Lausanne 35e année      «ne pas subir»       Octobre  2005 No 348

 

 

Sommaire :

 

Editorial

L’éditorialiste s’en prend à la prétention fédérale d’harmonisation scolaire

 

Une loi contre le cannabis plébiscitée à Bâle-Campagne

Félicitations à Mme Sabine Pegoraro, chef du département de justice, de police et des affaires militaires de Bâle-Campagne !

 

En direct de Sirius

Max voit mal comment les USA pourraient rééditer contre Saddam Hussein la mascarade pseudo-judiciaire inaugurée à Nuremberg. Il s’intéresse en outre aux OGM, à une histoire de paille et de poutre entre la Syrie et la France, à un étonnant déploiement policier, et à la page de couverture de la Revue suisse

 

Bricoles

Où on se demande ce qu’est la «musique d’extrême-droite», pourquoi le canton de Vaud a besoin de tant de souris et depuis quand les journalistes de 24 heures ont décidé d’être objectifs

 

Tuer l’essence de l’homme (2)

Suite des réflexions de Michel de Preux (la première partie a été publiée dans le Pamphlet N° 346)

 

Vae victis

Variations sur le thème de la justice

 

35e anniversaire

Un malheureux accident de moto subi par Claude Paschoud a incité les organisateurs à différer le dîner d’anniversaire, initialement prévu pour le 12 novembre.

 

Le chemin de l’enfer…

La modification de la loi sur le travail suscite l’inquiétude d’un syndicat

 

L’Office fédéral de la statistique (OFS) et les mathématiques

Comme naguère le BPA (qui prétendait naguère que le port généralisé du baudrier de rétention allait sauver en Suisse… plus de vies que le nombre total des tués de la route enregistrés), l’Office fédéral de la statistique mérite, en calcul élémentaire, un grand bonnet d’âne

 

 

 

Editorial

 

C’est bien connu, les Suisses n’aiment pas rester chez eux, la stabilité les effraie, ils sont constamment en train changer d’air et d’emploi, ce qui les conduit tout le temps à passer d’un canton à l’autre. Du coup, leurs enfants sont sempiternellement ballottés de système scolaire en système scolaire,  ce qui nuit considérablement à leur équilibre psychique. Le phénomène est connu depuis de nombreuses années, mais aucune solution n’avait été trouvée jusqu’ici, chaque canton s’en tenant, sous réserve de quelques concordats, à sa conception de l’instruction publique.

 

Enfin vint l’harmonisation volontaire. Des organes intercantonaux se créèrent, dont l’un des plus connus est la Conférence suisse des directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP) qui coordonne à tout va, à coups de directives et de recommandations. L’ennui, avec ce système, c’est qu’il a ses limites : un canton décide-t-il, contre l’avis des autres, d’introduire, par exemple, l’anglais comme première langue étrangère à l’école ? On peut le critiquer, le semoncer, le tancer, le menacer, le supplier, mais on ne peut pas l’en empêcher. On appelle cela la souveraineté cantonale, notion ringarde s’il en fut à notre époque de profondes mutations.

 

Il fallait donc que ça change.

 

C’est chose faite :  l’harmonisation obligatoire sous la férule de la Confédération est arrivée le mercredi 5 octobre sous la coupole du Palais fédéral. C’est officiel et ce sera constitutionnel, à moins que le peuple n’y mette bon ordre : les cantons auront l’obligation de s’entendre en matière scolaire – âge d’entrée à l’école, durée de la scolarité, reconnaissance des diplômes, notamment. S’ils ne se mettent pas d’accord, la Confédération aura l’obligation de légiférer à leur place. Ainsi en ont décidé nos conseillers nationaux par 152 voix contre 8 et 7 abstentions, 33 élus ayant semble-t-il considéré que le sujet n’était pas digne de leur attention.

 

Compte tenu de la boulimie de compétences de la Berne fédérale et de sa légiféromanie, il n’est pas douteux que le plus minime désaccord – l’heure exacte de la rentrée scolaire, par exemple – entre les cantons servira de prétexte à la Confédération pour intervenir.

 

Vincent Bourquin de 24 heures commente avec jubilation cette «révolution scolaire» et nous dit sans ambages où celle-ci doit nous conduire : «Il faut aller plus loin. Ainsi, tous les cantons devraient avoir le même programme scolaire.»1

 

         En voilà une bonne idée ! Certes, il faudrait pour la réaliser que les cantons s’entendent sur une langue d’enseignement unique. Cela risque de présenter quelques difficultés, mais la Confédération les résoudra…en imposant l’anglais.

 

         Car ce ne peut être que l’anglais. Il faut tenir compte de l’avenir. En effet, le besoin d’harmonisation qu’on invente à l’échelon suisse va se manifester bientôt à l’échelon européen. On ne peut tout de même pas exiger que tous les plombiers polonais qui s’apprêtent à nous envahir tolèrent que leurs enfants soient contraints de s’adapter à un système scolaire différent du système polonais. Songez au traumatisme ! Et nous autres qui avons tellement la bougeotte, pourrons-nous supporter que nos enfants doivent s’adapter au système scolaire de la Pologne s’il nous prend fantaisie d’aller faire de la plomberie dans ce pays ? Certes non. Il faudra donc créer sous la direction de quelque organe bruxellois un «espace de formation européen» auquel la Suisse ne manquera pas d’adhérer et qui impliquera évidemment une langue scolaire commune, à savoir l’anglais désormais omniprésent.

 

         Vous pensez que nos conseillers nationaux et fédéraux sont de dangereux centralisateurs ? Point du tout : ce sont des précurseurs visionnaires que l’Europe entière nous envie !

 

Le Pamphlet

 

1 24 heures du 6 octobre, p. 5

 

 

 

Communiqué de l’ARCD

 

Une loi contre le cannabis plébiscitée à Bâle-Campagne

 

Yverdon-les-Bains, le 26 septembre 2005 – Approuvée par plus de 67 % des votants, la loi «anticannabis» de Mme Pegoraro a été littéralement plébiscitée dimanche à Bâle-Campagne. L’Association romande contre la drogue (ARCD)1, qui vient de tenir son assemblée générale annuelle à Lausanne, se félicite de ce résultat qui marque le souci d’une protection efficace de la jeunesse et constitue une cuisante défaite pour le lobby de la drogue.

 

Après le Tessin, en 2003, Bâle-Campagne est le deuxième canton à se doter d’une loi contre le «chanvre à drogue». Le Liechtenstein en a aussi adopté une en 2004, qui donne, comme au Tessin, entière satisfaction.

 

Rédigée sur l’initiative de Mme Sabine Pegoraro, chef du Département de justice, de police et des affaires militaires de Bâle-Campagne, la nouvelle loi verrouille le marché du chanvre industriel en soumettant toute culture de plus de neuf plants à une autorisation préalable. Celle-ci est subordonnée à l’utilisation de semences produisant du chanvre à faible teneur en substance psycho-active (moins de 0,3 % de THC). La culture comme la récolte sont soumises à des contrôles. Des amendes allant de 100 à 2'000 francs sont prévues pour les contrevenants.

 

En 1997, le Conseil d’Etat de Bâle-Campagne avait cru devoir déposer à Berne une initiative parlementaire demandant la légalisation totale du cannabis par sa suppression de la liste des substances interdites de la loi fédérale sur les stupéfiants. Six ans plus tard, en 2003, on comptait jusqu’à 34 magasins de chanvre dans le demi-canton et la consommation de drogue chez les jeunes y avait tellement progressé que, loin à la ronde, on avait surnommé Bâle-Campagne «la Mecque du cannabis» (« Hanf-Mekka »). Ces magasins vendaient non seulement du cannabis hautement dosé, mais aussi de l’ecstasy, des amphétamines, du Rohypnol et de la cocaïne. Plusieurs d’entre eux se trouvaient à proximité immédiate d’écoles. La police, par ses nombreuses perquisitions, les a pratiquement tous contraints à fermer. Une vingtaine de plantations ont aussi été détruites. La loi qui vient d’être adoptée, si elle s’accompagne d’un renforcement de la prévention auprès des jeunes (tâche qui revient prioritairement aux parents, aux enseignants et au corps médical), devrait permettre de faire entièrement le ménage.

 

L’Association romande contre la drogue souhaite que d’autres cantons s’inspirent de ce modèle législatif et attend des Chambres fédérales qu’elles donnent une suite favorable à l’initiative parlementaire de M. Christian Waber (UDF/BE), qui va dans le même sens.

 

1 Contacts:

Maximilien Bernhard, tél.: 079 / 600 99 68, courriel: m.bernhard@bluewin.ch

Jean-Philippe Chenaux, tél.: 021 / 796 33 00, courriel: jpchenaux@centrepatronal.ch

 

 

En direct de Sirius

 

Irak… Vers un Nuremberg bis ?

 

Les USA pourront-ils rééditer l’aberration juridique du procès-qu’il-est-interdit-de-remettre-en-question ? Pas si simple… Primo, l’effet de surprise ne joue plus et les opinions publiques mondiales ont eu, depuis soixante ans, toute latitude de prendre la mesure de ce que fut la sinistre pantomime de la mise en accusation d’un vaincu par des vainqueurs, sur la base d’une législation à effet rétroactif dans un système judiciaire totalement orienté en faveur de l’accusation, et de ses conséquences à long terme. Secundo, il y a gros à parier que le président Saddam Hussein, qui a toujours beaucoup lu, saura éviter la répétition des chausse-trapes qui aboutirent, lors du premier procès du genre, à l’éclatement du front commun de défense dans une sorte de chacun pour soi autoaccusatoire quasi général. Tertio, à la différence des membres du gouvernement allemand légal de 1945, le président irakien vaincu, prisonnier de guerre d’une puissance occupante, est jugé selon le bon plaisir de ses vainqueurs, par un régime mis en place par ces derniers – autant dire, un régime fantoche –, ce qui pose avec d’autant plus d’acuité le problème de la légalité du «tribunal»…

 

«Terminator», vous connaissez ?

 

Il ne s’agit pas d’évoquer ici un quelconque film d’horreur et de fiction, mais un programme bien réel, celui développé, il y a une quinzaine d’années, par le géant agro-alimentaire Monsanto et dévoilé à temps par la Fondation Rockefeller : il s’agissait d’inonder l’Afrique noire d’une variété de maïs transgénique aux multiples qualités nutritives et très résistante aux vilains parasites avec, toutefois, un petit inconvénient, ô combien profitable pour le vendeur : les plants produisaient des graines stériles, ce qui revenait à réduire la population des pays inséminés à une clientèle captive pour toutes nouvelles semailles… Ouf ! C’était il y a quinze ans déjà ! Mais peut-on s’étonner que les faucheurs français qui passent actuellement en jugement pour avoir tout récemment anéanti quelques hectares d’OGM se soient précisément attaqués à des produits Monsanto ?

 

La réponse du berger…

 

M. Douste-Blazy, «Mi-quai» pour ses subordonnés du «Quai» (d’Orsay), ou encore «le ministre étranger aux affaires» pour la presse française encore lucide, emboîtant le pas au grand frère états-unien, s’indigne vertueusement de ce que la Syrie, déjà condamnée en cours d’enquête onusienne pour l’assassinat de l’ancien premier ministre libanais Rafik  Hariri, ne coopère pas de façon satisfaisante avec la justice internationale que nous connaissons bien, brandit la menace de sanctions… et se voit très joliment tempérer par l’ambassadrice de Syrie à Paris qui précise, le 27.10., sur les ondes de France Info: «Comme votre président, notre président bénéficie, de par notre constitution, de l’immunité judiciaire et ne peut être appelé à comparaître». Voilà un rappel qui sera reçu «cinq sur cinq» à l’Elysée…

 

Trop d’honneur !

 

Mardi 22.10., une manifestation devait se dérouler à Paris, devant l’Institut Goethe, pour demander la libération de MM. Ernst Zündel, René-Louis Berclaz et Siegfried Verbeke, tous trois détenus en divers pays d’Europe en vertu des lois-bâillons qui infectent désormais la quasi-totalité des législations européennes. Est-il bien utile de préciser que, sans doute pour répondre aux exigences de la toute démocratique liberté d’expression-à-sens-obligatoire, cette manifestation fut promptement interdite ? Et donc, en toute logique, la quinzaine de courageux inconscients qui eurent le front d’outrepasser l’interdiction se virent confrontés au contenu de… pas moins de quatorze cars de police (sept dans la rue de l’institut et sept dans la rue adjacente). C’est ce qui s’appelle, en termes de tactique, «marquer son effort principal» ou je ne m’y connais pas !

 

Information objective ou morceaux choisis ?

 

La relation qui suit pose la question de l’information telle qu’elle est filtrée aux Suisses de l’étranger :

 

La Revue Suisse, éditée par l’Organisation des Suisses de l’étranger, sise à Berne, adressée automatiquement à tout les confédérés de la «cinquième Suisse» par les ambassades et les consulats helvétiques, et dont la responsabilité des pages officielles incombe au Service des Suisses de l’étranger du DFAE, peut-elle être considérée comme une émanation du DFAE ? Le statut de cette publication ne nous étant pas connu, la question reste posée. Cette revue, donc, publie en page de couverture de son numéro 4/05, en illustration d’un article intitulé «L’armée suisse cherche de nouveaux ennemis», le portrait d’un soldat noir… Mon correspondant, le major Axt1, s’étonne d’un choix sans le moindre rapport avec le sujet et qui n’a pas même la vertu d’une exclusivité – il y a belle lurette que notre armée incorpore quelques soldats d’origine allogène, sans jamais en avoir fait un plat ­– et fait remarquer ce point au rédacteur en chef par une lettre dans laquelle il demande si la RS était «animée du souci discutable de choquer» ou si l’organe d’information entendait encourager au métissage, processus qu’il pose en «[nivellement du] peuple suisse au plus grand dénominateur commun». Le major Axt reçoit, trois semaines plus tard, une courtoise réponse, signée de quelque collaborateur de rédaction, le prévenant avec une exquise sollicitude que, ne disposant « malheureusement que de peu de place [la RS ne peut pas lui] promettre de publier [son] courrier ».

 

Le courrier du major Axt n’a pas été publié… En revanche, le numéro 5/05 de la RS passait au «courrier des lecteurs» agrémenté d’une «page supplémentaire de lettres de lecteurs» une lettre dithyrambique sur le thème du «visage du jeune soldat [offrant] un nouveau modèle aux Suisses de toute race [prouvant] que la tradition et la réalité incontournable [sic] sont parfaitement compatibles»… Pourquoi pas ? Si traduire c’est souvent trahir, éditer, c’est toujours choisir… Au fait, ce dernier numéro de la RS s’ornait en couverture du sympathique et anodin portrait de l’entraîneur de l’équipe nationale suisse de football… et annonçait en troisième position, après les informations fondamentales «Köbi Kuhn cherche la relève du football à l’étranger» et «Bertrand Piccard compte faire le tour du monde en avion solaire» :

 

«La politique de la neutralité est-elle encore d’actualité ?»2

 

CQFD…

 

Max l’Impertinent

 

1 Les fidèles lecteurs savent que Max attribue volontiers des pseudonymes à ses aimables correspondants…

2 Article éloquent dont Max recommande la lecture (Revue Suisse – prix du numéro : 5 Fr – Alpenstrasse 26, CH-3000 Berne 6 – fax : 031 356 61 01 – Internet : www.revue.ch).

 

 

Bricoles

 

Extrémisme musical

 

         Une brève de 24 heures du 29 septembre nous apprend que «des CD contenant de la musique d’extrême-droite ont été distribués à des élèves de 13 à 16 ans dans quatre cours d’école du canton d’Argovie.» Emotion ! La police fédérale enquête !

 

         Ça manquait ! La musique comme vecteur des tendances politiques, on n’y avait pas encore pensé. Demain, on apprendra que la musique de Mozart est de gauche, celle de Bach du centre-gauche et celle de Stravinsky du centre-droite ou l’inverse. La police fédérale va avoir du pain sur la planche pour établir quelle musique peut être diffusée et laquelle est subversive.

 

         Grotesque !

 

Le point de vue d’une ménagère vaudoise

 

Quand un ménage peine à boucler ses fins de mois, il doit éviter toute nouvelle dépense, si justifiable soit-elle à ses yeux, jusqu’à ce que ses finances soient de nouveau saines. Cela est d’autant plus nécessaire quand le ménage est couvert de dettes. On attend, ce qui ne veut pas dire qu’on renonce.

 

C’est exactement ce que devrait faire l’Etat de Vaud à propose de l’animalerie de l’UNIL. Agir autrement, c’est se moquer du contribuable vaudois comme on l’a déjà fait en adoptant cette dépense de  plusieurs millions le surlendemain de la votation par laquelle les Vaudois avaient clairement fait savoir qu’ils voulaient des économies et non de nouveaux impôts. Cette outrecuidance de nos élus mérite sanction.

 

La ménagère vaudoise votera «non» le 27 novembre, parce que cette dépense est prématurée et parce qu’il faut tirer les oreilles à ceux qui gaspillent nos sous.

 

Bonne nouvelle

 

         La grippe aviaire nous menace. On en parle tous les jours. La psychose est à nos portes. Bien évidemment, la presse est largement responsable de cet état de fait, bien qu’elle en accuse la mauvaise information dispensée par les autorités.

 

         Aussi lit-on avec soulagement dans 24 heures  du 19 octobre 2005, sous la plume de Philippe Dumartheray ce qui suit :

 

         «A 24 heures, nous avons décidé d’être les plus objectifs possible (…)»

 

         Est-ce à dire que, en temps normal, 24 heures ne se préoccupe pas d’être le plus objectif possible ?

 

 

Tuer l’essence de l’homme (suite du no 346)

 

[En démocratie, la manière de résister des derniers hommes libres consiste à affronter l’obstacle démocratique moderne en détruisant les mythes démocratiques de l’intérieur, saisissant toutes les occasions que donne ce faux système politique pour en révéler sans faille l’imposture foncière et originelle.

           

1. La religion : …]

 

2. La Constitution européenne : Il est de la nature d’une charte fondamentale d’être, dans l’ordre traditionnel du droit, l’expression d’un accord formel entre le souverain et ses sujets et, dans l’ordre révolutionnaire du droit, c’est-à-dire le nôtre actuellement, l’œuvre d’une assemblée constituante. Or, le projet de constitution européenne soumis à la ratification dans divers Etats d’Europe n’est ni l’un ni l’autre… C’est sans doute pour cette raison qu’on appelle ce projet «traité constitutionnel». Il s’agit donc d’un document hybride, à la fois étatique et trans-étatique ou supra-étatique. Les souverainistes nationaux en prennent naturellement ombrage, et les internationalistes sociaux-révolutionnaires rejettent cet instrument de pouvoir parce qu’il ne leur convient pas.

 

Ce constat de bon sens s’impose donc : à l’échelle d’un continent, la démocratie est un non-sens, qu’elle soit directe ou représentative. Pareille masse d’électeurs ou de citoyens est en fait livrée soit à une oligarchie (et c’en est une qui confectionna ce projet de constitution) soit à des mouvements idéologiques que leur ampleur, même à l’échelon national, peut rendre incontrôlables. A cet égard, Laurent Fabius a joué avec le feu en France. L’Europe ne peut être, dans ce cadre hybride, qu’une démocratie de masse à la mode socialiste et soviétique ou une oligarchie encadrant les masses, comme aux Etats-Unis d’Amérique du nord. Dans les deux cas, elle a perdu son âme et ses racines, ces deux modèles étant également inhumains.

 

Y aurait-il quelque chose de viscéralement faux dans l’idée même de la démocratie moderne ? La question est formellement interdite. Il n’empêche que c’est bien la démocratie qui détruit l’Europe, de la même manière que la liberté religieuse y détruit la religion. Nouveau cercle infernal…

 

3. Le mariage : Nous pouvons faire ce constat ironique qu’aujourd’hui, l’institution matrimoniale n’intéresse pratiquement plus, en politique, que le clergé dit «catholique» et les homosexuels… Quant aux bénéficiaires traditionnels de l’institution, ils la voient s’effondrer sous leurs yeux par la précarisation de plus en plus poussée de ses normes légales, qui partout favorisent le divorce par consentement mutuel, écartent la notion de faute, vidant en quelque sorte ce contrat de toute substance. Les polémiques d’arrière-garde contre le «mariage unisexe» ont, dans ce contexte, un étrange aspect surréaliste !

 

Nous aurions grand tort de considérer cette évolution comme le simple effet d’une libéralisation des mœurs. Derrière celle-ci, que personne ne nie, se dessine ou se profile un dogme secret, une sorte d’anti-révélation satanique. D’institution divine, le mariage en devient peu à peu la contrefaçon diabolique. Toutes les religions le connaissent. Toutes, hormis la vraie, l’ont déformé, mais toutes l’ont conservé. Aujourd’hui, un phénomène nouveau apparaît : avec l’extension du faux droit à la liberté religieuse, particulièrement en Occident, l’ordre civil ou séculier finira par imposer aux religions sa propre conception du «mariage», au nom de l’idée d’égalité. Je ne rêve pas du tout, je prends acte des droits fondamentaux de la personne humaine dans le projet de constitution européenne… Toutes les religions s’y plieront, y compris l’islam.

 

L’Europe est à la pointe de cette subversion mondiale.

 

L’homme doit donc se résoudre à perdre la totalité de ses repères, spirituels, religieux, moraux, juridiques et même rationnels. A ce prix se réalise sous nos yeux l’unification du genre humain. Dans le chaos, sans doute. Mais un chaos nécessaire à la domination totalitaire de l’Antéchrist, dont le triomphe s’annonce clairement.

 

Le monde se nourrit et se pourrit d’une dialectique l’obligeant à s’entre-déchirer ou à se suicider. Le développement de l’anarchie – ne serait-ce que dans le commerce mondial et la finance – est déjà un châtiment divin. Nicolas Berdiaef avait défini les limites historiques de ce chaos triomphant. Il parlait de «l’autocratie d’un faux dieu qui se dressera au-dessus du chaos rebelle»1… Qui ne perçoit le sens de l’histoire présente est ou frappé de complète stupidité ou possédé par des démons.

 

Car il n’y a qu’une histoire de l’humanité, c’est l’histoire sainte.

 

Michel de Preux

 

1 Dans sa lettre sur l’anarchie de sa philosophie de l’inégalité.

 

 

Vae victis

 

«En 390 av. JC, les Gaulois menés par leur chef Brennus partent à la conquête de Rome. Vainqueurs de l’armée romaine sur la rivière Allia, les Gaulois entrent peu de temps après dans Rome où ils se livrent à de nombreux pillages et massacres. Seuls quelques Romains parviennent à résister à l’invasion gauloise (…) Devant cette résistance, Brennus accepte de traiter avec le tribun militaire romain Quintus Sulpicius : il quittera Rome contre le versement d’une forte rançon, 1000 livres d’or (soit 327,45 kgs). Une grande balance est alors préparée sur une place de Rome; afin d’alourdir encore la rançon, les Gaulois y placent de faux poids. Devant les protestations des Romains, Brennus ajoute encore à leur déshonneur en jetant son épée sur la balance et en prononçant ces mots «vae victis» (malheur aux vaincus)»1

 

         Ce bizarre Gaulois latinisé et latinophone, dont l’épée et la balance symbolisent l’injustice et l’abus de pouvoir, a fait des émules à Lausanne à la fin de l’été : des voyous ont vandalisé la statue de la Justice de la Place de la Palud, faisant tomber son épée – qui est maintenant en sécurité dans les locaux de la commune sur sa balance. On ignore l’identité des coupables. Il s’agit probablement de fêtards avinés poussés par des motifs obscurs. Mais, que ce soit voulu ou non, il y a dans cet épisode un côté symbolique : la statue de la Justice, bandeau sur les yeux, balance dans une main et épée dans l’autre, symbolise l’impartialité, l’équité et le châtiment mérité. La même, toujours les yeux bandés, balance dans une main et épée dans la balance, symbolise la justice telle qu’on la conçoit trop souvent de nos jours : aveugle aux circonstances, faussée. Qu’il s’agisse de tribunaux d’exception ou de chasses aux sorcières, la prétendue légitimité de la prétendue justice, vengeresse et épuratrice, repose toujours sur le «vae victis» de Brennus. Comme quoi, on n’a pas beaucoup progressé depuis l’époque des oies du Capitole.

 

         Apparemment, Olivier Feller, député au Grand conseil radical et Pierre-Antoine Hildbrand, président des jeunes Radicaux vaudois, n’ont pas été sensibles au «message» laissé, sans doute involontairement, par les vandales. Non qu’ils soient insensibles aux symboles, comme on va le voir, mais leurs symboles ne sont pas les miens. Indignés du mauvais traitement subi par «notre» Justice, ils ont créé une association chargée de récolter les 10 000 francs nécessaires à la restauration de la statue, afin que ladite restauration ne soit pas financée par la ville de Lausanne. Olivier Feller s’en explique dans 24 heures du 28 octobre :

 

         «Une dépense de l’Etat, ou de la ville, a quelque chose d’insipide, d’inodore, d’anonyme. Face aux dégâts perpétrés contre ce symbole des valeurs démocratiques, il faut une action collective des citoyens vaudois. C’est à la société civile de marquer son attachement aux valeurs républicaines.»

 

         La statue vandalisée est une copie. L’original, qui se trouve au musée historique, date, paraît-il, de 1585. La Justice a donc été sculptée au début de l’occupation bernoise. Or, si LL. EE. de Berne ne furent pas des tyrans sanguinaires, elles ne furent pas non plus, à ce qu’on sait, des fanatiques des valeurs démocratiques et républicaines, surtout pas à une époque où celles-ci n’existaient pas !

 

         Alors, un peu de tenue !

 

 

M.P.

 

 

1 http://pages.infinit.net/pascars/graal/Brennus.htm

 

 

 

 

35e anniversaire

 

Percée jusques au fond du cœur d’une atteinte imprévue aussi bien que cruelle, la rédaction du Pamphlet  se voit dans l’obligation de reporter la réunion du 12 novembre à une date qui sera fixée ultérieurement. Avec tous nos regrets.

 

Réd.

 

 

 

Le chemin de l’enfer…

 

 - Hé ! Bobonne, c’est dimanche. Si on en profitait pour aller à la gare acheter une tondeuse à gazon ?

 

         - Bonne idée ! On pourrait peut-être aussi choisir un nouveau salon !

 

         Voilà le genre de dialogue qui fleurira de Genève à Romanshorn, si on en croit les opposants à la modification de la loi sur le travail permettant à tous les commerces situés dans les grandes gares d’ouvrir le dimanche. Référendum a été lancé et nous nous prononcerons le 27 novembre. Il est donc normal que la polémique fasse rage avec les exagérations que cela implique, mais il ne faut pas confondre exagération et désinformation.

 

         Invité de 24 heures des 22-23 octobre, Jean-Michel Dolivo, avocat-conseil du syndicat Unia monte aux barricades :

 

         «Aujourd’hui dans les gares, seuls les commerces offrant un assortiment de produits limités correspondant aux besoins particuliers des voyageurs peuvent être ouverts le dimanche. Et c’est bien ainsi ! Avec la modification de la loi sur le travail, soumise en votation le 27 novembre 2005, toutes sortes de commerces pourraient être ouverts dans les gares et l’on pourrait alors acheter, le dimanche, des meubles, des téléviseurs, des ordinateurs ou des réfrigérateurs. Les banques et les assurances y auront des bureaux ouverts. Avec cette modification de la loi, un pas de plus est fait vers une généralisation du travail du dimanche. Car il y a un effet domino évident : si les gares se transforment en centres commerciaux où l’on peut tout acheter le dimanche – d’une chaîne stéréo à une tondeuse à gazon – il n’y a aucune raison que d’autres grandes surfaces ne réclament pas également ce droit (…).»

 

         Il est bien entendu que cet effet domino doit aboutir dans un proche avenir à la généralisation du travail du dimanche pour le plus grand profit de patrons esclavagistes.

 

         Parlons un peu de ces seuls commerces offrant un assortiment de produits limités aux besoins particuliers des voyageurs. Je pense que les voyageurs en transit n’ont pas besoin d’un Aperto ouvert sept jours sur sept pour se procurer leur sandwich et leur boisson. Quant aux voyageurs qui rentrent chez eux, quelle qu’ait été la durée de leur absence, ils sont certes très contents de pouvoir faire quelques achats de première nécessité, mais il n’ont pas vraiment besoin d’un super-marché. Ce ne sont pas les besoins des voyageurs qui ont engendré l’ouverture des magasins Aperto. C’est l’ouverture des magasins Aperto qui a rendu certains voyageurs négligents. En fait, les commerces d’alimentation ouverts dans les gares sont destinés avant tout à une clientèle qui ne voyage pas, mais qui se trouve dans l’obligation – pour cause d’imprévoyance ou d’imprévu – de faire des achats en dehors des horaires normaux. C’est donc pure hypocrisie que d’en tolérer l’ouverture le dimanche au nom des besoins particuliers des voyageurs.

 

Je ne connais assez bien que trois grandes gares suisses, celles de Lausanne, Genève et Berne. Je n’y ai jamais vu de magasins de meubles ni d’expositions de tondeuses à gazon, mais peut-être suis-je sujette à la distraction. En tout état de cause, si ces commerces existent, ils peuvent prétendre offrir eux aussi un assortiment de produits limités correspondant aux besoins particuliers des voyageurs. Puisque, à en croire les économistes, les besoins économiques sont subjectifs, pourquoi un voyageur n’aurait-il pas le droit d’éprouver l’impérieuse nécessité de s’acheter une tondeuse à gazon entre deux trains ou à son retour de vacances ? Si, en revanche, je ne suis pas gaga et que ces commerces n’existent pas encore, je vois mal où ils pourraient s’installer. En effet, l’espace n’est pas extensible. Il me semble que la plupart des surfaces disponibles à l’intérieur des gares que je connais sont déjà occupées. D’ailleurs, lesdites gares ont une fâcheuse tendance à se trouver dans des endroits fort encombrés, d’où des possibilités d’agrandissement très limitées. On pourrait évidemment placer les meubles, les téléviseurs, les ordinateurs, les réfrigérateurs, les chaînes stéréo et les tondeuses à gazon sur les quais et les voies de chemin de fer, mais cela risquerait de perturber, voire de tuer le trafic ferroviaire. Notez que, dans ce dernier cas, le problème serait résolu : plus de trains donc plus de gares, donc plus besoin de légiférer sur l’ouverture des commerces dans les gares le dimanche !

 

Il y a un point sur lequel je partage l’avis de Me Dolivo : il ne serait pas sain, en particulier pour les familles, que le travail du dimanche se généralise. Mais la chose paraît fort improbable, compte tenu de l’inlassable activité du syndicat Unia et aussi de l’opposition que rencontrerait une telle généralisation dans tous les milieux, y compris dans les milieux patronaux. Me Dolivo et ses amis sont de très braves gens bourrés de bonnes intentions. Mais ils devraient se décider à oublier le schéma de la lutte des classes. Ils devraient penser aussi qu’il y a des gens qui ont tout simplement besoin de travailler le dimanche pour pouvoir boucler leurs fins de mois sans recourir aux services sociaux. S’imaginent-t-ils que les chauffeurs de taxi qui travaillent le dimanche le font uniquement dans l’espoir de les transporter ? Savent-il qu’il existe des étudiants impécunieux pour qui travailler le week-end, donc le dimanche, même pour un salaire modeste, est une nécessité absolue ?

 

Savent-ils, enfin, que le chemin de l’enfer est pavé de bonnes intentions ? S’ils le savent, ils s’en fichent : eux, de toute façon, ils n’ont pas besoin de travailler le dimanche.

 

 

Mariette Paschoud

 

 

L’Office fédéral de la statistique (OFS)

et les mathématiques

 

S’il est des bureaux fédéraux dont l’objectivité est plus que douteuse, ce sont bien le BPA et l’OFS…(à mettre dans le collimateur des économies fédérales à réaliser sans tarder !).

L’expression de cette mauvaise foi s’exprime parfois par des affiches terrifiantes, d’autres fois par des slogans paternalistes. Chaque conducteur aura compris, à la vue de ces publications fédérales de mauvais aloi, toute la distance qu’il  convient de prendre face à un lavage de cerveau qui voudrait prendre des allures d’information objective.

 

Dans un récent article publié dans le journal 24 heures du 12.10.05 sous le titre  La peur du gendarme sauve des vies , M. Heinz Gilomen, vice-directeur de l’OFS, prend ses concitoyens pour des imbéciles, à moins qu’il le soit lui-même et ne sache pas tirer des conclusions rationnelles des chiffres qu’il est censé maîtriser.

 

Démonstration : à la fin du premier trimestre de cette année, le nombre d’alcootests a triplé et le nombre des contrevenants a baissé de deux tiers, passant de 25 % des examinés à 8 % seulement. Pour M. Gilomen, « la peur du gendarme a fait son effet. » !

 

Une appréciation plus mathématique des résultats conduit à une conclusion bien différente. Au début de l’année, les tests d’alcoolémie ne se pratiquaient que sur les cas douteux (2% des conducteurs nous dit l’OFS) ; les chances de tomber sur un cas délictueux étaient importantes. A la fin du semestre, les tests se généralisent et touchent 6 % des conducteurs, toujours selon l’OFS.

 

En appliquant systématiquement le test d’alcoolémie à tout un chacun, on doit admettre que le contrôle est moins ciblé et que, dès lors, les chances de tomber sur un fautif diminuent sérieusement. Rien de plus logique qu’en élargissant la panoplie des conducteurs contrôlés, en y incluant notamment des personnes qui n’ont manifesté aucun signe visible d’ivresse, on diminue immanquablement le pourcentage des fautifs. Si les contrôles passaient du 6 % actuel à 12 % on constaterait que, le nombre des infractions restant stables, le pourcentage des contrevenants diminuerait encore de moitié. Tout ceci n’est qu’un jeu de chiffres et n’a rien à voir avec la peur du gendarme !

 

Prenons l’exemple d’une classe qui inclurait dans ses rangs trois tricheurs notoires. Lors d’une épreuve écrite, le professeur effectue un contrôle serré auprès des six élèves les plus douteux. Il découvre ses trois tricheurs qui représentent le 50 % de ses investigations. A l’occasion d’une autre épreuve, il décide d’élargir ses contrôles à l’ensemble de la classe (24 élèves) et retrouve ses trois tricheurs qualifiés. Le pourcentage des tricheurs est alors passé de 50 % à 12.5 %. Belle progression…statistique (au sens de l’OFS), mais il y a toujours trois tricheurs. CQFD !

 

De deux choses l’une : ou l’OFS utilise des méthodes malhonnêtes pour étayer la politique routière fédérale ou l’OFS ne comprend rien aux chiffres. Je ne sais pas ce qu’il faut souhaiter.

 

 

Gérald Berruex