Sommaire :
A-t-on bien lu le discours de Ratisbonne ? Les réactions violentes
suscitées par cette allocution dans certains Etats musulmans démontrent ce que
certains s’obstinent à nier
«Tout débat politique au sein d’une
communauté chrétienne ne peut être que vain et source de désaccord» démontre Gérald Berruex
Mme Micheline Calmy-Rey s’agite infatigablement sur la scène
internationale, dans l’indifférence générale.
Max rend hommage à Jean Raspail et se demande si les bien pensants sont
si peu sûrs d’eux qu’ils doivent s’attaquer aux morts…
Désinformation, noble
profession
Tour d’horizon des jubilations journalistiques sur plusieurs sujets
d’actualité.
Michel de Preux attire notre attention sur l’ambiguïté du mot «dialogue» qui recouvre aujourd’hui
bien des discussions stériles, même sur des objets dont il ne convient pas de
discuter
Claude Paschoud explique pourquoi l’adoption de la nouvelle loi sur
les étrangers, et surtout les modifications de la loi sur l’asile ne vont
rien résoudre.
«Dans le septième entretien (dialexis – controverse)
édité par le professeur Khoury, l’empereur [byzantin Manuel II
Paléologue] aborde le thème du djihad, de la guerre sainte. Assurément, l’empereur
savait que dans la sourate 2,256 on peut lire : «Nulle contrainte en
religion !». C’est l’une des sourates de la période initiale,
disent les spécialistes, lorsque Mahomet lui-même n’avait encore aucun
pouvoir et était menacé. Mais, naturellement l’empereur connaissait aussi
les dispositions, développées par la suite et fixées dans le Coran, à propos de
la guerre sainte. Sans s’arrêter sur les détails, tels que la différence
de traitement entre ceux qui possèdent le «Livre» et les «incrédules», l’empereur,
avec une rudesse assez surprenante qui nous étonne, s’adresse à son
interlocuteur simplement avec la question centrale sur la relation entre
religion et violence en général, en disant : «Montre-moi donc ce que
Mahomet a apporté de nouveau, et tu y trouveras seulement des choses mauvaises
et inhumaines, comme son mandat de diffuser par l’épée la foi qu’il
prêchait». L’empereur, après s’être prononcé de manière si peu
amène, explique ensuite minutieusement les raisons pour lesquelles la diffusion
de la foi à travers la violence est une chose déraisonnable. (…)»
On nous pardonnera cette longue
citation du discours tenu à Ratisbonne par le pape Benoît XVI le 12 septembre
dans le cadre de son voyage en Allemagne. Mais comme les paroles du chef de
l’Eglise catholique ont failli déclencher une djihad, il importait de montrer, en replaçant le
propos litigieux dans son contexte, que le brûlot n’en est pas un,
qu’il n’y a pas de quoi fouetter un chat, que la seule personne à
qui on devrait réclamer des excuses est un empereur byzantin décédé en 1425,
que le fait de réprouver la guerre sainte comme moyen d’«évangélisation»
relève du simple bon sens et que ce n’est pas la faute des chrétiens si
Mahomet prétend le contraire et le dit dans le Coran.
Les
musulmans ne supportent pas qu’on taxe leur religion de violence. Mais la
violence même de la réaction des pays musulmans au discours de Benoît XVI vient
démontrer que l’islam est effectivement une religion violente. Et
l’arrogance avec laquelle les disciple du prophète ont réclamé des
excuses au souverain pontife illustre le fait que toutes les mains tendues par
les chrétiens, tous les dialogues interreligieux, toutes les manifestations de
tolérance et de compréhension, ressentis comme des preuves de faiblesse, ne
servent qu’à conforter les musulmans dans leur volonté de domination. Ils
devraient faire attention, toutefois : cette attitude pourrait se
retourner contre eux, car la peur de l’islam, de plus en plus répandue en
Occident chez les gens dont on n’entend pas la voix, mais qui sont le
plus grand nombre, pourrait déboucher un jour sur une réaction. Les croisades
et les guerres de religions l’ont montré : les chrétiens sont
capables eux aussi des pires violences.
Quant aux musulmans «modérés» qui
s’efforcent de démontrer, dans nos pays, que l’islam «moderne» est
pacifique, ou bien ils se trompent ou bien ils nous trompent. Dans le premier
cas, ils ne sont pas de bons musulmans et ils auront affaire un jour à leurs
«frères» musulmans orthodoxes; dans le second, ils sont eux-mêmes des musulmans
orthodoxes, donc adeptes d’une religion qui prône la violence.
En tenant son discours de Ratisbonne,
le pape Benoît XVI n’a pas détruit d’un coup toute
l’œuvre de son prédécesseur comme l’ont prétendu certains. Il
nous a permis, peut-être sans le vouloir, de constater une nouvelle fois
– souvenez-vous des caricatures de Mahomet – que les chrétiens, les
juifs et les adeptes d’autres religions n’ont à attendre de l’islam aucune tolérance. C’est
un service qu’il nous a rendu.
Le
Pamphlet
Les Eglises, tant catholique que protestante, se sont
abondamment engagées dans le débat politique (asile et étrangers) sur lequel le
peuple a eu à se prononcer le 24 septembre.
Lorsque
l’on appartient à un parti politique, c’est parce qu’on
trouve dans ce rassemblement de citoyens des idées, des projets ou des idéaux
que l’on souhaite partager, faire connaître ou, mieux encore, réaliser.
On peut certes s’opposer démocratiquement en assemblée de parti sur certains
points de détails ; c’est ce qui assure le dynamisme d’une vie
politique saine et ce qui génère des débats fructueux. On doit toutefois rester
uni sur les principes fondamentaux qui sont la base du parti. Peut-on être
socialiste si on ne charge pas l’Etat
de gommer les inégalités entre les citoyens ? Peut-on être libéral si on
ne met pas ses espoirs dans l’économie de marché ? peut-on être UDC
si on n’insiste pas prioritairement sur la sauvegarde de
l’indépendance de son pays ? Et si le parti auquel on appartient
montre subitement d’importantes dérives par rapport à sa charte
fondamentale, il est honnête de s’en distancier et de présenter sa
démission.
Et l’Eglise dans tout cela ? Quelle est sa
charte fondamentale ? Ne serait-ce pas le salut des hommes par la grâce de
Dieu qui a donné son fils unique afin que quiconque croit en lui ait la vie
éternelle (Jean 3/16) ? Certes, comme dans un parti politique, plusieurs
débats restent ouverts. On n’a pas fini de débattre de la rédemption par
la grâce ou par les œuvres, on n’a pas fini de cerner le problème du
sens de
Les églises se vident peu à peu. Croit-on les remplir
avec des slogans politiques ?
Gérald
Berruex
Micheline Calmy-Rey n’en finit pas de faire
joujou avec notre politique étrangère. Non contente de s’agiter à tout
propos et hors de propos, d’abreuver la terre entière de ses conseils et
de ses interventions inopportunes, elle brandit son tout dernier hochet qui
serait, selon 20minutes du 22 août, une candidature de
Car Madame Calmy-Rey est une grande championne de la
cause de la paix. Le même communiqué nous apprend qu’elle «milite
aussi pour “un engagement militaire renforcé de
Mariette
Paschoud
«Je suis contre la guerre mais pour le port du casque»
Pointe sèche n° 6 : un
vilain prétentieux
A court d’arguments, l’œil noir
derrière ses lunettes en culs de bouteilles, et la barbe électrique, il
m’avait asséné :
« Moi, Monsieur, j’ai été
élu !
– C’est bien possible, Monsieur, mais pas
par moi.
– Par quelqu’un de bien au-dessus de
vous !
– Dommage qu’il n’ait pas cru devoir
m’en faire part…»
Faute de dernier mot, il avait quitté la table en
maugréant une foule de malédictions, inaudibles mais certaines, à mon
intention.
Lettre ouverte à M. Raspail (pas celui du boulevard)
Cher Jean Raspail,
Il est temps
que je vous narre un petit incident parisien…, petit, mais significatif.
Printemps 1974, je m’engouffre dans un taxi et lance : «75 boulevard
Jean Raspail !». Temps d’hésitation du chauffeur qui, ayant quelques
lettres de plus que moi – s’il n’y avait plus beaucoup
d’anciens colonels russes, ils n’étaient cependant pas encore, à
cette époque, à quatre-vingts pour cent «issus de l’immigration» à
enclencher les compteurs – consentit quand même à me déposer boulevard
Henri Raspail. L’année précédente, vous aviez publié votre prémonitoire Camp
des Saints1 qui décrivait comment des gouvernements félons et
des élites perverties livraient nos peuples aux invasions allogènes…,
roman qui avait fait (et fait plus que
jamais) beaucoup parler de lui, mais que je ne découvrirais que trente ans plus
tard. C’est dire si celui-ci avait néanmoins déjà trouvé sa place dans
mon inconscient propre : je vous avais déjà dédié un boulevard ! Je
veux croire aujourd’hui que cela aussi était prémonitoire. Quant à votre
qualificatif si juste de «félons», il se superpose désormais à tout article de
nos journaux relatant les «actions» de ceux qui nous gouvernent…
Recevez ici l’assurance de ma très haute considération.
Vers un retour en force des
nécrophages et autres goules
On se demande par quel prurit un ancien politicien
français2 se permet de gribouiller une lettre ouverte (datée du
11.7.06) qui pourrait avoir été copiée d’un devoir de vacances de lycéen
– lamentations, approximations et exagérations comprises – au
président iranien Ahmadinedjad. Et de conclure par la menace voilée que
quelqu’un pourrait aller cracher sur la tombe du chef d’Etat
iranien… Quant à savoir si le sieur Léotard pourrait accéder
jusqu’à la première marche du mausolée…
On se demande quelle mouche a piqué le maire de Paris
de faire marteler sur la tombe d’Edouard Drumont l’inscription
« Auteur de “
On se perd en conjectures sur ce qui a mené M. Philip
Roth à exhumer le colonel Charles Lindbergh et Henry Ford (premier du nom) pour
figurer dans son Complot contre l’Amérique4 au titre de
conspirateurs ou de collaborateurs d’un Hitler laissé libre d’agir
par des Etats-Unis débarrassés de Roosevelt et non interventionnistes, et donc
victorieux à l’Est. Il est vrai que tous deux avaient été décorés par le
Chancelier du Reich de
On s’étonne de cette frénésie française de
débaptiser les rues honorant la mémoire du docteur Alexis Carrel, eugéniste, il
est vrai, et ami personnel de Lindbergh.
On ne s’étonne plus en sachant qu’en
Espagne, les statues à la mémoire du général Franco disparaissent
subrepticement les unes après les autres…
On se demande toutefois d’où vient, en pays
chrétiens, cette mode soudaine de s’attaquer aux morts…
Guantanamo n’est
qu’une rechute
Tout se passe comme si le monde vertueux découvrait
l’ignominie du traitement spécial des détenus de Guantanamo et autres
prisons secrètes états-uniennes comme une première en matière de non-droit de
la guerre. Ça n’est hélas pas le cas. Déjà en mars 1945, le général
Dwight E. Eisenhower, commandant suprême des armées alliées, avait ordonné que
les militaires allemands capturés soient traités en tant que Disarmed Enemy Forces (DEF –
forces ennemies désarmées) et non comme prisonniers de guerre. Ce nouveau
statut privait ainsi les captifs de la protection de la convention
internationale de Genève. Des ordres particuliers furent émis par les
Etats-uniens, dont celui stipulant l’interdiction «de fournir aux
“forces ennemies désarmées” un toit ou toute autre forme de
confort» n’est qu’un exemple parmi une multitude d’autres
contraires au droit des gens. Cette «stratégie» eut pour effet la mort
d’environ un million de prisonniers de guerre allemands entre 1945 et
1946 dans les camps états-uniens et français, des suites de malnutrition et de
maladie par exposition aux éléments naturels. Ce fait fut soigneusement occulté
par les vainqueurs et le serait encore aujourd’hui n’eût été le
livre du journaliste canadien James Bacque, Der geplante Tod5.
1 3e éd.
chez Robert Laffont, ISBN 2-221-08840-9.
3 En deux tomes aux
éditions Charlemagne, 1994, Beyrouth, Liban.
4 Ed. Gallimard, ISBN 2-07-077467-8.
5 Sous-titré Deutsche Kriegsgefangene in
amerikanischen und französichen Lagern 1945-1946, Frankfurt/M-Berlin, 1993.
Désinformation, noble
profession
La
corporation des journalistes, toujours très fière de sa noble mission,
s’est particulièrement distinguée ces derniers temps où la réalité
parfois tragique des simples citoyens lui a fourni de multiples motifs
d’excitation.
En
Autriche, lorsqu’une jeune fille a réussi à s’évader après avoir
été retenue prisonnière pendant huit ans par un sadique, les gens de presse ne
se sont plus tenus de joie et ont laissé libre cours au voyeurisme odieux et
hystérique qui caractérise leur profession. C’est ainsi qu’on a pu
voir – qu’on a dû
voir – quinze mille fois le visage du ravisseur, des centaines de croquis
détaillés de la cachette souterraine et de mauvaises photos d’une moitié
du coude de la victime derrière trente policiers. Des hordes de psychologues
ont eu l’occasion de s’épancher dans les journaux et d’y
étaler leur science – laquelle ne diffère pas fondamentalement des
conversations matinales entre Madame Michu et sa voisine de palier, car, à
force de répétition, tout le monde est désormais capable de citer, au détour
d’une phrase et avec un frisson de fierté, le fameux «syndrome de
Stockholm». La victime de ce fameux syndrome, donc, a fini par accorder une
interview que les chaînes de télévision du monde entier se sont arrachée à prix
d’or, tandis que les commentateurs du monde entier répétaient
inlassablement les mêmes phrases: cette jeune fille est jolie, impressionnante,
elle montre une grande maîtrise d’elle-même… mais elle n’a
pas tout raconté, elle a
laissé des «zones d’ombre» et n’a révélé aucun des détails sordides
que les intervieweurs voulaient entendre. Et le droit à l’information,
alors ?
De
ce côté-ci du Vorarlberg, le cas le plus édifiant fut sans doute le viol
d’une petite fille de cinq ans par deux garçons de onze et treize ans, à
Rhäzuns dans les Grisons. Dans ses comptes rendus, l’Agence
télégraphique suisse a imposé un silence absolu sur l’origine
ethnique des deux violeurs, comme elle le fait chaque fois que des étrangers
sont en cause. Le quotidien 24 heures,
pour sa part, nous a parlé de «Pierre» et de «Robert» en précisant qu’il
s’agissait de «prénoms d’emprunt», cet emprunt laissant ainsi
croire à l’existence d’une importante communauté francophone dans
cette région des Grisons. C’est finalement Le Matin, faire-valoir populiste du même groupe de presse, qui
nous a appris que Pierre et Robert s’appelaient en réalité Ardip et Behar
et qu’ils étaient tous deux kosovars. Une fois la mèche vendue, les
éditorialistes du Temps ont dû délaisser de toute urgence leur
vernis de professionnels sérieux pour nous expliquer que l’origine
ethnique des violeurs n’avait aucun, mais alors aucun rapport avec leur
acte.
La
palme de l’éthique, enfin, pourrait revenir à des journalistes de
télévision indiens qui, voyant un homme protester devant le commerce de son
ancien employeur pour obtenir des arriérés de salaire, l’ont poussé à
s'immoler par le feu en lui tendant des allumettes et de l’essence. Les
journalistes ont ensuite tranquillement filmé la scène.
Ce
sera tout pour aujourd’hui, vous pouvez rallumer votre télévision.
Pollux
«Il est impossible que tous
dialoguent.»
Romano Amerio : Iota
unum (Etude des variations de l’Eglise catholique au XXème siècle), N.E.L., Paris 1987, p. 298.
Dialoguer, c’est échanger,
converser avec autrui. La note caractéristique du dialogue est la courtoisie,
la sincérité, l’écoute, le respect d’autrui, mais aussi la qualité
des exigences qui nourrissent le dialogue, en font la saveur, lui évitent la
chute dans le bavardage, l’inconsistance. Aussi, pour conserver toutes
ces qualités, le dialogue ne peut porter que sur des matières appropriées,
sujettes à opinions divergentes, précisément. On peut s’entretenir
d’écoles littéraires ou philosophiques, de pratiques professionnelles, on
peut discuter des goûts artistiques ou culinaires, de tout ce qui relève de la
subjectivité et qui, par nature, est abandonné à notre libre appréciation
personnelle, dans le champ de la libre critique historique aussi, bien entendu1…
Mais tel n’est pas du tout le
sens moderne, ou plutôt moderniste, du mot dialogue. Ce dernier porte au
contraire – et il le doit même,
selon ses adeptes fanatiques – sur des matières en soi impropres à des
échanges égalitaires entre personnes2. C’est ainsi que le
droit en vigueur dans un Etat, pour autant qu’il soit moralement
légitime, ne saurait devenir matière à libre entretien entre particuliers, qui
sont tenus de le connaître, non d’en juger personnellement. Un voleur ne
peut mettre le droit de propriété en discussion avec sa victime ! Toutes
les opinions morales doivent cesser de s’exprimer devant des comportements
mettant l’intégrité d’autrui en danger. Il en va de même pour les
questions religieuses : le fait de
De même, on ne met pas en discussion
l’appartenance à une patrie, ni les liens privilégiés de ce rapport
imposé par la nature et accepté par l’homme, sans par là même rompre avec
la règle sociale élémentaire de la loyauté, ce que font aujourd’hui tous
ceux qui voudraient que le droit d’asile soit pratiquement assimilé au
droit de la nationalité, privant ce dernier de tout sens ! La notion
d’étranger, dont les titulaires ne peuvent que jouir de statuts
précaires, est connexe à celle de patrie et ces deux notions sont absolument
indissociables. Quand, au nom de l’égalité juridique formelle et
abstraite, on refuse cette discrimination première sous le prétexte que
l’échange est toujours fécond, toujours positif, en tous domaines (mais à
condition qu’il soit imposé…), utiliser dans ces cas le terme de dialogue
est une véritable imposture qui s’opère par la subversion pure et simple
du sens d’un mot. Ce mot est alors le masque de la violence et de la
ruse, du triomphe de la malhonnêteté dans les rapports humains et politiques en
particulier. Tel est aussi le fameux dialogue interreligieux, puisque Dieu y
est
méprisé a priori dans sa révélation faite aux hommes, y compris dans les règles
qu’Il a lui-même établies quant à l’interprétation de cette
révélation. Or, dans la mesure où des hommes prennent au sérieux
Aujourd’hui, l’apologie des
dialogues désordonnés, par la presse notamment, dissimule un acquiescement très
répandu à la violence révolutionnaire, dont ce type de «dialogue» fait partie
intégrante. Est-il alors bien surprenant qu’en Suisse même nous comptions
plus d’une dizaine de milliers d’internements dans des hôpitaux
psychiatriques par an, si l’on se réfère aux statistiques de
l’Observatoire suisse de la santé pour les années 2000 à 2002 ? Un
tiers de ces internements sont volontaires, un cinquième sont effectués de
force… Il se dit que les psychiatres ne parviennent pas à soigner ces
patients, dont l’état empire en milieu hopspitalier… Combien
différente était la situation des «blessés de la vie» dans les Evangiles !
Ils venaient d’eux-mêmes au Christ, qui ne leur demandait qu’une
chose : croire en Lui. Ils s’en trouvaient guéris tout
soudain…
1 Jusqu’où est
allée l’intention des nazis à l’égard des juifs, par exemple, ou la
colonisation fut-elle bénéfique aux peuples qui la subirent ?
2 Inversement, sur
certains sur certains sujets politiquement sensibles, le dialogue, quoique
licite en soi, est légalement proscrit. La libre opinion y devient un
délit… Mystification démontrée !
Je suppose, en
écrivant cet article le 21 septembre, que la nouvelle loi sur les étrangers et
les modifications proposées de la loi sur l’asile auront été acceptées
par le peuple au moment où le Pamphlet
sera distribué.
Comme je l’ai
exposé aux lecteurs qui nous ont fait l’amitié de participer à notre
dîner d’anniversaire, le 2 septembre dernier à Pully, la nouvelle loi sur les étrangers a au moins un
mérite, c’est de regrouper dans un même texte les normes qui,
jusqu’alors, figuraient dans la loi et dans l’ordonnance du Conseil
fédéral limitant le nombre des étrangers.
Les dispositions de
cette ordonnance, notamment la politique dite des deux cercles, acquièrent, après avoir été discutées au
Parlement et approuvées par le corps électoral, une légitimité démocratique
incontestable.
Je suis moins
optimiste, en revanche, sur les bienfaits qu’on peut espérer des
modifications de la loi sur
l’asile.
Lors des débats sur
cet objet, tous se sont accordés à proclamer la nécessité de maintenir la «tradition humanitaire de
Un tel discours,
dans un débat, a le mérite de mettre tout le monde d’accord à moindre
frais, grâce aux vertus de la langue de bois. La prétendue «tradition humanitaire de
La situation
économique de l’Europe, pendant la deuxième moitié du siècle dernier, a
suscité des flux migratoires que ni l’Union européenne ni
Le toilettage de la
loi sur l’asile, dont les plus anciens lecteurs du Pamphlet se rappellent sans doute
tout le mal que je pense, aussi bien de sa version du 5 octobre 1979 que de la
modification du 26 juin 19981 n’améliorera pas la situation.
En 1999, les
dépenses dans le domaine de l’asile se sont montées à 1,5 milliard de
francs. Aujourd’hui, le budget de l’ODR oscille entre 900 millions
et un milliard.
Pour le traitement
de 20'000 cas, cela représente fr. 50'000.- par candidat.
En 2005, sur 12'695
cas traités, l’asile a été accordé à 1'497 reprises, soit le 11,8 %. Cela
signifie en somme que le milliard dépensé par année est justifié par la
protection de 1'500 «vrais» réfugiés. Une dépense de fr. 668'000.- par tête.
Vu autrement, 982
millions sont dépensés chaque année pour traiter le cas de personnes qui ne
sont pas des réfugiés au sens de la loi.
C’est
évidemment absurde, surtout que ces «faux réfugiés» sont des étrangers
parfaitement honorables, dont le seul tort, aux yeux de notre législation, est de
n’être pas, dans leur Etat d’origine ou dans le pays de leur
dernière résidence, exposés à de sérieux
préjudices en raison de leur race, de leur religion, de leur nationalité, de
leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions politiques.
Ils sont arrivés en
Suisse pour fuir non pas une persécution étatique mais tout simplement
l’insécurité et la misère. Ils sont interrogés dans un centre
d’accueil, puis dans les locaux de l’autorité cantonale, où on
s’efforce de leur faire tenir un discours imprécis, de trouver dans leurs
deux récits la plus petite contradiction pour décréter que leur discours manque
de vraisemblance, qu’ils sont donc des menteurs, ce qui dispense
l’Office des migrations
d’étudier plus avant la réalité des persécutions dont ils se
prétendent les victimes.
On leur offre
néanmoins un droit de recours, qui sera peut-être traité plusieurs années plus
tard, au moment où le requérant s’est réintégré dans le tissu social,
qu’il a une profession, un emploi, qu’il paie ses créanciers,
bailleur, assureur etc., qu’il
s’acquitte de ses impôts et que ses enfants sont scolarisés.
Huit virgule huit
fois sur dix, l’autorité de recours confirme la décision négative de
l’autorité intimée. L’étranger doit partir.
Alors, soit il respecte
cette décision et profite d’un viatique offert par
Le Conseil fédéral
estime à env. 100'000 le nombre des sans
papiers qui vivent en Suisse actuellement, une partie d’entre
eux sans assurances sociales, ni
assurance maladie ou accident.
Avec
la nouvelle loi, cette situation ne changera malheureusement pas.
Les bonnes âmes,
qui placent la personne de l’étranger au centre de leurs préoccupations,
voudraient que chaque requérant soit accueilli avec générosité et traité avec
humanité. Que les sans papiers soient tous régularisés. Que tous ceux qui travaillent
reçoivent une autorisation de séjour….
Mais cette approche
généreuse n’est pas la seule qu’il faille envisager. Il existe
aussi, dans la pesée des intérêts, ceux de la communauté nationale dont il faut
tenir compte.
Les préceptes évangéliques sur
l’amour du prochain s’appliquent à des individus, non à des
nations, dont le rôle a toujours été, est, et restera probablement toujours la
défense de ses propres membres, de leur sécurité, de leur prospérité, de leur
cohésion, et de la paix civile qu’il s’agit de préserver entre ses
membres.
Les buts de
Certes, il est
cruel de renvoyer dans son pays d’origine un candidat à
l’émigration qui espérait, en s’installant en Suisse, y trouver un
travail, un système de sécurité sociale performant, un réseau de santé
efficace, des perspectives de formation au-dessus de la moyenne pour ses
enfants et ses petits-enfants.
Mais cette cruauté
ne peut être évitée par l’Etat, qui a le devoir de faire exécuter ses
décisions définitives et exécutoires, quelque mérite individuel que possède le
malheureux étranger débouté.
Peut-être serait-il
temps de remettre en question la révolution juridique qui s’est opérée,
il y a une trentaine d’années, dans la conception du droit d’asile
(précédemment : droit que s’arroge tout Etat souverain
d’accorder l’asile au ressortissant d’un autre
Etat ; actuellement : droit
subjectif d’un étranger se trouvant dans le cadre de la définition
ci-dessus rappelée d’obtenir une autorisation de résidence en Suisse), et
d’imaginer, avec les autres pays, membres de l’Union européenne,
une politique d’aide aux pays du Tiers-monde qui inverse la tendance des
actuels flux migratoires.
Les Etats de
provenance des requérants sont, généralement, des pays possesseurs de grandes
richesses naturelles et de fortes potentialités de développement. Des pays qui,
bien gouvernés et politiquement stables, pourraient devenir dans quelques
années des Eldorados dans
lesquels les Européens se précipiteront pour améliorer leur situation
matérielle…
Des pays dans
lesquels seraient bienvenus, aujourd’hui et sous forme
d’investissements, les 982 millions que
L’adoption
– probable – des nouvelles dispositions de la loi sur l’asile
n’aura rien résolu. Un
problème qui n’a pas de solution est généralement un problème mal posé.
Il serait temps de repenser ses données.
Claude
Paschoud
[1][1]
Voir notamment : «La loi…la loi !» (n° 161, janvier 1987), «Conspirateur» (n° 164, mai 1987), «Mehmet Oezdemir : un cas ordinaire»
(n° 210, décembre 1991) ou «Droit
d’asile» (n° 279, novembre 1998)
35e anniversaire du Pamphlet :
Claude Paschoud recommande 1 x Oui à la modification de la loi sur les
étrangers, 1 x Non à la modification de
la loi sur l’asile et d’éviter le sorbet à l’ananas qui
n’a aucun goût.