Lausanne 35e année      «ne pas subir»     Avril  2005 No 344

 

 

 

Sommaire :

 

Editorial

L’éditorialiste s’interroge sur la prétendue «diversité» de la presse…

 

Bricoles

Où il est question de culture fédérale, d’assassins, de réparations financières, de dépassement de budget, de la HEP, des bonnes résolutions du journal «Le Temps», des accords de Schengen/Dublin, de Miss Suisse romande et de racisme

 

En direct de Sirius

Max ne confond pas une lutte contre la mort et une lutte pour la vie ; il a connu un grand tigre ; il se demande si l’euro a cours légal en France et il a trouvé un moyen (discutable) pour faire taire les téléphones portables.

 

Un Musée Churchill à Londres…

…où le public ne pourra pas trouver la correspondance échangée avec Mussolini !

 

A propos de Rainier III et de Jean-Paul II

Malgré l’insignifiance de la famille princière, Monaco est un modèle dans son genre.

 

Programme d’armement

Pourquoi ne soumettrait-on pas l’armée dite «XXI» à une procédure d’évaluation objective ?

 

Nuisances

Mariette constate que ses contemporains supportent de plus en plus mal chez les autres des habitudes ou des comportements qui génèrent des «nuisances».

 

 

 

 

Editorial

 

         Il paraît que la diversité des médias participe à la garantie du processus démocratique. C’est du moins ce que prétendent une majorité de parlementaires fédéraux qui s’opposent à la suppression de l’aide financière à la presse dans le cadre du programme d’allégement des dépenses de la Confédération. Cette aide, sous forme de participation aux frais de distribution, a rapporté à La Poste 80 millions de francs en 2004 (100 millions en 2003).

 

         Si cette aide était répartie entre tous les journaux acheminés par le géant jaune, on pourrait à la rigueur considérer qu’elle favorise la diversité si nécessaire à la garantie du processus démocratique, c’est-à-dire à la possibilité pour chacun de prendre connaissance de toutes les opinions et tendances à la veille d’une votation. Or, ce n’est pas le cas, nos abonnés le savent. Rassurez-vous, nous n’allons pas nous répandre en jérémiades : nos fidèles lecteurs se chargent de nous apporter l’aide que nous refuse la Confédération et nous nous en trouvons bien.

 

         Ce qui nous surprend, c’est qu’il se trouve encore une majorité de députés assez naïfs pour croire que les subventions favorisent la diversité de la presse. C’est forcément le contraire qui se produit : les journaux bénéficiant de la manne fédérale ne vont pas mordre la main qui les nourrit, au moins en partie. Certes, les organes de presse subventionnés se différencient par le public qu’ils visent. Certes, ils se donnent, en outre, l’apparence de respecter la pluralité des opinions – indispensable à la garantie du processus démocratique – en publiant de manière plus ou moins équilibrée des lettres de lecteurs ou des avis d’invités. Mais cela ne suffit pas. Exemple : 24 heures ouvre régulièrement ses colonnes au directeur du Centre patronal, Jean-François Cavin, et son courrier des lecteurs à d’autres collaborateurs de l’institution. Mais les journalistes de ce noble quotidien ne manquent pas une occasion de minimiser la portée des prises de positions souvent antigouvernementales du CP, voire de les tourner en ridicule. Même chose pour Le Temps : lorsque le Centre patronal a publié, en automne 2004, sous la signature de notre fille, son Etudes et enquêtes intitulé Quand le juge fixe le salaire, le brillant journaliste Laurent Busslinger s’est empressé de prétendre que Sophie animait le Pamphlet avec ses parents, alors qu’elle n’y a pas signé un seul article depuis son engagement au CP en 2001. Le minuscule rectificatif publié par la suite n’enlève rien à une évidente volonté de nuire, non seulement à notre fille, mais aussi, à travers elle, au Centre patronal lui-même, désormais suspect d’extrémisme de droite. Or, s’il y a une chose sur laquelle tous les médias, prétendument divers, sont d’accord, c’est bien que tous les non-conformistes qui ne sont pas de gauche appartiennent forcément à l’extrême droite par définition raciste et antisémite. Qu’on puisse ne pas penser comme tout le monde et ne pas être pour autant un assassin en puissance leur échappe complètement, à tous. Qu’ont-ils vu de positif dans le pontificat de Jean-Paul II ? Son combat en faveur des droits de l’homme et son oecuménisme. Qu’y ont-ils vu de négatif ? Ses positions «rétrogrades» en matière d’avortement, d’euthanasie et de sida. Ils s’abstiennent soigneusement de citer les petits journaux d’opinion qui vont à contre-courant de leur ligne idéologique, sauf quand ils y discernent un «dérapage». Alors là, ils y vont.

 

         La diversité de la presse subventionnée est un mythe. Il n’y a donc aucune raison de dépenser des millions pour sauvegarder une garantie du processus démocratique tout aussi imaginaire.

 

Le Pamphlet

 

 

 

Bricoles

 

 

Une «absurde» histoire de papiers

 

Pour le journaliste de 24 heures1, c’est la faute du service de la population si la jeune Enriketa Ferizi, élève du collège St-Roch à Lausanne, n’a pas pu partir avec ses camarades de classe en course d’étude à Florence. Originaire du Kosovo, sa famille vit en Suisse au bénéfice du statut d’admis provisoire, et n’a pas fait actualiser à temps ses passeports par les autorités de Serbie-Monténégro. C’est en dernière minute qu’on s’est avisé d’entreprendre une démarche qui dure, normalement, 3 à 4 mois ! Pas de passeports valables, pas de voyage à l’étranger.

 

Culture fédérale

 

Le prochain départ à la retraite (anticipée) de M. David Streiff, Zuricois fin lettré et directeur de l’Office fédéral de la culture, nous permet d’apprendre2 que, sous son règne, le personnel de cet office a passé de 300 à 500 employés et que son budget a augmenté de 180 à 225 millions.

 

On apprend aussi que, depuis que notre constitution s’est dotée d’un article concernant la culture, M. Streiff et ses sbires ont travaillé d’arrache-pied pour nous concocter une loi qui sera bientôt soumise au Parlement.

 

Et si on se passait totalement de la culture fédérale ? Et si la Confédération économisait 225 millions ?

 

De vieux assassins

 

Des analyses médicales sérieuses ont démontré récemment qu’Agnès Sorel, la célèbre maîtresse officielle du roi Charles VII, décédée d’un «flux au ventre» le 11 février 1450, est morte empoisonnée au mercure.

 

La Radio suisse romande, qui rapporte cette découverte, précise que, si on a aujourd’hui la preuve de l’assassinat, on ignore l’identité des assassins, qui courent toujours (sic).

 

Compte tenu de leur âge, ces assassins ne doivent plus courir très vite.

 

Actions personnelles

 

M. Karl Wütrich, liquidateur de Swissair, estime que les anciens membres de la direction Philippe Brugisser et Georges Schorderet portent une responsabilité personnelle dans la déconfiture de la société et c’est pourquoi il leur réclame 280 millions de francs.

 

On se demande pourquoi le contribuable lausannois devrait payer de ses deniers les

800’000 francs alloués par le tribunal à une ex-collaboratrice de la commune en raison du mobbing que lui ont fait subir ses chefs pendant plusieurs années. Qu’est-il prévu pour engager une action en responsabilité contre ces derniers, notamment contre le municipal socialiste principal responsable du gâchis ?

 

 

Le coût du M2

 

Le métro M2 coûtera au minimum 700 millions, soit 116 millions ou 20 % de plus que ce qui avait été annoncé.  On le savait, mais on s’est bien gardé de le dire avant la votation.

 

Ce sont ces petits mensonges par omission qui sapent peu à peu la confiance du citoyen en ses magistrats. Lorsqu’ils nous raconteront que l’équilibre budgétaire ne peut être rétabli qu’au prix de 4 nouveaux impôts, il faudra leur rire au nez.

 

 

HEP

 

Le conseil des étudiants de la Haute Ecole Pédagogique vaudoise dénonce «le niveau déplorable de la majorité des cours, une pensée psycho­pédagogique unique et omniprésente, l’infantilisation des étudiants, une baisse importante de la contribution financière aux stagiaires, une politique d’information interne archaïque aggravée par un système informatique souvent défaillant».

 

Malgré un tel constat, M. Christian Pilloud reste serein : «Le conseil des étudiants ressort aujourd’hui les reproches qu’il avait déjà formulés l’an dernier».

 

Et c’est peut-être parce que ces reproches n’ont pas été pris au sérieux, et que rien n’a changé, que la HEP n’a pas réussi sa certification et que tout est à changer.

 

Le Temps

 

Lors de l’assemblée des délégués de la Fédération patronale vaudoise, M. Jean-Jacques Roth, directeur-rédacteur en chef du journal Le Temps, a présenté un exposé dans lequel il a affirmé son ambition de doter ce quotidien, dès le mercredi suivant, d’une «information sélectionnée en fonction de priorités claires, un traitement intègre des débats, des clés de lecture qui s’inspirent des expertises, des analyses les plus fouillées, une plate-forme pour l’expression des opinions et des idées qui foisonnent, en Suisse et dans le monde…»   bref «un journalisme rigoureux, vivant, attentif à la complexité des réalités et à la pluralité des opinions».

 

A ce moment, ma voisine se penche à mon oreille et me chuchote : «C’est sans doute pour ça qu’ils ont dû refiler Laurent Busslinger à Bilan».

 

Accords de Schengen/Dublin

 

Pour la majorité des partis politiques, des organisations économiques et des syndicats, l’accord de Schengen offre principalement des avantages économiques, parce qu’il ne faudra pas deux visas aux touristes asiatiques pour visiter la Suisse et le reste de l’Europe.

 

Cet argument est misérable. Si les responsables du tourisme helvétique s’imaginent qu’ils pourront sauver cette importante branche économique par la seule vertu d’un visa unique, tout en fermant les yeux sur la qualité très médiocre de l’accueil, sur le confort insuffisant et sur les prix prohibitifs pratiqués par nos hôteliers, ils se bercent de funestes illusions.

 

Il est en outre assez piquant d’entendre un ministre prétendre que la suppression des contrôles aux frontières est de nature à «améliorer la sécurité». La sécurité de qui ? Sans doute celle des délinquants voyageurs, qui ne seront plus inquiétés.

 

Quant aux développements futurs de l’accord, ils se feront sans nous, mais nous serons néanmoins tenus de les appliquer, sauf à dénoncer l’accord. Belle garantie de respect de notre souveraineté !

 

Miss Suisse Romande

 

La mère de Mlle Antonella Lama, la nouvelle et très controversée «Miss Suisse romande» a déclaré à la presse : «Ma fille est une femme à 1000 %». L’amour maternel ne justifie pas n’importe quelle imbécillité et on comprend mieux, à la lecture de ces sottises, que ces aréopages de bedoumes ont quelques excuses tirées des lois de la génétique.

 

Miss Suisse Romande (bis)

 

Légende de la photo montrant Miss Suisse Romande et les deux viennent-ensuite après l’élection : «Couronnée samedi soir dans les studios de la TSR, la nouvelle Miss Suisse Romande a pour première dauphine la Vaudoise Sofije Hoxha (à droite) et pour seconde dauphine la Genevoise Zara Zidane (à gauche). Des noms bien de chez nous.

 

Avarice

 

         La Suisse a été tancée par le chef du Programme des Nations Unies pour le développement, nous apprend un communiqué ats du 12 avril, car, d’une part, elle réduit sa contribution contrairement à d’autres pays et, d’autre part, elle ne verse pas 0,4% de son produit national brut à l’aide au développement comme elle devrait le faire. Pensez donc : en 2004, elle n’a versé que 0.37% de son PNB (3% de moins qu’en 2003), soit 1,719 milliard de francs seulement.

 

         Compte tenu de l’état des finances de la Confédération, on ne peut qu’approuver la diminution d’une aide dont on ne voit toujours pas à qui elle profite et dont tout le monde sait qu’une partie au moins est détournée de son objectif.

 

Racisme

 

         Nous tirons d’un exercice de grammaire imposé à une classe vaudoise la phrase suivante : «Hugo mange une tête de nègre et je bois un café au lait.»

 

         Il y des années que la friandise appelée «tête-de-nègre» a été rebaptisée «tête-de-choco», dans le cadre de la lutte contre le racisme. Tout le monde sait que l’appellation «tête-de-nègre» est strictement interdite. Tout le monde connaît aussi la couleur du café au lait. Tout le monde sait enfin qu’une mission essentielle de l’école est de sensibiliser les enfants aux méfaits du racisme. Que penser, dès lors, d’un enseignant qui oblige ses élèves à analyser une phrase dont le sens est évidemment : «Hugo casse du nègre et je bouffe du bougnoule» ?

 

 

1 24 heures du 14 mars, page 27.

2 24heures du 15 mars, page 5.

 

 

 

En direct de Sirius

 

 

Le Pontife et les vautours

 

L’agonie du Pape Jean-Paul II ne fut pas, comme on a pu le dire, une lutte contre la mort, mais bien un combat pour la vie s’inscrivant, de par la souffrance évidente du Saint Père, dans sa logique de préservation absolue d’un don sacré de Dieu. La logique d’une passion. Ce combat formidable avait de la noblesse. Cette noblesse transcendait les pénibles scènes de manipulation d’un moribond, sortes de pantomimes macabres qu’on a pu entrevoir à l’occasion des ultimes apparitions de l’évêque de Rome. Mais la couverture médiatique qui a sous-tendu cette agonie, assortie de commentaires indigents, à la mesure de la vacuité spirituelle des porte-voix d’un système livré à un matérialisme effréné, était tout simplement indigne et avait les accents d’un vol de charognards.

Le testament du tigre

 

La petite ville azuréenne de Saint-Jean-Cap-Ferrat compte un zoo très réussi qui vaut le détour. Son propriétaire ne ménage pas ses efforts pour le confort des animaux. Ainsi avait-il sauvé un superbe tigre de la cage exiguë d’un cirque en faillite. Le félin avait rejoint une femelle dans un espace plus approprié, mais libéré trop tard d’une cellule de six mètres sur deux, abîmé par sa réclusion, il était incapable de profiter du généreux domaine à sa disposition. Il passait le plus clair de son temps à décrire le même huit, toujours au même endroit, toujours dans le même sens. Un panneau informait le visiteur que le tigre souffrait de stéréodromie.

Le grand tigre est mort, de vieillesse. Un jeune mâle a rejoint la femelle. La trace du prédécesseur perdure cependant, comme un ultime reproche à ses anciens geôliers. Etonnant message : avec obstination, à longueur du temps qui lui restait à vivre, le grand mâle a gravé sur le sol le signe de l’infini…

L’euro a-t-il vraiment cours légal en France ?

 

L’étranger qui, en France, présente en paiement un billet de deux cents euros est fondé à se demander si cette monnaie a bien cours légal dans le pays. Le pompiste, le buraliste, la caissière de la « Maison de la Presse » le regardent comme un extra-terrestre et lui annoncent, navrés, qu’ils n’ont point de monnaie. Notre touriste court alors à la banque de quartier qui l’avait dépanné naguère, pour découvrir… qu’elle a cédé le pas à un avaleur de cartes. A la gare principale, l’agent SNCF l’informe benoîtement qu’il n’est pas autorisé à accepter son billet en règlement d’un trajet à quarante-huit euros… et, sur le ton de la confidence : «Vous comprenez», dit-il, «il y a tellement de faux !» L’étranger hausse les épaules et tremble rétrospectivement à l’idée de ce qu’aurait déclenché l’exhibition d’une coupure de cinq cents... Tant pis pour l’excursion, cap sur la capitale ! Sur l’autoroute, la caisse automatique n’accepte pas les «pièces rouges» ; de sa guérite, le préposé accepte l’appoint de mauvaise grâce et jette à ce métèque un regard peu amène… Arrivé à Paris, M. Dailleurs gare sa voiture et cherche à honorer la finance de parcage… L’horodateur n’accepte que les cartes à prépaiement. Notre ami prend alors le risque bien réel – il importe de remplir les caisses vides de l’Etat par tous les moyens – d’une contredanse … Consolateur, un passant goguenard l’informe qu’un récent arrêt à déclaré illégal ce système de paiement imposé, qu’il paraîtrait que le refus d’accepter un paiement en espèces serait une infraction au code pénal. Avec sollicitude, il lui explique que le Français moyen paie sa baguette et son journal avec sa carte «Monéo», son épicier, son cinéma et son taxi avec sa «Carte Bleue». M. Dailleurs demande quand le Français moyen vérifie ses dépenses.

       Jamais ! Tout est automatique… Y’a pas d’erreur possible !

M. Dailleurs retourne à sa voiture, empoche distraitement le bordereau d’amende glissé sur son pare-brise et roule vers l’Angleterre, songeant que les Français moyens sont décidément des gens bien aimables et bien confiants… Il se rappelle les noirs d’Afrique du Sud qui se réjouissaient d’un prochain changement de régime pour avoir, eux aussi, ces cartes magiques des blancs qui fabriquent de l’argent «quand on les glisse dans la machine»… Il sent, dans sa poche intérieure, la présence rassurante des grosses livres sterling qu’il aura tout à l’heure le plaisir de dépenser à Saville Row

Recette sournoise pour atténuer les nuisances des « emmernuyeurs » sonorisés...

 

Seriez-vous du nombre de ces malheureux qui ont eu à subir, sous leur propre toit, par le fait de quelque fâcheux, les tonitruances intempestives de ce petit parasite que nous nommons «natel» et les Français «portable» ? Supplice débutant invariablement par une éructation «miélodique» sur l’air synthétisé du dernier tube branché, à moins que ce ne soit la «Petite marche turque de nuit inachevée pour pied-bot et orchestre» (opus Kössège 231) d’Igor-Amaedeus von Bussy, prélude à des échanges verbaux d’intérêt essentiel du type : «…Pendant que tu y es, prends aussi une boîte de concentré de tomates !» ou encore le redoutable, «J’voulais justement t’téléphoner pour te dire queheuh…», quand ça n’est pas l’essentiel «Toi, ça va ? Moi ça va…» (souvent bissé – circonstance aggravante – quelques banalités plus loin…) ou le non moins célèbre «Quel temps t’as ?» (il s’agit, bien entendu, de celui qu’il fait en un lieu dont on se fiche comme du 11.9.2001, pas de celui que l’on fait perdre au malheureux correspondant), sans omettre l’inquisitorial et quasi-phonétique «Où t’es ?».

Dans l’affirmative, le pauvre contemplatif à communication multimédiate restreinte et défaillante que vous êtes est venu grossir le nombre des victimes de la peste télécommunicative, maladie contagieuse capable de saturer très vite votre environnement privé. Si la perspective d’une rechute vous préoccupe, rassurez-vous ; le salut tient en deux mots : impulsion électromagnétique. Toutes les armées sophistiquées redoutent les effets pervers et neutralisants de ce phénomène annexe aux explosions nucléaires sur leurs systèmes de télécommunications. Affligé d’une belle-sœur provinciale «électrobranchée», mon ami Jean Ygnoble a imaginé et expérimenté avec succès une méthode dérivée tout à fait intéressante : profitant d’un moment d’inattention, il se saisit du petit piranha des ondes et lui infligea un passage rapide dans son four à micro-ondes. Dix secondes d’exposition à 900 Watts suffirent. Aucune modification apparente sur le combiné, hormis un écran vide et des neurones électroniques désespérément muets. A l’heure où je rédige ces lignes, les spécialistes des «télécoms» planchent toujours, perplexes, sur les puces du petit cadavre. L’envahisseuse est retournée, dare-dare, à ses pénates provinciaux, et la villa de Jean a retrouvé son calme. C’est certes sournois, illégal et un peu nucléaire, mais tellement efficace !

 

Max l’Impertinent

 

 

Un Musée Churchill à Londres…

 

Ce musée servira à fixer solidement l’homme au cigare dans sa propre légende; dans l’authenticité historique, certes pas…

 

         Pagnol, père de Marius, nous a déjà fait constater que tous les manuels scolaires n’ont jamais été que de la propagande au service des gouvernements.

 

         Luciano Cànfora, de l’Université de Bari, croit de plus en plus que le passé, proche ou lointain, nous échappe dans sa substance; la recherche historique devient très souvent une gageure.

 

         A côté des contre-vérités et des mensonges par omission, des documents précieux, uniques mais indésirables, ont été volontairement détruits par les vainqueurs d’une guerre, par les maîtres du jour, par de soi-disant «bien-pensants» aussi.

 

         En 1872, par exemple, à la mort de Giuseppe Mazzini, des «amis zélés» brûlèrent les lettres du grand patriote à sa bien-aimée, comme si des messages d’amour à une femme auraient pu ternir la gloire d’un illustre républicain !!

 

         En avril 1945, Mussolini, à la recherche du lieu approprié pour faire connaître au monde le contenu, jusqu’alors secret, d’une serviette qu’il avait emportée avec lui, fut assassiné pour empêcher toute révélation. On vola tous les documents. Le fameux «cartaggio», la correspondance avec Churchill, entre autres, manquera à jamais à la connaissance de la vraie histoire de la seconde guerre mondiale. Elle manquera au nouveau musée londonien, et on semble s’en accommoder fort bien !

 

         A la fin de la guerre, Churchill se rendit rapidement en Italie pour récupérer les documents compromettants, les acheter très cher à des partisans rançonneurs, pour les détruire enfin.

 

         Officiellement, Churchill était venu au bord des idylliques rivages du Lac Majeur et du Lac de Garde pour exercer ses talents artistiques. Il peignait en réalité comme une pantoufle, presque aussi mal que le démo-chrétien Amintore Fanfani, qui se prenait sérieusement pour un artiste…

 

         D’autres documents précieux pour les historiens ont également disparu : les importantes lettres d’Albert Lebrun à Mussolini. En juin 1940, au moment où sombrait tout espoir français d’arrêter l’armée allemande, le président de la IIIème  République aurait demandé au Duce d’entrer immédiatement en guerre aux côtés de l’Allemagne.

 

         En ces moments tragiques, Albert Lebrun relisait certainement Machiavel… Mieux vaut deux ennemis qu’un seul…

 

Giuseppe Patanè

 

 

A propos de Rainier III et de Jean-Paul II

 

L’Etat d’Europe le plus futile et la famille princière la plus légère qui soit viennent de perdre leur père ou leur «patron». Cet Etat fait rêver; cela n’a aucune importance à mes yeux. Les Grimaldi ont de l’éclat, beaucoup trop; cela non plus ne compte absolument pas pour moi.

 

Je ne trouve cependant ni futile ni trop éclatante cette principauté, que l’on aurait grand tort de taxer hâtivement… d’opérette.

 

Car enfin, voilà un Etat prospère et qui attire la prospérité, une société et un gouvernement dynamiques et qui suscitent l’intérêt des investisseurs. Les problèmes sociaux y sont inexistants, tout comme la contestation idéologique et politique. La sécurité des personnes et des biens y est une réalité sans discours, alors qu’ailleurs elle nourrit un discours d’autant plus audible que la réalité s’en distancie davantage. La justice y est respectée et, sans aucun doute, comme au Liechtenstein, respectable, ce qui est loin d’être le cas en Suisse et même en Valais… Le catholicisme y est religion de l’Etat, proscrite partout ailleurs… mais la tolérance religieuse n’y est pas absente pour autant, ce qui n’est pas le cas ailleurs, encore une fois.

 

Mais quelle est donc cette merveille dans un Etat qui ignore la séparation des pouvoirs, ne dispose d’aucun parlement, où le gouvernement s’occupe avant tout des affaires privées du Prince, sans trop se mêler de celles de ses sujets, où l’exiguïté territoriale est un atout, alors qu’ailleurs le cadre national lui-même paraît étriqué au point d’éprouver la démangeaison de l’échelle continentale, voire planétaire ! A Monaco, la souveraineté est une réalité parce qu’elle est un droit personnel; ailleurs, elle disparaît dans les brumes de la technocratie internationale parce qu’elle est une irréalité collective.

 

Le mal serait-il dans les institutions démocratiques et leurs acquis révolutionnaires, tous facteurs d’instabilité économique et professionnelle, de corruption affairiste et politique, d’insécurité individuelle et collective, de haine et de méfiance entre gouvernants et gouvernés quand, là-bas, à Monaco, triomphent le respect, la confiance et même l’amour du Prince et de sa famille ?…

 

Voilà ce qu’il en coûte de séparer la famille de l’Etat, la religion du Prince, la personne de l’autorité, la morale de l’art politique et la raison des enjeux économiques. Pour qu’un peuple soit bien dans sa peau, il ne lui sert à rien d’élever ses chefs de ses rangs, il lui suffit de les reconnaître dans ceux que la nature lui donne, autrement dit : Dieu.

 

La monarchie est naturelle parce qu’elle n’a pas été inventée par les hommes; et les républiques ne sont viables qu’avec des aristocraties gouvernantes tout aussi naturellement constituées.

 

***

 

En visite au Maroc en 1985, Jean-Paul II déclara ceci aux musulmans de ce pays : «Les discriminations basées sur la race, la couleur, le credo, le sexe ou l’origine ethnique sont radicalement incompatibles avec la dignité humaine.»

 

Or il fut le premier à pratiquer dans sa propre religion et dans son église ce genre de discrimination, par le refus d’un total syncrétisme religieux d’une part, et d’autre part par le refus d’admettre l’ordination sacerdotale des femmes.

De deux choses l’une : ou Jean-Paul II n’était pas sincère, mais dans cette hypothèse, quand l’était-il ?

 

Ou il le fut et, dans cette deuxième hypothèse, que nous croyons la bonne, son double langage était bien intentionnel, car destiné à préserver son crédit et son audience, c’est-à-dire tout ce qui, en fait, l’intéressait, auprès de n’importe quel interlocuteur, de n’importe quel auditoire, de n’importe quelle croyance.

 

Conclusion : pour analyser correctement la pensée de cet homme, il ne faut pas se référer à des écrits destinées à un auditoire homogène, mais les comparer en fonction de la diversité de ses auditeurs.

 

Le nihilisme de sa croyance religieuse y apparaîtra en pleine lumière.

 

Michel de Preux

 

 

Programme d’armement

 

Il est probable que le 51 % des citoyens qui ont accepté, le 10 juin 2001, l’armement des soldats en mission de paix à l’étranger, ainsi que la coopération en matière d’instruction, étaient pétris de bons sentiments et ne mesuraient pas, ou peu, ce que ces engagements allaient coûter.

 

La présence, dans le programme d’armement, d’une dépense relative à deux avions de transport gros porteurs de type Casa C-295M destinés à des engagements humanitaires à l’étranger a fait tomber certaines écailles des yeux parlementaires et a provoqué l’annulation de l’ensemble des demandes du Conseil fédéral, y compris d’autres équipements, dont le char de déminage.

 

Ce refus a été acquis au Conseil national par 97 voix contre 82 et 6 abstentions. Les «Neinsager» furent principalement des députés UDC et socialistes, alliance d’occasion qui provoque à chaque fois une éruption de boutons chez les commentateurs les plus bêtes, qui ne manquent pas de qualifier cette concordance sur un sujet particulier d’«alliance contre nature»1

 

Dans son éditorial de 24 heures2, M. Denis Barrelet s’étranglait d’indignation devant ce crime de lèse-Conseil fédéral.

 

Les socialistes ont-ils eu tort de refuser, par réflexe idéologique, à nos colonels les joujoux destinés à assurer à l’étranger la pérennité d’une institution aux missions de plus en plus floues ?

 

Les démocrates du centre sont-ils les mauvais perdants qui, en refusant les avions, se consolent d’avoir perdu le 10 juin 2001 la bataille populaire de l’ouverture au monde ?

 

M. Barrelet est un démocrate très formaliste et très soucieux de ne jamais remettre en question une option acceptée par le peuple, même s’il s’agit du 51 % des votants, lesquels n’étaient que le 41,1 % des citoyens, si le peuple a voté dans le sens de ses recommandations.

 

Si, en revanche, le peuple a «mal» voté, c’est le lendemain du scrutin qu’on l’entend vociférer et prédire qu’il faudra bien reprendre la question… le plus tôt possible.

 

Lorsque l’armée suisse avait pour mission principale la défense du territoire, et comme mission secondaire le maintien de l’ordre et de la tranquillité à l’intérieur, on ne m’aurait jamais vu me réjouir du refus, par le Parlement, des demandes de crédits de l’armée.

 

Mais depuis que cette dernière est devenue un instrument de marketing international aux missions mal définies, agissant principalement à l’étranger dans des opérations de soutien, de maintien ou d’imposition de la paix du style guerre du Kosovo ou demain guerre en Irak ou en Iran, mon attachement à l’armée est devenu conditionnel.

 

Dans une entreprise bien gérée, toute décision stratégique, toute nouveauté opérationnelle est soumise, quelques mois ou quelques années après son introduction, à une procédure d’évaluation. La décision était-elle opportune ? Qu’est-ce que sa mise en œuvre nous a coûté ? Que nous a-t-elle rapporté, en argent, en image, en notoriété ? Est-il judicieux de persévérer, voire d’augmenter encore notre effort dans le même axe ? Faut-il au contraire corriger, se désengager, renoncer ?

 

Pourquoi ne pourrait-on poser une nouvelle fois au peuple la question de notre participation à des opérations de «maintien de la paix» à l’étranger, avec l’expérience que nous en pouvons tirer jusqu’à aujourd’hui ? Avec des témoignages sur la qualité du commandement et de la coordination, sur l’attitude des organisateurs à l’égard de nos soldats, sur la manière dont sont ressenties ces troupes «d’occupation» par les populations locales, finalement sur l’utilité réelle de ces missions. Qui en sont les bénéficiaires ? Le prix en est-il raisonnable ?

 

Le Conseil fédéral a-t-il procédé à une telle évaluation ? A qui a-t-elle été confiée ? Quels en ont été les résultats ? Où peut-on les consulter ?

 

Il me semble qu’avant d’approuver l’achat de chars de déminage (pour déminer quoi ? où ? au profit de qui ? sur mandat de qui ? payé par qui ?) et d’avions gros porteurs (pour porter quoi et où ?), le Parlement et le peuple seraient en droit de prendre connaissance du bilan (établi par des experts neutres) de 5 ans de participation de la Suisse, à l’étranger, à des missions militaires de «maintien de la paix».

 

 

Claude Paschoud

 

1 On observera que le qualificatif de «contre nature» n’est aujourd’hui plus utilisé pour qualifier des relations homosexuelles, que l’art. 194 de l’ancien code pénal qualifiait encore de «débauche».

2 24 heures du 18 mars, pages 1 et 3

 

 

 

Nuisances

 

L’école secondaire vaudoise fait parfaitement son travail. Mes petits-fils savent déjà que tous les dictateurs sont, certes, des vilains pas beaux, mais qu’il y en a un qui fut beaucoup plus vilain et beaucoup plus pas beau que les autres. Ils sont aussi, désormais, de parfaits connaisseurs des méfaits du tabac. Ils savent faire la différence entre un vrai et un faux fumeur en se fondant sur la consommation de cigarettes quotidienne de l’individu étudié et sa capacité de se priver de fumer pour une période plus ou moins longue. C’est ainsi que j’ai découvert, non sans stupéfaction, que je ne suis pas une vraie fumeuse, puisque je ne fume qu’une vingtaine de cigarettes par jour et que je suis capable, en cas de nécessité, de me priver de fumer pendant plusieurs heures. Mes petits-fils savent aussi que les fumeurs de cigares et de pipe ne sont pas de vrais fumeurs, puisqu’ils n’inhalent pas la fumée.

 

Ou bien Vincent et Laurent sont particulièrement distraits et oublieux, ou bien l’information qu’on leur a donnée est incomplète. Toujours est-il qu’ils n’ont pas fait mention de ces fameux fumeurs passifs qui ont pris naissance voici quelques années, quand on s’est aperçu – pure hypothèse de ma part, évidemment – que la diminution sensible du nombre des fumeurs, due à une campagne de sensibilisation et de prévention permanente, n’entraînait pas une diminution concomitante du nombre de cancers du poumon.

 

Nous sommes tous des fumeurs passifs : les non-fumeurs, les fumeurs actifs qui respirent la fumée des autres fumeurs actifs entre deux cigarettes, les fumeurs de cigares et de pipe qui gardent le nez sur la fumée de leur cigare ou de leur pipe. Une sage politique de la santé exigerait donc qu’on interdise purement et simplement la fumée, non seulement dans les établissements publics, mais aussi en privé. Il faudrait mettre sur pied une escouade de surveillance fort onéreuse, mais la santé n’a pas de prix et la liberté personnelle doit s’effacer devant le bien-être collectif. Et tant pis si la mesure fait de la peine à Monsieur Fidel Castro, grand producteur de cigares devant l’Eternel.

 

Mais il ne faudrait pas s’arrêter en si bon chemin. Il existe à côté de la fumée, quantité d’autres nuisances qui hâtent la mort des citoyens de ce pays, à commencer par la pollution de l’air due aux gaz des véhicules à moteur. La Municipalité de Lausanne en est bien consciente, qui s’ingénie à entraver la fluidité du trafic en élargissant les trottoirs pour rétrécir les rues, en installant partout des chicanes, dans le but louable de dissuader les automobilistes d’utiliser leur véhicule en ville. Bien entendu, ces sages mesures aboutissent à une augmentation de la pollution, car les automobilistes continuent à rouler voiture comme devant, en dépit du ralentissement de la circulation et, donc, de l’augmentation de la durée d’émanation des gaz. Foin des demi-mesures ! Si l’on veut restaurer la pureté de l’air, il convient d’interdire purement et simplement les véhicules à moteur. Et alors, quel paradis ! Retour des voitures tirées par des chevaux, bonne odeur de crottin, plus de précipitation, plus de stress, plus de coups de klaxons vengeurs ni de motocyclistes pétaradants, plus de bruit, enfin !

 

Car le bruit est lui aussi une nuisance mortelle, puisque source de tension nerveuse, laquelle, comme on sait, constitue un facteur important des maladies cardio-vasculaires. Il convient donc d’interdire les téléphones mobiles, les avions de combat, les aéroports et donc les avions civils, les trains et donc les gares, les baignoires qui se vident, les chiens par définition aboyeurs et j’en passe.

 

N’oublions pas l’interdiction pure et simple de la consommation d’alcool, qui s’impose tout naturellement dans cette optique.

        

Bien sûr, toutes ces saines interdictions feront des mécontents. Mais on ne va pas chipoter sur quelques fumeurs, quelques producteurs de tabac, quelques fabricants de voitures ou de motos, quelques garagistes, quelques «téléphoneurs» impénitents, quelques pilotes de chasse, quelques globe-trotters, quelques obsédés de l’hygiène, quelques mémères à chiens, quelques amateurs de bon vin et quelques vignerons !

 

L’important est que, grâce aux mesures que je viens d’évoquer, la majorité de la population sera, à terme, assurée d’atteindre l’âge de cent vingt ans et peut-être même un jour de cent cinquante ans. Quel beau rêve !

 

Mariette Paschoud