Lausanne 36e année      «ne pas subir»      Octobre  2006 No 358

 

 

Sommaire :

 

Editorial

Où il est question de prétendues «valeurs judéo-chrétiennes»

 

Infanticide

Où le public suisse peine à s’y retrouver

 

Bricoles

Où il est question de plusieurs études aussi onéreuses qu’inutiles

 

En direct de Sirius

Max s’adresse à un ami allemand et il manifeste sa méfiance à l’égard d’un évêque qui commence son discours par : «Honnêtement…»

 

Provocation

Pollux s’inquiète de l’intolérance religieuse

 

Allô, la SSR ? Ici la Terre !

Si la SSR n’obtient pas ce qu’elle demande aux téléspectateurs, elle menace de devoir diminuer son offre ! Chiche !

 

Dialogue interreligieux

Michel de Preux montre les limites du dialogue, à ne pas confondre avec la controverse.

 

Taxer les millionnaires !

Une initiative de génie en pays neuchâtelois : faire payer les riches.

 

Les Africains sont-ils paresseux ?

Pour éradiquer la misère en Afrique, Claude Paschoud propose une recette qui n’a aucune chance d’être approuvée par quiconque.

 

Infrarouge ou info rouge ?

Ce ne sont pas les caricatures qui sont critiquables, mais l’usage qu’en fait la TSR dans l’émission Infrarouge !

 

Précisions

Erratum et appel à un auteur…

 

 

 

Editorial

 

Les élections cantonales de mars 2007 engendrent, maintenant déjà, beaucoup d’agitation dans le landernau  politique. On voit poindre d’un peu partout des candidats qui se sentent vocation de sauver la patrie en danger et briguent un siège au Conseil d’Etat. L’un des derniers en date est Monsieur Maximilien Bernhard, trente-sept ans, candidat de l’Union démocratique fédérale (UDF,) qui se propose, selon Le Matin Bleu du mercredi 25 octobre, de défendre «les valeurs judéo-chrétiennes» et de «promouvoir une politique de la drogue basée sur l’abstinence». Ce dernier point ne peut que rencontrer notre approbation et celle de nos amis de l’Association romande contre la drogue (ARCD)1, dont Monsieur Bernhard est un des contacts2, et qui dénonce sans relâche les mensonges que nous servent les champions de la distribution d’héroïne, des automates à seringues et autre locaux d’injection. Le candidat UDF peut donc dès aujourd’hui compter sur notre voix.

        

Nous déplorons toutefois qu’il tombe, comme le premier promoteur du dialogue interreligieux venu, dans une erreur, fort répandue il est vrai, qui consiste à croire qu’il existe des «valeurs judéo-chrétiennes». Or, les valeurs n’existent, si tant est qu’elles existent, qu’au sens de «ce qui est vrai, beau, bien, selon un jugement personnel plus ou moins en accord avec celui de la société de l’époque» proposé par le Petit Robert.

 

Nous le savons tous : les «valeurs» actuelles sont, entre autres, la tolérance, l’ouverture à l’autre, les droits de l’homme et, bien sûr, l’anti-racisme. Elles rassemblent certes beaucoup de belles âmes juives et chrétiennes, mais aussi musulmanes, à ce qu’on nous dit, et bien d’autres encore, sans doute, y compris des athées. Ce ne sont donc pas des «valeurs» judéo-chrétiennes, pas plus que ne l’étaient il y quelques décennies, le patriotisme, le sens de l’honneur et l’esprit de sacrifice qui rassemblaient des hommes et des femmes de toutes confessions et religions, ainsi que des incroyants.

 

Cette manie qu’ont de nombreux chrétiens – nous ne doutons pas que Maximilien Bernhard soit un authentique chrétien – d’amalgamer judaïsme et christianisme en croyant faire plaisir aux juifs trahit un sentiment de culpabilité tout à fait malvenu et une méconnaissance totale, à ce sujet, de l’opinion des juifs authentiques pour qui il est exclu de se commettre avec une religion qui sert un Messie qu’ils considèrent comme un imposteur et dont les dogmes – non pas les «valeurs» sont incompatibles avec leur foi – non pas leurs «valeurs». Nous ne saurions leur donner tort.

 

Nous proposons donc à Monsieur Bernhard de renoncer à défendre les «valeurs» judéo-chrétiennes et de fixer, plus prosaïquement, des priorités pratiques, en plus de la politique de la drogue basée sur l’abstinence : redressement de l’école vaudoise, lutte contre les coûteuses illusions socialistes, promotion d’une politique financière permettant de diminuer taxes et impôts, entre autres.

 

Cela dit, nous lui souhaitons bonne chance.

 

Le Pamphlet

 

1 Case postale 29, 1400 Yverdon-les-Bains

2 Tél. 079 600 99 68, courriel : m.bernhard@bluewin.ch

 

 

 

Infanticide

 

 

Mme Véronique Courjault a fini par avouer qu’elle était bien l’auteur des meurtres des deux bébés retrouvés dans le congélateur de sa résidence de Séoul. Contrairement à ce qu’on a cru tout d’abord, il ne s’agissait pas de jumeaux, mais de deux enfants nés (et tués) respectivement en 2002 et 2003.

Dans la foulée, elle a aussi avoué avoir étranglé en France un enfant né en 1999. Il y a en France environ une centaine d’infanticides par an.

 

L’infanticide est le fait, pour la mère, de tuer son enfant pendant l’accouchement ou alors qu’elle se trouve encore sous l’influence de l’état puerpéral. C’est un délit spécifique en droit suisse (art. 116 CPS).

 

Compte tenu de cette particularité, et du fait que l’état puerpéral est une circonstance personnelle (atténuante), l’infanticide n’est plus un crime (comme il l’était encore jusqu’en 1990, punissable d’une peine d’emprisonnement de 6 mois au moins) mais un simple délit, punissable de l’emprisonnement (de 3 jours à 3 ans). Il ne s’applique qu’à la mère et non aux complices éventuels, eux-même punissables selon l’art. 111 du code pénal de meurtre, éventuellement même d’assassinat (art. 112 CPS) si leur participation dénote une absence particulière de scrupules ou une façon d’agir particulièrement odieuse.

 

Cet exorde pour expliquer que le public suisse ne comprend rien à cette histoire :

 

Il ne comprend pas qu’on parle, dans la presse, d’infanticide (délit qui n’existe pas en droit français) et en même temps que les époux Courjault soient prévenus d’assassinat.

 

Il comprend mal comment un mari peut avoir ignoré à trois reprises les grossesses de son épouse menées à leur terme.

 

Il ne comprend enfin rien aux cris d’indignation poussés par l’ensemble des media, à la douloureuse stupeur, aux substantifs et adjectifs extrêmes comme : insoutenable, indicible, horreur absolue etc.,  et particulièrement par les mêmes qui n’ont jamais cessé de justifier l’avortement au nom du droit des femmes à disposer librement de leur ventre.

 

L’infanticide, au sens étroit que lui donnent le Littré, les gens qui parlent français et le Code pénal suisse, dépasse de peu le dernier moment possible de l’avortement mais il est de même nature. Le meurtre du nouveau-né n’est pas beaucoup plus atroce que le meurtre de cet enfant avant sa naissance.

 

On serait reconnaissant aux avorteuses et à leurs amis de ne pas en rajouter lorsqu’il s’agit d’un infanticide. Ces gens-là n’ont, dans tous les cas, pas de leçons à donner à Mme Courjault.

 

Claude Paschoud

 

 

Bricoles

 

Is fecit cui prodest ?

 

Le Matin Bleu du 18 octobre : selon un étude commandée par la Confédération à l’OCDE et à l’OMS et publiée suite à une indiscrétion – on ne peut compter sur personne ! –, notre système de santé est trop cher, et il n’est pas sûr qu’il soit viable. «Le fédéralisme est pointé du doigt», nous dit notre estimable quotidien gratuit.

 

Belle découverte ! Les Suisses n’avaient pas besoin d’une étude – combien cela a-t-il coûté, au fait ? – pour savoir que le système de l’assurance maladie obligatoire est un échec lamentable. Mais ce n’est pas le fédéralisme qui est en cause, c’est l’obligation !

 

Par ailleurs, on ne peut s’empêcher de penser que cette étude apporte fort opportunément de l’eau au moulin des partisans d’une caisse maladie unique et centralisée.

 

Question : dans ce cas, la Confédération c’est qui ? (mp)

 

Communication

 

Le 17 octobre, les Vaudois découvraient dans la presse à la suite d’une étude – encore une ! –que 40% d’entre eux ne comprennent pas les mots «safer sex» qui font pourtant partie de l’arsenal lexical des spécialistes de la lutte anti-sida. Il est vrai que 18% des personnes interrogées ne sont pas trop sûres non plus du sens du mot «séronégatif» et que d’autres – j’en fais partie, Dieu me pardonne ! – ne connaissent pas le sens de «prophylaxie de postexposition», ce qui est, nous dit-on, plus grave.

 

Peut-être les Vaudois seraient-ils moins benêts si on leur parlait un langage compréhensible. (mp)

 

 

En direct de Sirius

 

Lettre ouverte à un Allemand réveillé trop tôt

 

Cher Frédéric-Charles,

 

Ainsi, vous voilà élevé à l’insigne honneur de « dénoncé » en qualité de lecteur-correspondant de ces trop rares feuilles d’opinion allemandes encore indépendantes. Victime d’un de ces cafards  qui, faute de sain exercice physique ou intellectuel, courent le papier, armés de loupes à filtre et de carnets à souches. Vous découvrez ainsi que dans cette étrange RFA point très différente de cet Irak «rapté» au Président Saddam Hussein par le gang Bush, existent aussi ces tartarins en charentaises qui traquent les «bêtes immondes» dont le péché majeur est de tenter de ranimer leurs frères de sang.

 

Ne me dites pas que vous avez cru sincère votre chancelière quand elle avait l’impudence de rappeler au Président Poutine1 la nécessité de promouvoir une liberté d’expression qui n’a jamais été de règle depuis l’apparition de votre république fédérale. Ou peut-être son commentaire en réaction à la lettre du Président Ahmadinejad2 : «l’existence d’Israël appartient pour nous à la raison d’Etat» vous a-t-il échappé ? Au fait, le contenu de cette lettre a-t-il été porté à la connaissance du peuple allemand ? Et quelle est la légitimité de ce «pour nous», sachant que l’Allemagne dans laquelle vous vivez est juridiquement une sorte de «génération spontanée» très comparable à cette curieuse «démocratie» irakienne parachutée par les prédateurs de 2003… ? Car, si je ne m’abuse, votre pays est toujours au bénéfice d’un armistice conclu entre les plénipotentiaires du dernier Chancelier du IIIe Reich, le grand-amiral Dönitz, et les forces alliées… A moins que vous ne puissiez enfin me confirmer l’existence d’un traité de paix et m’indiquer quels en furent les signataires respectifs, je n’arrive toujours pas à comprendre ce qui confère une quelconque légitimité à votre république (mon Petit Larousse 2001 me confirme : «1948 : les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne décident la création d’un Etat fédéral dans leurs zones d’occupation», ce qui, vous en conviendrez, n’est pas une explication satisfaisante eu égard au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes et à l’universelle et inextinguible3 promotion de la Démocratie dans le monde).

 

Et pour en revenir à votre chancelière, si l’on admet, avec je ne sais plus quel humoriste français, que «passé un certain âge, on a la gueule qu’on mérite», autorisons-nous un peu de physiognomonie: les profonds sillons qui mettent la bouche de Madame Merkel entre parenthèses n’évoquent-ils pas pour vous l’articulation mandibulaire de ces poupées de ventriloques ? Vous manque-t-il le fantaisiste ? Pour ma part, je l’imagine assez bien en complet-veston croisé assis dans une pièce ovale… avec un drapeau du plus bel effet à la boutonnière et des étoiles en guise de boutons de manchettes !

 

Revenons au réel. J’espère, ami très cher, que vous n’irez pas, de par votre courage, grossir le lot de ceux, dans votre pays comme en d’autres, dont on ruine la santé physique et pécuniaire en des procès qui auraient fait frétiller d’aise le Petit Père Staline ; sachant bien que, comme eux, vous n’accepterez jamais de vous salir les genoux. Pour l’immédiat, je vous suggère la lecture d’un bon livre5 et de vous rendormir… Votre pays ne s’est point encore réveillé.

 

Question impertinente (aux derniers Européens qui échappent encore à l’anesthésie)

 

De quand date la dernière décision de bon sens prise par l’un de ceux qui prétendent vous mener à la Lumière ?

 

Pointe sèche n° 7 : un drôle de paroissien

 

Ce prélat avait choisi comme premier mot de la première phrase de son interview l’adverbe « honnêtement ». Aussi ai-je préféré changer de longueur d’onde, pensant qu’il était digne de figurer au «Livre noir des évêques de France»… ce qu’une vérification ultérieure me confirma.

 

Pointe sèche n° 8 : un chauffard

 

C’était hélas un de ces autodidactes qui avaient été recalés au permis de bien se conduire…

Max l’Impertinent

 

1 Suite à l’élimination de la journaliste russe Politovskaïa (journaliste «sans signification politique», selon la déclaration sans réplique de M. Poutine).

2 …à laquelle, cependant, il convenait, selon elle, de ne pas donner de réponse ! (Ubu est en vie et en bonne santé).

3 …désormais passablement écornée.

4 Science injustement passée de mode : il n’est que d’analyser les tronches de certains prétendants à l’investiture suprême pour s’en persuader.

5 Pourquoi pas d’Anne Kling La licratisation de la France (éditions Déterna, 2006, ISBN 2-913044-63-8) qui explique avec beaucoup de clarté la mise en place d’un système pervers de pensée unique dès le début des années trente en France, système qui, depuis, s’est attaché à coloniser subrepticement les autres pays d’Europe ?

 

 

Provocation

 

L’intolérance religieuse se manifeste une nouvelle fois en Suisse. Nous avons honte de vivre dans un pays qui foule aux pieds le droit de chaque être humain de vivre ouvertement et pleinement sa foi. Et c’est avec indignation que nous voulons dénoncer la suspicion et la méfiance que rencontre une communauté étrangère désirant bâtir un lieu de culte dans une petite ville alémanique: ces gens sont obligés d’ériger leur édifice en zone industrielle plutôt qu’au centre de la localité, de renoncer à une tour trop visible au profit d’un toit plus discret, de faire examiner «minutieusement» leurs plans par des architectes suisses «pour éviter une quelconque provocation» et, d’une manière générale, de tout faire «pour éviter la polémique» et de mener «une politique des petits pas afin de ne pas bousculer la population».

Le quotidien 24 heures, dans son édition du 26 octobre, nous révèle en effet les trésors de prudence et de discrétion dont doit faire preuve la communauté orthodoxe serbe de Suisse pour se construire une église dans la banlieue de Berne.

A bien y réfléchir, il est vrai que la construction d’une église chrétienne au milieu de nos minarets pourrait être ressentie comme une véritable provocation par les 310'000 musulmans qui vivent chez nous. Quant au clergé médiatique au pouvoir, il soupçonne les orthodoxes de passer plus de temps à prier Dieu qu’à jouer de la guitare et à militer pour les demandeurs d’asile, réunissant ainsi tous les indices d’une inquiétante dérive fondamentaliste.

De plus, l’UDC a déclaré qu’elle n’était pas opposée à «ce type d’édifice qui s’insère dans notre culture chrétienne». C’est bien la preuve que l’église en question ne saurait mériter une quelconque tolérance!

La question se pose plus généralement de savoir si l’on doit encore tolérer au cœur de nos cités la présence de symboles ostentatoires du christianisme, susceptibles de froisser les sensibilités. La cathédrale de Lausanne – dont d’exquises personnes affirment qu’elle est la plus belle des cathédrales – s’était vu promettre une seconde tour par un ex-candidat au gouvernement vaudois; la prochaine élection donnera-t-elle l’idée à quelqu’un de réclamer au contraire la disparition de son unique beffroi, affront à la laïcité et obstacle à la vue sur le CHUV?

Pollux

 

 

Allô, la SSR ? Ici la Terre !

 

C’est par ce titre amusant et pertinent que l’éditorialiste de 24 heures commentait, le 20 octobre dernier, l’ahurissante prétention de la Société suisse de radiodiffusion SSR-Idée suisse de réclamer 72 millions supplémentaires aux téléspectateurs en 2007.

 

On rappelle que la SSR reçoit déjà 1,1 milliard par an de redevance de la part des téléspectateurs, qu’ils regardent les chaînes suisses ou pas (recettes publicitaires non comprises).

 

Le motif avoué de cette gourmandise supplémentaire est «le prix de plus en plus élevé des droits de retransmissions sportives». Il suffirait donc de renoncer purement et simplement à ces retransmissions pour faire des économies de plusieurs centaines de millions, lesquels pourraient être investis pour l’amélioration de l’information culturelle et politique ou simplement rendus aux téléspectateurs.

 

Les amateurs de ballon rond ou ovale, ceux qui se sentent plus virils en regardant une course de Formule 1 et ceux qui veulent admirer Martina Hinggis ailleurs que devant sa machine à laver devront émigrer sur d’autres chaînes. La SSR perdra des «parts de marché». Et alors ? Ses tarifs publicitaires devront être revus à la baisse. Et alors ?

 

Si, finalement, le téléspectateur voit sa redevance diminuer de moitié en même temps que s’améliorent les programmes culturels et politiques d’intérêt national qu’on ne peut pas voir ailleurs, qui se plaindrait d’être privé des commentaires de M. Jacques Deschenaux, qui «couvre» 21 Grands Prix de F1 dans le monde entier aux frais de la princesse ?

 

C.P.

 

 

 

Dialogue interreligieux

 

«Dans ce domaine de l’action humaine consciente, du bien et du mal, de ce qui est prescrit ou défendu, la volonté ordonnatrice du Créateur se manifeste au moyen du commandement moral de Dieu inscrit dans la nature et dans la révélation, au moyen aussi du précepte ou de la loi de l’autorité humaine légitime dans la famille, dans l’Etat et dans l’Eglise. Si l’activité humaine est réglée et dirigée suivant ces règles, elle reste elle-même en harmonie avec l’ordre universel voulu par le Créateur.»

 

Pie XII : allocution au Tribunal de la Rote du 13 novembre 1949.

 

         L’expression «dialogue interreligieux» est totalement inconnue des Evangiles et doit donc a priori être considérée comme suspecte. Prenons la question à son fondement naturel d’abord, puis théologique et surnaturel ensuite. Tout dialogue suppose un rapport d’égalité d’où toute forme d’autorité est exclue. La définition même du dialogue limite objectivement son champ d’application. Un juge ne dialogue pas avec la personne qu’il vient d’inculper. Il place les actes constitutifs des griefs qu’il lui oppose dans la perspective de la loi. Leur relation est une relation de contrainte, non un rapport librement établi. Le magistrat fait ses investigations; l’inculpé est tenu de s’expliquer ou de se justifier. Pourquoi ces contraintes ? Parce que la loi ne se discute pas, elle s’applique.

 

         Or la foi religieuse non plus ne se discute pas, elle est à l’œuvre ou elle n’est pas. La seule forme concevable de dialogue interconfessionnel ou interreligieux est la controverse, non l’échange d’opinions, car la foi n’est pas une opinion (sauf chez les hérétiques), la foi religieuse est une adhésion inconditionnelle à la parole divine  révélée. La controverse porte donc nécessairement sur la seule question licitement et raisonnablement débattue entre personnes de religions différentes, celle de la véracité d’une révélation par rapport à une autre, nécessairement fausse si elle contredit la première, ou inversement. Si les adeptes de révélations que tous s’accordent à qualifier de divines, de part et d’autre, avec des contenus parfaitement contradictoires, se prêtent au dialogue, il y a tromperie sur le terme même de dialogue. En effet, lorsque des religieux ou des croyants de confessions ou de religions différentes font abstraction de ce qui les divise précisément sur le plan religieux, il est absolument faux de qualifier leur dialogue d’interconfessionnel ou d’interreligieux, car ces échanges n’ont pas la croyance pour objet mais des sujets d’une autre nature : la paix sociale ou politique, la morale indépendante de la croyance, etc. Ces échanges sont des échanges de nature politique entre membres de diverses confessions chrétiennes ou religions, non des échanges interreligieux ou interconfessionnels. Et même lorsqu’à l’intérieur des confessions chrétiennes, l’objet du dialogue est doctrinal, il ne peut s’agir en réalité que d’un marchandage, non d’un dialogue, impossible en raison du caractère dogmatique des anathèmes de l’Eglise, ou d’échanges d’opinions en matière religieuse, sans finalité possible. Cette dernière forme de dialogue n’est rien d’autre, en son essence, qu’un bavardage mondain dépourvu de toute consistance car si, de part et d’autre, on croyait réellement que Dieu est bien l’auteur de la parole qu’on répercute de Lui, on commencerait par convenir que cette parole ne se discute pas.

 

         Ce qui vaut pour la révélation divine s’applique aussi aux règles d’interprétation de cette révélation elle-même si celles-ci font partie intégrante de la révélation elle-même, ce qui est le cas pour l’Eglise catholique romaine, qui n’admet ni la mise en cause de son enseignement ordinaire et universel ni celle de sa propre légitimité à interpréter seule cette révélation. Dès lors, tout dialogue interconfessionnel ou interreligieux ne peut qu’être foncièrement et définitivement anticatholique en raison même de la structure égalitaire du dialogue.

 

         La moralité d’un dialogue ayant la foi catholique comme objet ne peut porter que sur la légitimité de cette position officielle de l’Eglise. Mais de tels échanges sont des controverses, non des échanges égalitaires. Il est normal que des confessions chrétiennes dissidentes ou des religions relativisent leur propre message et entrent ainsi en dialogue réciproque, avouant par là, à travers leurs incomplétudes reconnues, leur fausseté comme religions contradictoires. Il est par contre scandaleux que la foi catholique soit détournée de son sens et de sa dignité pour construire une structure mensongère de dialogue avec des religions qui toutes la contredisent sur des points essentiels. Ce type de dialogue implique l’apostasie de la vraie foi chez qui se réclame du catholicisme.

 

Michel de Preux

 

 

Taxer les millionnaires !

 

Voilà enfin une bonne idée, née dans le cerveau fertile d’un socialiste neuchâtelois : un impôt spécial taxant les millionnaires. Faire payer les riches. Originale, l’idée !

 

En outre, elle a de bonnes chances de bénéficier de la faveur populaire. Le corps électoral étant constitué dans son immense majorité de personnes qui ne seraient pas concernées par le paiement de cet impôt, il est évidemment tentant d’en grever les autres.

 

L’expérience a montré, cependant, que le contribuable aisé est moins captif, donc plus mobile, que le contribuable moyen ou modeste et que la taxation excessive des riches est une manière de tuer la poule aux œufs d’or. Dès que la pression fiscale dans un canton dépasse les charmes de ce canton, le millionnaire va planter sa tente ailleurs.

 

On connaît une petite commune vaudoise qui aurait été bien inspirée de ménager son contribuable Edgar de Picciotto, banquier privé qui assumait à lui seul la moitié du budget communal. Las de se faire tondre, il est rentré dans une république du bout du lac moins gourmande.

 

Si, à un bout de la pompe à phynances, on ne peut aspirer impunément et sans limite les économies du contribuable, sans qu’il finisse par s’en aller sous des cieux plus cléments, on ne peut non plus à l’autre bout réclamer des surcroîts d’arrosage sans que la pompe ne soit alimentée en subventions par les contribuables eux-mêmes.

 

Il est facile de proposer une loi fédérale (une de plus !) pour l’harmonisation des allocations familiales et on se demande bien pourquoi les âmes simples qui ont lancé ce projet se sont limitées à des allocations si modestes. Pourquoi ne pas inaugurer une politique familiale résolument progressiste, par l’octroi d’allocations familiales à hauteur de 2'000 (deux mille) francs par mois et par enfant ? … et des allocations de formation de 5'000 francs ?

 

Même le contribuable le plus idiot se rendra compte que ces largesses ne seront possibles que si le fisc vient mettre la main dans sa poche, et que c’est finalement lui-même qui paiera ces allocations, par l’augmentation de son impôt, par le renoncement à d’autres projets, par le gel de ses augmentations de salaire, par la perte des avantages espérés.

 

Faisons payer les riches et faisons payer les patrons sont deux slogans à l’usage exclusif des imbéciles.

 

C.P.

 

 

Les Africains sont-ils paresseux ?

 

 

Monsieur le conseiller national socialiste Andreas Gross est un menteur.

 

On sait aujourd’hui que M. Christoph Blocher n’a pas dit que les Africains sont paresseux. Les termes exacts qu’il aurait employés, lors d’une séance de la Commission des institutions politiques du Conseil national, le 14 septembre dernier et au sujet de l’aide économique à l’Afrique, seraient les suivants :  «Nous payons aujourd'hui 400 millions de francs. Je ne veux pas parler de son utilité. En tant qu'homme d'entreprise, je n'en vois aucune». Ou encore: «Ce qu'on doit faire avec l'Afrique, je n'en sais rien. Une possibilité serait de la laisser à son propre sort.»

 

Toute personne de bon sens ne peut que partager ce triste constat. Dans un article publié dans le numéro 560 de notre excellent confrère parisien Les 4 Vérités Hebdo1, M. Christian Lambert, ancien ambassadeur de France, s’exprime comme suit :

 

«Depuis les indépendances, il a été déversé en Afrique noire pour son développement 300 milliards de dollars d’aide publique. Le résultat est nul, absolument nul.»

 

Alors quoi ? On sait depuis longtemps que, depuis le départ des Européens, l’Afrique est tombée dans le chaos, et que, dans certains Etats, les routes ne sont plus entretenues,  les écoles et les dispensaires sont fermés, et règnent au plus haut niveau politique l’incurie et la corruption, l’incompétence arrogante et le népotisme.

 

On connaît aussi cette formule devenue célèbre : «L’aide au développement consiste à transférer l’argent des pauvres des pays riches sur les comptes des riches des pays pauvres» avec cet avantage supplémentaire pour les contribuables suisses que leurs dons généreux ne quittent pas toujours  le territoire helvétique, passant en quelques clics de souris de leur compte d’épargne sur les comptes numérotés des tyrans africains.

 

Mais on sait aussi que le continent africain recèle des richesses naturelles incroyables qui, exploitées avec compétence et diligence, seraient de nature à assurer à ce continent un développement économique fulgurant. Après quelques années,  non seulement les Africains renonceraient à s’expatrier mais  tous les Africains du monde retourneraient dans leur pays pour y profiter de ce miracle.

 

Pourquoi ce miracle ne s’est-il pas encore produit ? Est-ce parce que les Africains sont bêtes ? ou paresseux ? ou immatures ? De telles explications seraient à coup sûr constitutives de discrimination raciale au sens de l’art. 261bis du Code pénal. C’est pourquoi personne ne se risquera à proposer la seule mesure susceptible de faire sortir l’Afrique du chaos, des guerres tribales, de la faim et de la misère : la mise sous tutelle de ses Etats. Pendant un temps indéterminé mais limité, chaque Etat africain serait pourvu d’un Conseil de régence doté de larges pouvoirs, désigné par l’ONU, chargé d’analyser les causes du désordre et de prendre les mesures propres à y mettre fin.

 

Les régents devraient être choisis pour leurs compétences en matière économique dans les trois secteurs, en matières juridique, sanitaire, didactique, etc. parmi les experts reconnus pour leur probité. Qu’ils soient européens, africains ou asiatiques ne jouerait qu’un rôle secondaire, pourvu qu’ils ne soient pas ressortissants de l’Etat ou de l’ethnie dont ils assumeraient la régence.

 

Une telle opération, même limitée dans le temps, serait considérée, à juste titre, comme une recolonisation et c’est pourquoi elle n’a strictement aucune chance d’être soutenue par personne.

 

L’idéologie égalitariste ne pourrait supporter l’idée que certains peuples n’ont pas – ou pas encore – la maturité politique nécessaire à leur émancipation. L’idée même de tutelle leur est insupportable par ce qu’elle implique de restriction de l’autonomie, d’immaturité ou d’incapacité provisoire ou durable.

 

«Maintenant, je suis majeur, tu n’as plus rien à m’ordonner», plastronne le jeune adulte qui dépend pourtant encore de ses parents dans presque tous les domaines. 

 

Si les parents n’aimaient pas leurs enfants, ils feraient comme ont fait les décolonisateurs de l’Afrique, ils les mettraient à la porte en leur enjoignant de se débrouiller seuls, puisqu’ils sont majeurs !

 

Mais ce n’est pas ce que l’ado voulait dire : il veut les sous de papa et pouvoir les dépenser à sa guise, sans prescription, sans contrôle.

 

Cela fait plus de quarante ans que l’affreux colon européen a quitté l’Afrique et que les milliards de l’aide publique et privée ont eu, sur le développement des Etats bénéficiaires, un résultat voisin de zéro. Jusques à quand, Andreas Gross, abuseras-tu de notre patience ?

 

La Confédération n’a-t-elle pas autre chose à faire de son argent, de notre argent, que de le brader dans des largesses strictement inutiles ? M. le conseiller fédéral exprime ce que chaque électeur de bon sens pense aussi : «Ce qu'on doit faire avec l'Afrique, je n'en sais rien. Une possibilité serait de la laisser à son propre sort.»

 

Mais peut-être que M. le conseiller national Gross ou ses amis socialistes ont trouvé la solution. Qu’ils nous la soumettent sans tarder !

 

C.P.

 

[1] 65, rue Claude Bernard, 75005 Paris. Abt annuel 54 € TTC. Exemplaire gratuit sur demande.

 

 

Infrarouge ou info rouge ?

 

[L’article ci-dessous n’a pu être publié dans notre précédent numéro, faute de place. Comme il nous paraît toujours pertinent, nous vous le livrons aujourd’hui. Réd.]

 

24 heures du 13 septembre s’indignait de l’attitude du conseiller fédéral Blocher suite à l’enregistrement de l’émission Infrarouge  relative aux votations du 24 septembre. M. Blocher était opposé dans un débat contradictoire à des adversaires des lois mises en votations. Ce débat visait-t-il à l’objectivité ou devait-il avoir un avant-goût de propagande politique ? Je peux imaginer qu’idéalement, il devait se dérouler en toute objectivité et inviter les différents protagonistes à défendre leurs convictions en la matière. On connaît ce genre de joutes oratoires qui permet à des téléspectateurs encore indécis de se faire une idée plus précise sur le sujet et, cas échéant, de se fonder une opinion qu’ils exprimeront ensuite à travers leur bulletin de vote.

 

Dès lors, pourquoi troubler l’objectivité des débats par des caricatures partisanes ? Le caricaturiste, dont j’apprécie par ailleurs le talent, se trouve être un interlocuteur supplémentaire, transformant le débat des argumentateurs en un ménage à trois peu propice à la quête de la vérité que recherche l’auditeur.

 

Le caricaturiste, M. Becquelin, alias Mix & Remix, indigné, dit avoir été victime d’une tentative de censure. En fait, ce n’est pas le caricaturiste que M. Blocher voulait censurer, mais bien la TSR pour l’usage qu’elle a fait de ses dessins. J’apprécie au plus haut point les interventions, parfois excessives (sinon ce ne seraient pas des caricatures) de MM. Burki, Barrigue, Mix et Remix et de bien d’autres talentueux caricaturistes : leurs interventions dans la presse apportent une note d’humour et une réflexion supplémentaire à des événements souvent graves et préoccupants. En l’occurrence, l’intervention de dessins humoristiques dans un débat en recherche d’objectivité n’avait pas sa place. Finalement, que cette incongruité ait été perçue par Mme Blocher, spectatrice,  plus que par son mari, pris dans l’intensité du duel oratoire, importe peu. Mais, le journaliste de 24 heures, dans le feu de la critique, n’allait naturellement pas laisser passer cette superbe occasion de porter l’estocade à M. Blocher et à son épouse, «la Reine Silvia !», et, du même coup, d’accuser cette dernière de diriger le département fédéral à la place de son mari !… Il n’y a pas que M. Becquelin qui caricature !

 

J’avoue ne pas être un habitué de l’émission Infrarouge de Mme Romaine Jean.  Et je ne le regrette pas depuis que j’ai appris par la productrice que «les caricatures font partie du concept de l’émission».

En l’occurrence, il ne s’agit donc pas d’une bévue occasionnelle de la TSR, mais d’une maladie chronique !

 

Gérald Berruex

 

 

Précisions

 

A propos de la loi sur l’asile, vous avez pu lire dans le no 357 : «(…) la modification du 26 juin 1986 (…)». La modification en question date du 26 juin 1998.

        

         Par ailleurs, un de nos lecteurs nous a envoyé il y a plusieurs semaines un texte qui s’est égaré dans un déménagement, en même temps que son identité. Nous ne manquerons pas de publier sa contribution dès qu’elle refera surface, et peut-être même avant, si l’auteur se manifeste en nous envoyant une copie.

 

         Avec nos regrets.

 

Réd.