avais l'air d'un cadavre.

 

p. o. M.l'I. (Ispahan, 30.12.2006)

 

Lettre ouverte à mon guide

 

Cher Mehdi,

 

Durant trois semaines, tu m’as fait découvrir ton pays et comprendre ton peuple : un pays aux capacités d’absorption des invasions hors du commun et un peuple imperméable – ou plutôt sélectif  aux cultures étrangères quand ces dernières venaient à lui être imposées par des envahisseurs. Tu m’as fait voir les trésors de la Perse et saisir la sagesse des Persans.

 

J’aimerais, à mon tour, te faire connaître quelques constatations. Ayant pu accompagner des amis à une audience de deux heures chez ton président, j’ai pu vérifier la validité d’une première analyse et la préciser. Très différent du croquemitaine fascisant que nous décrivent à l’envi les médias occidentaux pour complaire à leurs maîtres, le président Mahmoud Ahmadinejad est un hôte affable et posé non dénué d’humour. Dur avec lui-même et d’une grande simplicité, c’est un ascète inaccessible au culte de la personnalité. Lorsqu’il s’exprime, c’est d’une voix aux inflexions rocailleuses qui, curieusement, ne manque pas pour autant de chaleur. Il a placé – comme son prédécesseur, le président Khatami, si je t’en crois – ses priorités dans la mise à niveau d’un peuple qui avait été le laissé pour compte des dynasties régnantes successives dans un pays habitué à être mis en coupe réglée par les consortiums étrangers. On pourrait dire, pour reprendre une formule tombée en désuétude, que voilà encore un de ces si rares hommes d’Etat à avoir fait le don de sa personne à son pays. Propulser une nation de l’an 800 au XXIe siècle n’est pas une mince affaire et il est tout à son honneur de s’y être attelé. Dans cette logique – et même si cela gêne les hégémonistes que nous savons –, il était inévitable, les gisements de pétrole n’étant pas inépuisables, qu’il persistât à promouvoir ton pays à l’heure du nucléaire. Ainsi, dans deux questions vitales et liées – tu comprendras que la prudence m’interdise d’évoquer ici la seconde –, ton président a témoigné d’une clarté de vue et d’un courage inhabituels, inconnus chez les politiciens «aux ordres» dont nous sommes affligés en Occident. Mais il a, ce faisant, engagé ton pays dans un choix irréversible. N’étant pas de la variété qui s’agenouille, le président Ahmadinejad, dans la logique hégémonique ploutocratique, s’inscrit dans celle des dangereux empêcheurs de combiner en rond qu’il importe d’éliminer au plus vite. Ignorant superbement les pressions quasi planétaires – certains n’hésitent pas à le qualifier d’«héroïque» –, il a ouvert, en deux occasions, la boîte de Pandore. Dans nos prétendues démocraties, c’était déjà un délit... C’est devenu un crime. Et même si, pour la plus grande gloire de ceux qui le cornaquent, l’«éléphant de guerre états-unien»3 est toujours occupé à se faire couper les jarrets dans les faubourgs de Bagdad, ton pays n’est pas à l’abri d’une «allendisation» par verrouillage économique, grèves intempestives et agitation sociale arrosées de «billet vert», corruption des mœurs – il n’est que de regarder l’état de mollusque auquel ont été patiemment et inexorablement réduites nos jeunesses occidentales. Il court aussi, désormais, le risque d’actions ponctuelles, sur ses sites nucléaires, d’un ennemi que ne rebuterait pas celui de répandre aux quatre vents du golfe persique un nuage d’une propreté douteuse. Je t’ai déjà décrit les processus possibles pour une telle agression et n’y reviendrai pas.

 

Une dernière chose encore : continuez à pendre les trafiquants de drogue, c’est très bien !

 

Constatations

 

En Iran, comme dans les Emirats, la langue la plus parlée par les touristes4, c’est désormais le russe (bravo Mr Bush !).

 

Et peut-être n’était-il pas très indiqué d’envoyer une secrétaire d’Etat noire demander de l’argent aux Séoudiens… Aux dernières nouvelles, Miss Rice n’aurait pas vraiment convaincu les cheiks de sortir leur carnet…

 

Cher Kipling…

 

Elles n’ont pas dû bien lire Le Livre de la jungle, ces mamies tout émues qui, rosissant, m’avouent qu’elles songent à voter pour Monsieur Sssarkozy…

 

 

Max l’Impertinent

 

1 Télépathie… ou écriture automatique? Au matin du 30.12., à 5h00, heure de Téhéran (5h30. de Bagdad) Max se réveille en sursaut et dit à Iris : «Ils sont en train de le pendre». Cette «fiction» a été rédigée entre 5h15 et 6h30 et immédiatement envoyée à la rédaction… A 10h00 Max prenait connaissance des événements de la matinée…

2 Cinq cent mille morts de part et d'autre.

3 Merci à B. Sch. pour cette savoureuse image.

4…mais aussi les journalistes, hommes d’affaires, marchands d’armes et espions…

 

 

 

Eloge du film bête

 

La télévision est une source intarissable d'énervements et de mécontentements. Intarissable car on continue immuablement à l'allumer chaque soir pour voir les images des événements du jour, pour suivre une ou deux séries incontournables (Les Guignols, bien que ce soit insupportablement gauchiste, et Kaamelott qui a le bon goût de n'avoir aucune connotation politique), puis pour se distraire en regardant un film. Mais quel film?

Un grand classique est le film américain typique, avec des paysages américains, des buildings américains, des voitures américaines, des policiers américains qui tirent sur des bandits rarement américains qui tirent à la mitrailleuse au milieu de la foule américaine, avant que cela ne finisse en courses-poursuites, en cascades et en explosions, le tout avec un minimum de dialogues. Il est de bon ton, la plupart du temps, de «tourner» sur une autre chaîne en lâchant une commentaire plein de condescendance contre «ces films américains tellement bêtes».

On tombe alors presque toujours sur l'autre genre incontournable de la tranche horaire 20h50-22h30: la série policière française. Les paysages sont plus proches de ce que l'on connaît, les voitures de police aussi, l'action est un peu plus calme. Mais la ressemblance avec notre monde quotidien s'arrête là. Conçue non comme un divertissement inspiré de la réalité mais comme un outil pédagogique de sensibilisation aux enjeux de notre société (comprenez: de rééducation du peuple), la série policière française nous ressasse immuablement le même scénario politiquement correct: de pauvres «jeunes» défavorisés sont injustement accusés par de vilains flics fachos avant d'être innocentés par les gentil(le)s inspecteurs-trices épris de justice sociale, aspirant à un monde meilleur, si possible «issus de l'immigration», et qui finissent par démasquer le coupable qui est toujours un riche, un patron, un homme d'affaires ou un notable trop bien habillé pour être honnête.

A la longue, la répétition de ces clichés éculés devient écoeurante et l'on ne supporte plus ces héros justiciers moralisateurs qui veulent absolument nous montrer qu'ils prennent le parti des plus faibles. Même lorsqu'il s'agit du lieutenant Marie Balaguère, et à plus forte raison – dans un registre nettement moins esthétique – de Mimie Mathy, dont l'apparition à l'écran provoque désormais une immédiate crispation du doigt sur le bouton «chaîne suivante». Marre des films «engagés», des films «qui dénoncent», des films «délivrant un message», des films «intelligents» ou «qui invitent à réfléchir»! Finalement, qu'y a-t-il de mieux, pour satisfaire notre sens du bien et du mal, que ces bons vieux films américains pas trop intellectuels où les gentils ressemblent vraiment à des gentils et les méchants vraiment à des méchants, et où l'on ne prend pas de gants pour faire régner la justice?

 

Pollux

 

 

Arbitraire flagrant

 

         Si la question morale du suicide ne fait pas de doute comme meurtre, bien que l’Eglise conciliaire ait supprimé l’interdit de sépulture ecclésiastique des suicidés, explicite dans le Code de droit canonique de Benoît XV (1917) (Canon 1240, paragr. 1, ch. 3)1, la question de l’euthanasie est, quant à elle, plus complexe. Le catéchisme de l’Eglise catholique de 1992 fait la distinction entre l’action ou l’omission ayant pour effet de donner la mort «quels qu’en soient les motifs» (no 2277) – qui est un crime – et l’abandon de l’acharnement thérapeutique, que ce même catéchisme définit notamment comme «la cessation de procédures médicales extraordinaires qui, ajoute-t-il, peut être légitime» (no 2278). Et il donne cette explication : «On ne veut pas donner la mort ; on accepte de ne pas pouvoir l’empêcher.», avec l’accord du patient ou de ses ayants droit légitimes, respectueux de ses intérêts ou de sa volonté raisonnable.

 

         Il est plus qu’évident qu’en Italie, le cas Piergiorgio Welby, maintenu artificiellement en vie depuis dix ans (ce patient était nourri par sonde et branché sur un respirateur artificiel), relevait davantage de la problématique de l’acharnement thérapeutique consistant à empêcher artificiellement un processus naturel d’arriver à son terme que d’une volonté suicidaire ou de l’euthanasie. Absolument personne au monde n’a le droit d’imposer, au nom du devoir de vivre, à l’un de ses semblables, une survie artificielle indéfinie. Chaque être humain a droit à sa mort naturelle. Un tel acharnement est inhumain, donc hautement immoral. Imposé à une personne, il est aussi une forme de torture que la loi devrait interdire.

 

         Mais l’interdit de sépulture ecclésiastique à cette personne, prononcé par des autorités religieuses dites catholiques romaines en Italie, à Rome même, est en soi un scandale et une preuve d’immoralité en même temps que d’inhumanité. Mais c’est aussi une preuve d’arbitraire flagrant de leur part. Pourquoi ces autorités religieuses font-elles peser sur la mémoire de ce malheureux un interdit outrageant quand d’autres autorités appartenant à cette même Eglise conciliaire, ici même, en Valais, n’hésitent pas une seconde à donner des funérailles ecclésiastiques à des personnes dont les proches déclarent ouvertement et publiquement, dans leur avis de décès dans la presse, que le défunt avait choisi délibérément le suicide ? Ce fut notamment le cas de Michel Délèze à Nendaz (mais le cas est loin d’être unique) qui, disait le faire-part de décès, «a choisi de quitter ce monde le samedi 17 décembre 2005»2 et de qui la messe de sépulture eut lieu à l’église de ce village le 20 décembre 2005.

 

         Où est le scandale ? Là où l’arbitraire est imposé par le silence, même à la presse dite «libre»…

 

Michel de Preux

 

1 Voir le Canon 1184 du code de Jean-Paul II. Au chiffre 5 du même canon, du code de Benoît XV, était prévue l’interdiction de sépulture ecclésiastique (avec la conséquence du refus de messes d’obsèques et d’anniversaire – canon 1241 – pour ceux qui avaient ordonné que leur corps soit livré à la crémation). Le code de J.-P. II maintient le principe de cette mesure mais avec l’hypocrisie caractérisant les modernistes, c’est-à-dire en y ajoutant une condition subjective invérifiable, par cette clause qui n’est que de style : «pour des raisons contraires à la foi chrétienne.» (Canon 1184, paragr. 1, ch. 2).

2 Nouvelliste du Valais, édition du lundi 19 décembre 2005, page 35.

 

 

 

 

Police unique

 

Récemment, l’ Association Professionnelle des Gendarmes vaudois lançait une initiative demandant de créer une police unique. Celle-ci précise que la proximité ne sera pas oubliée. On nous parle, pour ce faire, de créer des «Conseils de sécurité» englobant, entre autres, enseignants, populations, autorités communales, ecclésiales, etc. Ceci devrait permettre à des postes de gendarmerie plus proches et peut-être plus nombreux de cibler leurs actions. C’est bien, mais ça existe déjà ! C’est ce que font nos polices municipales et nos autorités communales, et même très bien en ce qui concerne la commune de Montreux où je réside.

 

C’est tout le problème du service de proximité qui est posé. La police cantonale groupe déjà sous une même entité des services aussi divers que la brigade des stupéfiants, la brigade financière, la brigade des mineurs et des mœurs pour ce qui concerne la police de sûreté, puis des détachements de circulation routière ou des groupes d’intervention sous l’uniforme de la gendarmerie. Ces regroupements sont certes indispensables si on veut bénéficier de synergies nécessaires et échanger par les voies les plus  directes les renseignements propres à résoudre les grands problèmes de la sécurité. Le service de proximité doit-il entrer dans le même organisme ? A mon sens, il s’agit là d’une activité bien spécifique, plus proche de la population et qui requiert une présence policière quasi constante dans le terrain. Les diverses et tragiques agressions dont nous abreuvent journellement les journaux nous montrent la nécessité toujours plus impérative de bénéficier d’une présence concrète, dissuasive et constante d’agents spécialisés aussi nombreux que possible à chaque coin de rue. Les autorités municipales doivent aussi pouvoir assigner à leur police des missions particulières liées à un programme régional. La gendarmerie est vouée à d’autres tâches (voir plus haut) et ne saurait se substituer aux agents municipaux plus proches de la population et des autorités locales. Certes, des collaborations sont indispensables entre les différents corps mais ne justifient ni une fusion, ni une absorption.  

 

Le remplacement des commandants de polices municipales par des adjudants de gendarmerie serait-il bénéfique ? J’en doute. Si les premiers nommés sont entièrement responsables de leurs services face aux autorités municipales qui les ont désignés, les seconds font partie d’une structure plus lourde et plus centralisée. Si les infrastructures actuelles dans de petits ou moyens corps de polices municipaux sont relativement souples et légères, elles ne manqueront pas d’être renforcées, alourdies et inévitablement centralisées en passant sous la juridiction de la police cantonale..

 

La presse a mis en évidence des disparités salariales entre les fonctionnaires de police municipaux et cantonaux, à tous les nivaux. A notre époque où tout doit être unifié, égalisé, uniformisé, on ne supporte plus guère de telles inégalités de traitement. D’aucuns voient dans la création de la police unique le remède à ces maux inégalitaires : l’uniformisation (par le bas, comme toujours !).  Pourquoi le syndicat de la police cantonale qui appelle de ses vœux la police unique n’utiliserait-il pas cette concurrence dynamique entre villes et canton comme un moyen de pression sur les modestes salaires pratiqués à l’Etat de Vaud. ?

 

On ne peut défendre à tout prix l’autonomie communale, mais il est des secteurs, comme celui de la sécurité du citoyen dans sa rue, dans ses parcs et dans son quartier où, de toute évidence, l’autorité locale est la mieux placée pour agir. La police de proximité est certainement une tâche qui lui incombe en priorité. 

 

Gérald Berruex

 

 

La gauche ratisse large

 

Les Jeunes Verts et Socialistes zuricois ont déposé devant le Parlement cantonal une initiative visant à donner le droit de vote aux jeunes dès l’âge de 16 ans. «A 16 ans, on est assez mûr pour se forger une opinion et prendre des responsabilités.», déclare Pascal Pauli, 24 ans, des Jeunes Verts zuricois1.

 

Je me demande d’où lui vient cette surprenante certitude. Pourquoi, dans ce cas, la majorité est-elle fixée à 18 ans ? Si on en croit Monsieur Pauli, l’adolescent est apte à décider pour la collectivité, alors qu’il ne l’est pas pour ses propres affaires, ce qui nous amène naturellement à la conclusion que la gestion de l’Etat doit être toute simple, puisque les gamins peuvent s’en occuper.

 

Non, en fait, les jeunes ne sont pas aptes gérer quoi que ce soit. Ils sont aptes à voter à gauche, tant il est vrai qu’à cet âge il est normal et même sain d’être un idéaliste en dehors des réalités. J’inviterais par contre Monsieur Pauli à redescendre sur terre : ses manœuvres pour engranger des voix ne trompent personne, les ficelles ressemblent à des cordes d’amarrage. Il a 24 ans, quand même, il serait temps qu’il grandisse un peu.

 

Xavier Savigny

 

1 20 minutes du 9 janvier 2007

 

 

Ouf! on respire!

 

Chargé d’une enquête sur les dysfonctionnements qui avaient l’an passé secoué l’Université de Genève, l’ancien procureur Thierry Béguelin a rendu ses conclusions il y a quelques jours : «On a pu croire que beaucoup de professeurs étaient des filous qui se servaient dans les fonds publics. A quelques exceptions près, il n’en est rien», a précisé l’enquêteur. Sur les neuf plaintes pénales qui ont été déposées, six devraient être classées tandis que trois autres nécessitent des enquêtes approfondies.

 

Le nouveau recteur Jacques Weber semble satisfait. L’enquête a mis en évidence un certain laxisme dans l’application des directives administratives, ainsi qu’une gestion déficiente des relations humaines.

 

Ouf ! on respire ! Dans la République du bout du Lac, les professeurs d’université ne sont pas tous des escrocs. Quant aux autres, s’ils ne sont pas franchement des filous, ils avaient pris l’habitude de tricher un peu avec les règlements, non point certes pour se remplir directement les poches, mais pour faire payer au contribuable certains petits faux frais lors de leurs déplacements de fonction.

 

Avec Ziegler, on avait un exemple de professeur d’université intellectuellement malhonnête. On a aujourd’hui les enseignants moralement peu sûrs.

 

Dès lors que l’enseignement universitaire se coupe de toute référence à l’universel, dès lors que toute référence à Dieu est résolument bannie des textes officiels et des discours, au motif d’un prétendu respect de la «laïcité», (concept éminemment révolutionnaire et français), il était inévitable que les préoccupations ontologiques cèdent le pas à la recherche concrète des moyens les plus rapides de faire carrière, de gagner de la thune, d’accéder au pouvoir et à la notoriété.

 

Le niveau moral des professeurs est l’exact reflet de leur époque et ce niveau est consternant.

 

Dans bien des domaines, on se préoccupe plus des moyens d’arriver que de savoir où on veut aller. Dans la valse des groupes verts permutables, le complément circonstanciel de but disparaît au profit du complément de moyen.

 

Les tristes potiches qui concourent à la consécration de Miss Telpays ou de Mister Chose sont hélas représentatifs d’une large couche de la population qui aspire à la célébrité et à la fortune. «Si vous étiez riche, cela vous servirait à quoi ?» - «A faire ce qui me plaît !» - «Et qu’est-ce qui vous plaît ?» - «Ben… ! ?»

 

Le président de la République française est impliqué jusqu’au cou dans des magouilles financières dont il n’aura jamais à répondre ? Qu’importe ! Votre député a reçu des pots-de-vin pour favoriser tel promoteur immobilier ou telle entreprise de génie civil ? Tant mieux, si les logements ont été construits et la route réparée.

 

Quatre conseillers communaux d’Emmen  avaient accordé des avantages fiscaux à un contribuable frère d’une huile locale, ils sont surpris d’être condamnés.

 

Ne nous étonnons plus si des professeurs d’université se font rembourser des frais pour des voyages qu’ils n’ont pas faits : ce n’est pas si grave et le recteur est rassuré.

 

La probité est un concept ringard, qui ne risque pas de vous apporter ni fortune ni visibilité médiatique.

 

C.P.

 

 

Euro 2008

 

Les sites qui accueilleront l’Euro 2008 pourront probablement compter sur le soutien de l’armée. Ainsi en a décidé la commission «compétente» ( ?) du Conseil national par 17 voix contre 3. Jusqu’à 15'000 hommes pourraient être mis à disposition, mais leur engagement se ferait de manière échelonnée.

 

Si nécessaire, l’armée compte aussi recourir à des drones et à des hélicoptères Super Puma.

 

Les Verts ont refusé tout net l’idée d’un recours à l’armée.

 

Un bon point pour les Verts !

 

Il y a plusieurs années, nos plus anciens lecteurs s’en souviennent, que nous luttons contre l’engagement de l’armée à des tâches purement civiles autres que nécessaires et urgentes (catastrophes naturelles par exemple).

 

Nous avons même adressé une plainte à M. le chef du Département militaire de l’époque1 contre l’utilisation d’un bataillon de fusiliers de montagne pour damer les pistes de ski à Villars  à l’occasion d’une compétition quelconque.

 

M. Rudolf Gnägi nous avait donné largement raison, nous assurant qu’il veillerait à l’avenir à n’engager nos forces militaires qu’en stricte conformité avec l’ordonnance fédérale qui traitait de l’utilisation des unités de l’armée à des fins civiles.

 

Aujourd’hui que l’armée est engagée dans des opérations dits «de maintien de la paix» aux contours mal dessinés, il paraît normal à certains que nos soldats se joignent à des troupes d’occupation dans des Etats étrangers.

 

Pourquoi ne pas assurer le maintien de l’ordre aux abords d’une ambassade inoccupée et pourquoi refuser l’octroi de quinze mille hommes pour «épauler les autorités de Genève, Bâle, Berne et Zurich lors du championnat d’Europe de football» ?

 

Eh bien, parce que la Confédération ne dispose pas du droit d’engager l’armée à n’importe quoi, au profit de n’importe qui ! L’armée n’est pas une réserve de personnel bon marché dans laquelle une bonne œuvre, un organisateur de compétitions sportives ou n’importe quelle ONG sans but lucratif pourrait venir pêcher sans bourse délier le personnel dont il a besoin pour atteindre ses buts.

 

Si l’armée n’a pas besoin de nous pour les missions essentielles de la Confédération, à quel poste pourrions-nous être plus utiles à la Patrie qu’à notre poste de travail habituel, et le soir dans notre famille ?

 

Quels sont les employeurs disposés à verser un salaire à leur collaborateur, sous forme directe ou par le biais des APG qu’ils financent largement, pour que celui-ci aille faire le zouave à l’entrée de stades de football, à la place d’un gardien de Sécuritas dont on aurait ainsi fait l’économie ?

 

Soldats, mes frères, et vous employeurs, et vous tous contribuables, levons l’étendard de la révolte : pas un seul soldat, pas un drone, pas un hélicoptère engagé en faveur d’Euro 2008 !

 

C.P.

 

1 Voir Le Pamphlet N° 82 de février 1979 et les numéros suivants