Sommaire :
L’éditorialiste essaie de surnager dans
la griserie ambiante
Notre
correspondant permanent «au bout du Lac» nous entretient de John qui aime les
beaux habits
Il faut soutenir dans le canton de Vaud
le referendum contre la loi sur les EMS !
Max nous conte les malheurs d’un chasseur, la renaissance des
espions-tueurs, la destinée d’un âne militaire, le destin d’un
grand honnête homme (et pourtant condamné) et proclame son refus
d’assumer certains travaux…
Quand un protestant proteste…
Sans une claire distinction entre le vrai
et le faux, le mot «tolérance» ne signifie rien !
«A quoi servent les
radicaux ?» nous demandions-nous le mois passé. Un
lecteur répond.
Il faut dissoudre
Pro Helvetia !
La récente polémique sur l’exposition Hirschhorn n’est que le
révélateur d’un problème plus profond. On ne le résoudra qu’en
liquidant Pro Helvetia et les officines fédérales s’occupant de
«culture».
Les contributions ont été si nombreuses ce mois-ci
que le rédacteur responsable de notre «feuille d’extrême droite»
n’a pas été en mesure de les publier toutes. Max et Claude ont fait les
frais des choix de Mariette qui compte sur leur inépuisable compréhension, et
qui a dû elle-même se restreindre, comme vous pouvez le constater. Il a fallu
également remettre à plus tard le traitement de plusieurs sujets tels que la
création de l’Association romande
contre la drogue, les
deux derniers volumes d’Etudes et Enquêtes – Libérez
l’école ! et Quand le juge fixe
le salaire –
publiés par le Centre patronal, ou encore la grève des employés de Filtrona
– qui exigent de pouvoir contribuer éternellement à nuire gravement à la
santé de leurs contemporains fumeurs actifs ou passifs, en fabriquant des
filtres de cigarettes –, tous événements qui auraient mérité un
commentaire approfondi. Ce sera pour la prochaine fois, si l’actualité du
moment le permet.
En cette fin d’année, il n’est peut-être
pas inutile de faire un petit tour d’horizon, car notre beau pays, où il
fait certes bon vivre, à condition d’observer strictement certaines
règles de comportement, donne des signes de faiblesse.
Les Suisses ayant rejeté l’égoïsme et
l’obscurantisme, selon la manchette du Temps du 29
novembre, les embryons surnuméraires vont prendre le chemin des laboratoires,
pendant que des couples stériles iront chercher à l’autre bout du monde
des enfants à adopter et que l’avortement détruira chaque année des
milliers d’embryons pas surnuméraires.
Des pasteurs se muent en grévistes et en hors-la-loi
(cf. p. 2).
Nos conseillers fédéraux, quand ils ne sont pas en
voyage, s’entre-dévorent au lieu de faire leur boulot.
Les conseillers d’Etat vaudois ont perdu le cap
dans tous les domaines.
La plupart des journalistes ont plus que jamais le
cœur à gauche et ne se privent pas de le manifester en toute occasion,
surtout en truffant des articles prétendument d’information de
commentaires ou d’allusions fielleux contre tous ceux qui ne sont pas de
leur bord.
L’art devient de plus en plus un métier
subventionné où l’on peut se permettre n’importe quoi (cf. p. 4).
Il fait froid, il fait gris, c’est
l’hiver. Que fait le gouvernement ?
N’allongeons pas : c’est trop
déprimant, et de toute façon, nous manquons de place.
La rédaction du Pamphlet a
le plaisir de vous annoncer qu’elle vous retrouvera l’an prochain,
si vous voulez bien continuer à la lire. En attendant, elle souhaite à chacun
d’entre vous un joyeux Noël et une heureuse année 2005.
Le Pamphlet
Point de vue du bout du Lac
Dans mon dernier
article, je faisais allusion aux problèmes que pose, dans la cité de Calvin, la
prolifération de trafiquants de drogue. J’aimerais revenir sur ce point
en m’appuyant pour cela sur un témoignage paru dans Le Temps
en date du 21 juin 2004, sous le titre Coke en stock dans les rues de Genève,
et qui trace le parcours de John (prénom fictif), jeune requérant d’asile
de 19 ans, originaire de Côte d’Ivoire et dealer de cocaïne. Ce
témoignage m’a semblé particulièrement intéressant, car il n’expose
que des faits, sans parti pris ni allusion idéologique d’aucune sorte. En
voici quelques extraits qui me semblent illustrer de façon criante que les
politiques en matière d’immigration et de répression sont à revoir.
«John raconte
qu'il est arrivé en Suisse via l'Italie il y a un an. Dans l'attente de son
statut de réfugié politique, il est hébergé dans un foyer dans le canton du
Jura. Mais John préfère passer son temps à Genève: “Là-bas, tu
restes à la maison, tu dors, tu t'embêtes. Et puis dans mon foyer, il y a
beaucoup de Guinéens, et je ne m'entends pas bien avec eux. Avec la carte Voie
7, je voyage pas cher et je peux dormir chez un
copain, dans un foyer à Plainpalais. Ici, il y a plein d'Ivoiriens, c'est plus
facile pour travailler.”»
Voici un an donc que ce jeune homme attend. Il ne peut
pas travailler et donc s’ennuie. Alors, il fréquente les mauvais milieux
et fait comme tout le monde. N’y aurait-il pas quelque chose à faire en
amont afin que ce garçon reçoive une réponse positive ou négative à sa demande
d’asile, avec structures d’intégration s’il est accepté en
Suisse et retour au pays s’il est refusé, dans des délais qui se
compteraient en jours voire en semaines et non en années ? Il n’y
aurait pas d’inconvénient dans ce cas à ce que les demandeurs
d’asile soient gardés dans des structures d’accueil, sans
possibilité d’en sortir jusqu’à ce que les autorités compétentes
aient statué sur leur cas, ce qui éviterait de les voir se volatiliser dans la
nature.
«Comme beaucoup de dealers de cocaïne, John
“travaille” plutôt le soir. Il sait que la ville est découpée en
zones de vente. Chaque quartier a son propre réseau de distribution, sous le parrainage
d'une ethnie. Les frontières sont bien délimitées, tout le monde les respecte
(…). “A Genève, la
place des Augustins est contrôlée par les Sénégalais, comme le Mcdo de
On constate que
tout cela est bien organisé et que tout serait pour le mieux dans le meilleur
des mondes s’il n’y avait pas cette fichue police qui est tout de
même très gênante. Eh bien, moi je trouve cela assez rassurant, mais en même
temps je pense que cette fichue police devrait être un peu plus que gênante,
par exemple omniprésente, ou totalement insupportable, au point que ce
n’est plus possible de travailler dans ces conditions, chère madame. Mais
pour cela il faudrait des moyens qui semblent à nos chers élus mieux investis
dans la culture et les subventions de tout poil.
«John vend chaque jour une trentaine de boulettes de
coke entre 40 et 50 francs l'unité.(…) “Des fois, j'arrive à
économiser 1000 francs par jour, souligne John. Les anciens, eux, arrivent à se
faire dans les bons jours 2000 francs. (…) Avec l'argent que je recevais
de l'asile, je ne pouvais pas me payer de beaux habits.” »
Il est clair que de
tels revenus feraient envie à nombre d’employés de ma connaissance qui
triment leurs 42 heures de travail hebdomadaires pour toucher finalement en un
mois ce que ce jeune homme gagne en 3 jours. Il est vrai que lorsqu’il
prendra sa retraite, il ne bénéficiera pas du 2ème pilier, mais
bon… Ce qui m’interpelle surtout, c’est l’absence
absolue de conscience du caractère immoral de l’acte. Ce garçon répond
certes à une demande de la part de consommateurs, il ne fait a priori pas de
marketing pour vendre ses produits, mais il n’a aucun problème à se
regarder dans un miroir le matin, alors qu’il passe sa journée à utiliser
la dépendance des drogués pour s’enrichir et tout cela pour quoi ?
Pas pour nourrir sa famille restée au pays dans une misère noire, ni pour
financer une quelconque cause à laquelle il croirait. Non, il s’agit de
s’acheter des beaux habits. Peut-on en conclure que John est totalement
dépourvu du moindre sens moral ? Peut-être, mais finalement ce n’est
pas certain. Ce qui est clair, c’est que dans notre société, la
consommation est la première valeur de référence. Il n’est pas surprenant
que, pour quelqu’un qui débarque d’un pays en voie de développement
où la consommation se limite aux besoins vitaux, notre mode de vie semble
paradisiaque et que tous les moyens pour y accéder soient bons.
«Une chose est sûre: John aime
C’est la
conclusion du témoignage et tout est dit. C’est facile. En France,
c’est pas la joie, mais en Suisse, en tant que dealer de drogue, on est
bien, peinard. Je crois que la première chose à faire, avant de mettre quoi que
ce soit d’autre en place, c’est de rendre
Xavier
Savigny
La loi sur les EMS a été
adoptée par le Parlement le 7 décembre
Ø
une augmentation des prix mis à charge des
pensionnaires d’EMS et des contribuables,
Ø
une réduction des prestations pour les pensionnaires
d’EMS,
Ø
une diminution des postes de travail pour le personnel
des EMS,
Ø
aucun progrès sur le plan du contrôle financier et de
la qualité des prestations.
Les autorités de ce
canton pensent que l’Etat peut se créer des recettes aux dépens des
pensionnaires et des employés des EMS, et en alourdissant la facture sociale.
Nous allons
demander au peuple vaudois de se prononcer sur cette loi par voie de
référendum. La demande de référendum est soutenue par le comité de
l’Union des retraités de l’Etat de Vaud (UREV) et le comité de
Lausanne,
le 9 décembre 2004.
Marie Guignard,
Ndlr : les listes de signatures ne sont pas encore disponibles.
Vous les trouverez dans notre prochain numéro.
France
– Un ancien ministre communiste se tire dans le pied – Justice
immanente ou tentative de suicide ?
Monsieur Jean-Pierre Gayssot, fugace ministre des
transports et opportun député «père porteur» de la loi bâillon (dite
«Fabius – lui-même»)1 se tire une décharge de plombs
en allant braconner la bécasse2 et y laisse deux orteils du pied
droit. Marx merci, il ne s’agissait pas d’une battue au sanglier -
on tremble à l’idée du dommage que le «mal-à-droite» aurait subi
d’une balle à ailettes. Mettant en parallèle le point d’impact et
la notoire immobilité d’esprit de l’amputé, on peut cependant se
demander s’il ne s’agissait pas plutôt d’une tentative de
suicide… Le remords, qui sait ? Toujours est-il qu’une volée
de métal lourd à bout portant dans le pied… « Ça a dû faire
maaal ! [soupir] Et il
n’avait pas de Syntol…[silence
navré] le pôôôvre ! »3
Nos amis français commencent à soupçonner
l’ingérence d’agents provocateurs – pudiquement dénommés
«conseillers» par la presse inféodée – de certain petit pays du
Proche-Orient dans les problèmes qu’ils rencontrent en Côte
d’Ivoire. Il n’est peut-être pas inutile de leur rappeler que, sous
l’ère d’angélisme du président Carter,
Retour de Paris, Max a remarqué, hormis certains
arrondissements du nord où les indigènes ont définitivement cédé le pas aux
sauvages – dont l’invasion semble cependant circonscrite
– et le métro – où les
« Français d’en bas », encadrés par les rondes de police et
noyés dans les hordes de «potes» des trois sexes d’origines
non-assimilables, ont adopté le profil bas – que les Parisiens de souche
étaient disponibles et aimables entre eux comme avec le touriste. A
l’inverse de Genève, le piéton surpris à contre-feu n’est jamais le
gibier potentiel d’accélérations rageuses ou la cible de klaxons
moralisateurs et vindicatifs, et l’étranger perdu ou le client probable sont
accueillis avec gentillesse et disponibilité. Les rues commerçantes sont plus
attirantes que jamais et c’est un plaisir de se procurer les rares
survivants de la presse d’opinion lorsque que c’est une accorte
amatrice de Mozart qui vous les tend en souriant. Paris surprend toujours...
Ane «sept étoiles », mais frère
«trois-points»
Suggestion de cadeau de Noël à ceux de nos lecteurs,
qui aiment à réviser leur Histoire : découvrir, grâce à Joffre – L’âne qui commandait
des lions4, sous un aspect nouveau et sans fard la consternante
personnalité de l’homme qui, face aux mitrailleuses «Maxim» en tir tendu
croisé, envoyait ses soldats «[dénouer]
la situation à l’arme blanche». « Attaquons ! Attaquons !»
était le leitmotiv du futur maréchal
franc-maçon, commandant en chef si prompt à envoyer ses hommes se faire hacher
en terrain nu dans des offensives à outrance que le très capable général
Lanrezac avait fini par le surnommer : «…comme la lune».
A rapprocher d’un certain généralissime Gamelin,
arrivant à son état-major, en pleine offensive allemande de mai 1940, frais et
dispos, de ses huit heures de sommeil quotidiennes, et commençant son
rapport par : «Sans vouloir
me mêler de la conduite des opérations…».5
«Cuisine» française : Le petit Noël de
Monsieur Juppé
Versailles,
1.12.2004 : par décision de
Non
aux travaux forcés ! (Je suis
paresseux)
Il n’est pas de jour sans qu’à
l’occasion d’une gamine chue accidentellement par la fenêtre
d’une salle de classe, d’une douzaine de badauds précipités dans un
bassin de radoub par la rupture d’une passerelle ou d’une centaine
de touristes volatilisés dans la désintégration finale d’un vol
«charter», les médias nous balancent le refrain du «travail de
deuil» ; pas de commémoration de vilaine action historique, avérée ou
hypothétique, sans que les mêmes, sur l’air des lampions, nous ordonnent
un «travail de mémoire». Offres appuyées que je ne manque jamais
de décliner : je suis paresseux.
Je me mets au travail quand j’en ressens la
nécessité ; je fais seul et sans aide mon
deuil de ceux qui m’ont
été chers, voire d’inconnus qui m’ont
ému, persuadé du bien-fondé de l’adage qui veut que «quand on n’est pas
capable d’enterrer ses morts, on n’en accable pas les vivants».
Individualiste incorrigible, je nourris librement ma mémoire, sans la
surcharger de celle d’autres bipèdes, arbitrairement imposée sous
l’étiquette suspecte de «mémoire collective», et dont je
considère qu’elle ne m’appartient pas. Moyennant quoi je suis
heureux autant qu’on peut l’être et n’ai pas le sentiment
d’encombrer mes semblables… à qui je souhaite, au passage, un
joyeux Noël.
1. L’amendement
Gayssot à la loi de 1881 « sur la liberté (sic) de la presse »
s’apparente à notre disposition scélérate de l’article 261 bis CPS.
2. La «passée à la bécasse», interdite en France, peut
valoir une amende de 1500 € au délinquant, assortie de deux ans
d’interdiction de chasse.
3. …d’une
fort réjouissante publicité sur une chaîne TV française.
4. Par
Roger Fraenkel, éditions Italiques, 6, place de
5. Témoignage
du général Beaufre.
6. N°
20709, du 2.12.2004, pp ; 1 et 11.
(Lettre adressée au
Conseil synodal de l’Eglise réformée du Canton de Vaud par un de nos
fidèles lecteurs. Réd.)
Concerne : votre prise de position
politique au sujet des réfugiés
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
En préambule, permettez au
soussigné de se présenter brièvement : 72 ans, paroissien (plus ou moins
fidèle) de la paroisse réformée de Clarens, ancien conseiller de paroisse de la
paroisse de Lucens et membre de la commission de jeunesse du 1er
arrondissement écclésiastique (années 60).
Les journaux de ce jour
titrent : «Les protestants
s’opposent frontalement au Conseil d’Etat». Cette affirmation,
certes très journalistique, a été néanmoins inspirée par la prise de position
de votre Conseil ; elle éveille en moi les remarques suivantes :
1.
A quel titre prenez-vous des positions politiques qui engagent
l’ensemble des protestants ? On pourrait éventuellement
s’attendre à un tel débordement d’autorité de la part d’une
Eglise hiérarchisée comme l’Eglise catholique. Votre Conseil, en
revanche, a pour mission, à ma connaissance, de présider aux structures et à la
bonne marche de notre Eglise. Vos décisions de type organisationnel (d’ailleurs
pas toujours judicieuses) doivent être respectées dans la mesure où toute
communauté, civile ou religieuse, a besoin d’un minimum d’ordre
pour assurer son unité et sa bonne marche. A ces activités pratiques peuvent
s’ajouter, occasionnellement, des prises de positions théologiques,
encore que le protestantisme permette, c’est à la fois sa force et sa
faiblesse, des interprétations assez libres. Ce qui est en tout cas
inadmissible, c’est que votre Conseil s’exprime politiquement au
nom des protestants.
2.
J’imagine bien entendu votre contre-argumentation : «le problème n’est pas politique, mais
il est de nature chrétienne». Et, pour étayer ce point de vue, vous citez
l’Évangile de Matthieu : «J’étais
un étranger et vous m’avez accueilli». Une fois encore, la pratique
est courante dans les milieux ecclésiastiques : faire un usage abusif de
nos versets bibliques. Combien de fois, dans ma vie d’officier, ai-je
entendu des objecteurs de conscience se référer au verset «Tu ne tueras point» pour justifier leur position
antimilitariste. C’est naturellement détourner de sa véritable
signification un ordre biblique. Comme pour la plupart de ces injonctions, il
s’agit de proposer au croyant une attitude personnelle à mettre en
pratique dans sa propre vie et non d’une directive à faire appliquer au
niveau de la législation d’un État. Décidément, le Conseil synodal ne
fait pas mieux que mes objecteurs de conscience ! Ma réaction individuelle
face à un prochain, quel qu’il soit, suisse ou étranger, avec ou sans
papiers, peut s’inspirer de l’Évangile, mais ne poussez pas
l’hypocrisie jusqu’à faire valoir cet argument dans
l’application de lois dûment votées, en bonne et due forme !
3.
En lisant votre prise de position de ce jour, j’ai cru lire un programme
de parti politique. C’est bien dans ce cadre que doivent être traités de
tels problèmes et non au travers de l’Eglise. Si j’adhère à un
parti, je connais son programme ; je l’approuve ou je démissionne du
parti. En revanche, mon adhésion à l’Eglise réformée est basée sur
d’autres espérances. Le message spirituel de l’Eglise est certes
plus difficile à faire passer, ce n’est pas une raison pour se rabattre
sur des actions qui entravent la marche de l’Etat. A mon tour de me référer
à
4.
J’envoie une copie de la présente aux instances responsables de ma
paroisse en espérant qu’elles sauront se distancer des injonctions de
leurs autorités ecclésiastiques. Puisque le Synode manifeste un esprit de
révolte face à l’Etat, autorité dont il dépend matériellement, on peut
également attendre des paroisses qu’elles prennent leurs distances face à
leurs autorités.
Si vous avez eu la patience de
lire mon texte de bout en bout, je vous remercie de l’attention que vous
y avez porté. Contrairement à votre autorité, je n’ai pas la prétention
de parler «au nom des protestants» ;
je pense néanmoins que nombre d’entre eux pourraient souscrire à mon
point de vue. C’est avec eux que je vous demande davantage de retenue
afin de ne pas créer inutilement au sein même de notre église de nouvelles
divisions.
Veuillez agréer, Monsieur le
Président, Mesdames, Messieurs, mes salutations distinguées.
.
Pour tuer la vie de
l’esprit, il suffit de placer toute vérité sous le régime de la
tolérance, de considérer toute vérité établie comme une simple opinion.
On peut alors, selon les
circonstances, la proscrire au nom de n’importe quel intérêt.
Le thème de la tolérance et le droit à la tolérance
sont au cœur de notre système de pensée sociale et politique et de notre
dispositif juridique. J’écoutai récemment sur la 2ème chaîne
de la radio romande, dans le cadre de l’émission Le temps qui court,
un invité, Yves-Charles Zarka, nous parler de son livre, Difficile tolérance,
publié aux Presses Universitaires de France (le 1er décembre 2004).
Tout le monde, et en premier lieu le
monde universitaire lui-même, semble oublier ce fait , pourtant élémentaire et
essentiel, qu’on ne saurait parler de tolérance, en concevoir le sens,
si, au départ, on se refuse à faire une distinction préalable entre le vrai et
le faux, le juste et l’injuste, le bien et le mal ! En dehors de ces
points de repère, le mot lui-même de tolérance ne signifie plus rien.
Dès lors que l’on réduit tout au
statut de l’opinion, l’échange d’opinions perd son intérêt.
Notre monde le sent bien, qui s’invente – et ce n’est pas un
hasard s’il le fait – de nouveaux interdits, afin de fixer des
limites, fussent-elles purement fictives ou arbitraires, au tolérable. Mais ce
n’est là qu’un procédé éminemment contestable, moralement trouble
et intellectuellement inepte.
Quand les critères objectifs et
sérieux, fondés, de la tolérance font défaut ou sont récusés, en particulier
par le rejet de la religion ou de la morale naturelle et objective, des dogmes
qui leur sont liés, et des autorités propres à les énoncer ou les défendre, la
tolérance est mystifiée, aboutit même à son contraire pratiqué dans
l’hypocrisie la plus abjecte. Dans un climat de scepticisme généralisé et
obligatoire, nous abandonnons à la seule violence la solution de tous les
conflits humains, de tous les différends, puisqu’on ne peut
s’entendre sur rien !
A cet effet, les sceptiques modernes,
c’est-à-dire ceux qui font du scepticisme général un dogme de foi laïque
implicite, ont inventé la notion d’extrémisme. Elle est très utile, car
elle conforte leur idéologie creuse, sert leur bonne conscience par l’octroi
d’un label de modération qu’ils s’attribuent à eux-mêmes et
permet l’utilisation du mot de tolérance dans une acception pour le moins
curieuse et paradoxale : cette «tolérance-là» sert, en fait, le
fanatisme !…
C’est très exactement ce que
constate notre universitaire dans son livre en évoquant l’état du monde
présent à l’échelle internationale, où aucune religion, aucune morale ne
prédomine. Cet état engendre des antagonismes de mort. Là où ne s’impose
aucune vérité, aucune morale, les hommes et les sociétés sont livrés à la lutte
pour la vie.
Louis de Bonald définissait le secret
de cette vaste supercherie dans cette réflexion : «On peut être modéré
avec des opinions extrêmes. C’est ce qu’affectent de ne pas croire
ceux qui sont violents avec des opinions faibles ou médiocres.» Derrière
cette stratégie de la tolérance pour les opinions faibles ou médiocres et de
l’intolérance pour les opinions extrêmes mais fortes parce que fondées,
se révèle crûment l’égalitarisme, le rejet forcené, passionnel et
totalement irrationnel, de toute supériorité de pensée, de religion, de morale.
Le faux dogme de la tolérance religieuse permet d’étouffer dans
l’œuf toute confrontation entre l’islam et la religion
chrétienne, car il est hors de question que l’une puisse l’emporter
sur l’autre quand bien même on n’utiliserait à cette fin que des
critères admis soit par la science, soit par la morale naturelle, soit par la
critique historique la plus exigeante…
Tout ce qui est susceptible de
l’emporter en termes de valeur étant par nature admis et reconnu par une
minorité, il est facile de l’étouffer en invoquant le grief
d’extrémisme. Pareil sophisme se révèle lorsque l’on passe à une
autre extrême, non dans le vrai et le bien mais dans le mal et le faux :
la consommation de drogues ou la caricature de mariage unisexe ou
l’apologie de la subversion révolutionnaire par diverses idéologies. De
ce côté, la tolérance est obligée. Il n’y a de sauvagerie et de dérives
racistes que chez les seuls blancs, jamais chez les noirs africains… Le
terrorisme de masse et anonyme, bien que pratiqué depuis toujours par des
mouvements de gauche ou des musulmans, occasionnellement des juifs, en Israël,
n’autorise aucun amalgame, que l’on pratique pourtant sans vergogne
quand il s’agit de la conquête des Amériques par les Espagnols à propos
de l’Eglise et du catholicisme, quand bien même Rome avait condamné ces
excès… alors que le Coran les recommande !
Une «tolérance» idéologique qui
proscrit la morale, la raison (notamment dans l’indépendance de la
recherche historique) et la science comme autant d’instances critiques se
réduit à n’être qu’une simple mystification, un mensonge délibéré,
à n’être au fond que son contraire : un vulgaire fanatisme ! On
projette ce vice sur autrui pour mieux le pratiquer soi-même en toute impunité.
Le procédé est élémentaire, primitif. Il a des conséquences désastreuses. Mais
c’est le prix à payer pour que les médiocres et les inférieurs dominent
les forts et les hommes supérieurs dans la plus grande quiétude possible…
Michel
de Preux
Monsieur le
Rédacteur,
Je paie par ce même
courrier l’abonnement 2005. Abonné depuis 34 ans !
Réponse à votre
titre du dernier journal. «A quoi servent les radicaux ?» : à
payer l’abonnement régulièrement au Pamphlet.
Avec mes remerciements
et tous nos vœux.
Il faut dissoudre
Pro Helvetia !
Pour moi, comme
sans doute pour bien des gens de mon âge (parmi lesquels M. Pascal Couchepin si
j’en crois une récente interview), l’art est une activité qui tend à la création d’œuvres exprimant un
idéal de beauté et d’harmonie.
Ce n’est plus
du tout la définition actuelle de l’art. Les spécialistes de l’art
contemporain, aussi bien que les artistes eux-mêmes, affirment que l’art
doit d’abord interpeller, déranger, voire irriter. La création artistique
ne se concrétise plus dans une œuvre, mais dans un message.
Traitant du talent
de l’hôte actuel de notre Centre culturel à Paris, à l’hôtel
Poussepin, un éminent critique écrit1 :
«Hirschhorn s’approprie les éléments utilisés par
les exclus, cartons, pancartes pour affirmer son propre message. En fait
l'œuvre ne réside pas dans la création d'un objet ou d'une toile, mais
dans l’invention d'une méthode, d'une manière de présenter des œuvres
ou des questions».
Il n’est dès lors pas étonnant que les artistes
d’aujourd’hui suscitent perplexité, incompréhension, voire
ricanements ou mépris. Et ce n’est pas parce qu’un artiste
contemporain est exposé partout dans le monde, et universellement loué par ses
congénères et par la critique, que ses œuvres sont nécessairement autre
chose que de la merde, dont les gens de goût ne voudraient pas dans leur
garage.
L’inverse est aussi vrai : ce n’est
pas parce qu’une œuvre est mal comprise, mal accueillie ou hermétique
que son auteur est nécessairement un charlatan. Il est arrivé qu’un génie
musical ou un peintre d’exception ne soit reconnu comme tel par le public
qu’assez tard. C’est d’ailleurs cette dernière constatation
qui rassure les scribouillards sans lecteurs, les comédiens sans public, les
peintres sans talent ou les compositeurs dont la musique ésotérique et
inaudible ne plaît qu’à de minuscules chapelles.
Et c’est aussi pourquoi il est si difficile,
aujourd’hui, de reconnaître le talent avec certitude, sauf peut-être en
littérature où la vacuité de la pensée ne parvient jamais à se masquer, même
sous le grimage épais de la boursouflure rhétorique. Le talent littéraire
n’a jamais été méconnu.
En parcourant les salles d’exposition entre un
immobile de Kundelic et un monochrome de Whiteman, le spectateur sait
confusément qu’on se moque de lui mais craint de passer pour un Béotien
s’il exprime sans ambage ce qu’il pense de ce porte-manteau ou de
cette toile blanche.
* * *
*
Il est rare qu’un artiste puisse vivre de son
art. S’il ne peut décrocher un fromage confortable à l’Orchestre de
Les activités de Pro Helvetia se répartissent
d’une manière générale en deux types : le soutien à des projets pour
lesquels une requête est présentée, et la réalisation de projets lancés par
Outre les
facteurs clefs que sont la qualité
artistique et le caractère novateur,
les critères suivants jouent un rôle au moment de l’évaluation des
projets : le lien avec
Ce ne sont, apparemment, pas ces critères qui ont
guidé son soutien à l’exposition actuelle montée au Centre culturel
suisse de Paris, où M. Hirschhorn s’en prend violemment à M. Christoph
Blocher et au système démocratique suisse qui a permis son accession au Conseil
fédéral. Les reflets que j’en ai vus dans la presse, à l’instant où
je rédige ces lignes, me consternent. Comme l’écrit pertinemment notre
excellent confrère Philippe Barraud dans sa rubrique hebdomadaire de www.commentaires.com, «les invectives ordurières sur Christoph
Blocher sont à la portée du premier poivrot venu au Café du Commerce.»
Et c’est pourquoi, discutant le budget, le
Conseil des Etats a décidé, dans un accès de mauvaise humeur, de raboter un
million sur les trente-quatre alloués à Pro Helvetia.
Pourquoi ne pas dissoudre purement et simplement Pro
Helvetia et faire ainsi l’économie, non pas d’un seul
million, mais de trente-quatre ?
La question pose en fait le problème, jamais résolu à
satisfaction, des rapports entre l’art et l’Etat, entre les
artistes et le pouvoir, entre la création et l’administration.
On nous pose en exemple le mécénat pratiqué par les
rois et par les princes. Mais il n’y a en Suisse ni roi ni prince. Le
«souverain», dans l’idéologie démocratique issue de
Le souverain doit déléguer son pouvoir, en matière
artistique, au Parlement qui le délègue à son tour à un office de la culture,
qui finance une fondation, qui paie l’entretien d’un Centre
culturel, qui à son tour verse 180'000 francs à M. Hirschhorn pour qu’il
puisse conchier
La présidente de Pro Helvetia, Mme Yvette Jaggi, dont
le bon goût est perceptible dans le choix de ses tailleurs, «se reconnaît dans ce projet», c’est-à-dire, si l’on comprend bien, dans
l’étalage d’inepties de mauvais goût exposées à Paris.
Je ne dénie pas à M. Hirschhorn le droit
d’étaler son talent où il veut, et à Mme Jaggi de soutenir contre tout
bon sens le directeur du Centre culturel de Paris, mais pourquoi à mes frais, dans le même temps où Pro
Helvetia renonce à participer au Salon du livre, après 17 ans de
présence, soi-disant pour des motifs d’économies ?
Il faut dissoudre Pro Helvetia !
Claude Paschoud
1 Patrick Schaefer, L’Art
en jeu, 3 septembre 2001,
www.art-en-jeu.ch/expositions/hirschhorn.html
Note
pour l’édition Internet :
J’y suis allé le 12 décembre. Mais c’était
à 9 heures du matin, et j’avais mon avion à reprendre à midi. Je
n’ai donc vu que les extérieurs. mais cela m’a suffi !
J’ai pris quelques photos !
C.P.