Lausanne 27e année "ne pas subir" Juin 1997 No 266

Sommaire :

Brimades
C'est la guerre !
Neutralité : interprétation souple
A propos d'un débat télévisé


Brimades

L’Association transports et environnement (ATE) s’apprête à lancer une initiative populaire baptisée "Rues pour tous", visant à faire inscrire dans la constitution fédérale une limitation à 30 km/h de la vitesse dans les localités. Il paraît que cette mesure aura des effets positifs sur la protection de l’environnement, qu’elle permettra de sauver cinquante-trois vies humaines par année, de réduire le nombre des blessés de deux mille cinq cent quarante et de diminuer les émissions d’oxyde d’azote de mille huitante tonnes. C’est ce que nous apprend, entre autres, un communiqué ap publié par la presse du 16 juin.

Ce n’est certes pas nous qui nous opposerons à ce qu’on sauve des vies humaines et à ce qu’on diminue le nombre des blessés de la route. Nous n’avons rien non plus contre une réduction des émissions d’oxyde d’azote. Mais nous voudrions bien savoir sur quoi se fondent ces chiffres si précis qu’ils en deviennent suspects. Nous ne comprenons pas non plus comment un trafic ralenti, donc prolongé, aura des effets positifs sur la protection de l’environnement. Est-ce affaire de pollution ? Nous n’avons pas remarqué quel’air soit sensiblement plus pur dans les bouchons où l’on roule au pas que sur les routes dégagées.

Pourquoi ne nous dit-on pas la vérité ? Pourquoi ne nous dit-on pas une bonne fois qu’il s’agit de
dégoûter les automobilistes de rouler en ville, afin de limiter la circulation dans les localités ? Pourquoi, si cette nécessité est impérative dans l’intérêt des habitants de nos villes et villages, n’en explique-t-on pas les raisons aux détenteurs de voitures ? Craint-on qu’ils soient trop bêtes pour comprendre ? Les juge-t-on a priori trop égoïstes pour entendre raison ?

Prenons le cas de la ville de Lausanne, qui est d’ailleurs à la pointe du progrès en matière de lutte contreles automobilistes et n’a nul besoin qu’on introduise dans la constitution fédérale une limitation à 30 km/hpour rendre la circulation chaotique. On y trouve trois sortes d’automobilistes : ceux qui habitent la ville et s’y déplacent en recourant aux transports publics, parce qu’il est tout de même idiot de sortir sa voiture du garage pour aller la déposer dans un parking quand on peut prendre le bus ou le métro. Ceux-là - celles-là, le plus souvent - ne roulent en ville que lorsqu’il s’agit d’aller remplir un caddie dans des centres commerciaux qui mettent à disposition des places de parc, ce qui est bien commode quand on est lourdement chargé. Le reste du temps, ils utilisent leur véhicule pour aller à l’extérieur. Une limitation à 30 km/h ne changera rien pour eux. Il y a aussi les pendulaires qui viennent travailler à Lausanne en voiture et regagnent leur campagne ou leur banlieue en fin de journée. Pour ceux-là, la limitation ne changera rien non plus, à moins qu’on n’environne la ville de vastes places de parcs gratuites et qu’on ne leur fournissedes transports publics performants et bon marché, ce qui n’est pas vraiment le cas actuellement. D’ailleurs, on ne voit pas pourquoi le contribuable lausannois devrait financer une infrastructure destinée à des gens qui ne paient pas leurs impôts dans la commune. Quant à la troisième catégorie, celle des inconditionnels de l’automobile, celle des gens qui ne peuvent pas faire trois cent mètres sans se mettre au volant, elle ne sera pas davantage influencée par la limitation proposée. Elle mettra un peu plus de tempspour parcourir ses trois cent mètres et c’est tout.

Quant aux piétons, où sera leur avantage ? Tout ce qu’ils en retireront, c’est de subir plus longtemps lesnuisances inhérentes au trafic automobile, telles que inhalation des gaz, bruit des moteurs, coups d’avertisseurs de conducteurs excédés parce que "ça traîne, ça traîne".

Il se peut qu’un piéton reversé par un véhicule qui roule à 30 km/h plutôt qu’à 50 ait des chances d’être moins grièvement blessé. Tout dépend des circonstances de l’accident. Il se peut aussi qu’une collision à vitesse plus faible engendre des dégâts matériels moins grands. Mais une chose est sûre, c’est que le nombre des accidents dans les localités devrait logiquement augmenter, du simple fait qu’il est très difficilede se maintenir à 30 km/h, que le conducteur qui veut échapper à l’amende pour excès de vitesse doitdonc constamment avoir l’oeil sur son compteur, au détriment de la nécessaire surveillance de ce qui se passe devant lui et autour de lui, avec tous les risques que cela comporte. On peut en faire l’expérience dans les zones de repos limitées à 30 km/h qui pullulent en ville de Lausanne, en plus des innombrables chicanes, gendarmes couchés et autres bornes qui ralentissent le trafic même dans des zones où s’applique théoriquement la limitation à 50 km/h.

Nous l’avons dit, la ville de Lausanne n’a pas besoin d’une nouvelle limitation pour brimer les automobilistes. Elle s’y emploie avec énergie et persévérance depuis plusieurs années. Avez-vous remarqué une diminution du trafic ? Nous pas.

Mariette Paschoud


C’est la guerre

Du discours prononcé samedi 21 juin à Berne par le conseiller national Blocher, la Grande presse alignée n’aura retenu que la proposition démagogique de constituer un fonds privé de solidarité alimenté par les 500 Suisses les plus riches.

L’analyse du rapport Eizenstat et l’idée que sa préface avait été dictée par les organisations juives internationales auraient mérité pourtant quelque attention.

Compte tenu de la tournure des événements, ces quelques derniers mois, il devient de plus en plus évident que la Suisse est la victime d’une campagne de dénigrement savamment orchestrée. Il est en outre probable que les organisations juives internationales ont quelque part dans l’orchestration de dite campagne.

Sans doute, comme le relevait M. Blocher, "aussi bien que le jugement de Stuart Eizenstat sur la Suisse n’est pas un jugement du peuple américain, aussi bien l’attitude du Congrès juif mondial ne saurait être mise à la charge des juifs en général". Il n’empêche que l’attitude de ce Congrès juif mondial et des organisations juives internationales à l’égard de la Suisse et d’autres pays européens est tout à fait propre à susciter une nouvelle flambée d’antisémitisme dont on distingue déjà les prémices même en Suisse romande, qui avait été totalement épargnée par le phénomène ces soixante dernières années.

L’effondrement de l’URSS, on le comprend aujourd’hui trop tard dans les chancelleries, a complètement modifié les rapports de forces, et les Etats-Unis d’Amérique ne connaissent plus aucun obstacle à leur rêve d’hégémonie mondiale. Partout ils dictent leurs exigences à des sujets qui ont la naïveté de se croire des partenaires. Au sein des grands organismes économiques, comme l’Organisation mondiale du commerce (ex-GATT) ou militaires comme l’OTAN, il n’y a que les intérêts américains qui sont dignes de protection. Les Européens n’ont qu’à prendre des notes et se taire.

Ce n’est sans doute pas un hasard si le fameux article 261bis du code pénal suisse a été mis en vigueur le 1er janvier 1995 à la suite d’une campagne de presse à laquelle les ligues juives prétendant lutter contre l’antisémitisme ont pris une part active. On nous a expliqué à l’époque qu’il était urgent pour la Suisse de pouvoir ratifier la Convention internationale prohibant toute forme de discrimination raciale.

Or, tout indique aujourd’hui que ce n’était pas là le principal objectif de cet article, auquel avait été ajouté presque subrepticement un paragraphe interdisant de minimiser "grossièrement" un génocide ou d’autres crimes contre l’humanité.

Cet article n’était qu’une machine de guerre assez machiavélique, une sorte de cheval de Troyes d’apparence inoffensive, introduite dans la législation à la requête des organisations juives internationales dont Bill Clinton est la créature docile, pour rendre a priori illicites toutes protestations contre l’offensive des banquiers juifs américains pour annihiler l’influence de la place financière helvétique à New York. La mécanique était superbement conçue et les rouages en sont parfaitement huilés.

Complètement désarçonné par la soudaineté et par la violence des attaques, le Conseil fédéral a perdu la tête, suivi par les commentateurs en gilet rayé de toute la presse alignée, qui se vante partout de constituer un "contre-pouvoir" et qu’on trouve à chaque occasion le petit doigt sur la couture du pantalon dans les allées du pouvoir. On constitue en catastrophe des commissions, on débloque des millions pour fouiller des archives, on va constituer des fondations dotées de plusieurs milliards.

Et la crainte d’être accusé d’antisémitisme, crime inexpiable entre tous, empêche tout homme d’Etat de dire à haute voix ce que tout le monde ressent de plus en plus clairement : les organisations juives internationales sont coupables d’un acte d’agression à notre endroit. Nous devons les traiter comme un ennemi.

Dans cette perspective, les citoyens suisses israélites devront inévitablement choisir leur camp, quoi qu’il leur en coûte et certains, bienheureusement, ont déjà affirmé publiquement qu'ils n'approuvaient pas l'arrogance du sénateur d’Amato et des organismes supposés les représenter.

Mais les politiques devront aussi bientôt sortir leur drapeau de leur poche et dire pour qui ils roulent. Lorsque la guerre est déclarée, il n’est plus temps d’acheter la paix avec des millions. Il faut riposter.

Claude PASCHOUD



 

Neutralité : interprétation souple.

La Suisse s’est engagée dans de nombreuses opérations en faveur du maintien de la paix. Les missions des unités médicales de l’ONU en Namibie et au Sahara occidental se sont achevées dans la confusion. Nos observateurs militaires engagés au Proche-Orient, en ex-Yougoslavie, en Georgie et au Tadjikistan ne s’y sont pas couverts de gloire, pas plus que l’"unité logistique" formée de 70 personnes au bénéfice de l’Organisation de sécurité et de coopération européenne (OSCE).

Et cependant, le DMF et sa division pour les opérations en faveur du maintien de la paix de l’Etat-major général sont fiers que la place d’armes de Bière ait été promue au rang de "centre d’instruction pour les opérations de maintien de la paix" et accueille de ce chef une pléiade d’officiers étrangers aux uniformes bigarrés.

Dans son service de presse, le DMF avoue que les notions de "Peace-keeping Operations" et de "Observer Missions" ne sont pas mentionnées explicitement dans la Charte de l’ONU. Elles sont considérées depuis plusieurs années comme le "chapitre 6½ non écrit" (sic !). L’absence d’une base juridique précise est d’une part souvent utilisée comme argument par les adversaires des opérations de maintien de la paix mais elle autorise d’autre part une interprétation souple et sur mesure concernant les principes d’engagement.

Mais pour les juristes qu’un raisonnement aussi impudemment spécieux pourrait choquer (surtout lorsqu’on proclame partout que la Suisse est un "Etat fondé sur le droit", le DMF nous rassure : "Contrairement au contenu de la Charte de l’ONU, la mission de Peacekeeping est clairement définie à l’article 1, 3e alinéa de la loi fédérale sur l’armée et l’administration militaire : "Dans le cadre de sa mission, l’armée doit en outre (…) c. contribuer aux mesures de maintien de la paix dans le contexte international" "

Pour nous faire avaler la pilule, le DMF publie un petit journal illustré, le "Swiss peace keeper", au sigle de l’ONU, relatant la "vie quotidienne des Bérets jaunes en Bosnie" sur le modèle et dans le style de la composition d’après-course d’école imposée en 7e primaire. C’est consternant de platitude et d’auto-suffisance.

Mais compte tenu de la diminution apparente des risques de conflits classiques en Europe, il fallait s’attendre à ce type de déviance.

La Suisse a adhéré le 18 juin dernier au "Partenariat pour la paix".

La majorité des 43 participants à ce programme de coopération politique et militaire proposé par l’OTAN sont d’anciens membres du Pacte de Varsovie et de l’ex-URSS. Les autorités fédérales ont en outre manifesté leur intérêt pour "une information libre, un domaine où la Suisse veut jouer un rôle de leader".
 
 

Lorsqu’on lit le programme d’informations réciproques qu’échangent les Etats qui ont adhéré au programme, on songe que le malheureux brigadier Jeanmaire en a été le précurseur, mais vingt ans trop tôt.

C.P.



A propos d’un débat télévisé à la TSR

Nous avons accordé une attention inhabituelle au débat télévisé finement intitulé "La Suisse neutre ou
pleutre".

Les organisateurs avouent avoir été très déçus du déroulement de cette soirée dont ils espéraient qu’elle
ferait des vagues. Hélas ! le titre déjà a dérouté l’assistance qui a demandé des explications sur le mot
"pleutre". Il faut croire que le grand public n’a pas un vocabulaire très étendu et que ce terme, peut-être
peu usité en Suisse Romande, ne lui est pas du tout familier. La responsabilité du choix de cet adjectif
incombe entièrement aux organisateurs de la TSR qui ont négligé sur le plan linguistique le "parler français
romand".

A y regarder de près, le public était plutôt clairsemé, contrairement aux prévisions enthousiastes de M.
Von Burg et de son assistante : une centaine d’auditeurs pour vingt-cinq spécialistes de l’histoire. On
avoue que bon nombre d’historiens avaient décliné l’invitation. Et nous avouons nous aussi que nous
avons vainement cherché, parmi les vingt-cinq élus, des personnalités connues pour leur connaissance de
la période 1939-1945. Nous avons cependant entendu M. Chevallaz émettre quelques propos sensés
concernant la situation de l’époque. Mais son discours n’a pas suscité beaucoup d'enthousiasme dans un
public qui est probablement médiocrement cultivé et plutôt habitué à répéter des slogans simples lors de
manifestations politiques ou à exploser sans retenue lors des matchs de hockey sur l’Almend ! On ne
manque pas néanmoins de l’interroger sur ce qu’il pense.

Point n’était besoin d’être prophète pour deviner que le tribun de Choulex ne manquerait pas d’assister au
débat. Quand il s’agit de dénigrer son propre pays, notre conseiller national J.Z. est un champion de
première catégorie. Conseiller national socialiste, professeur d’université à Genève, il a l’art d’utiliser son
précieux temps, pour compenser le fait qu’une journée ne compte que vingt-quatre heures.

La plupart du temps absent de ses cours - mais payé quand même -, parfois présent à Berne, il a assez de
temps pour rédiger des livres hostiles à toute la politique nationale et propres à exciter une foule de
demeurés contre tout ce qui ne relève pas de la démagogie. Ce démocrate invétéré fait imprimer sa
littérature en France, car c’est bien moins cher. Et puis, il a une flopée de petits copains roses qui lui ont
donné une décoration qu’il ne peut pas porter ici. Il voyage beaucoup , à Cuba, en Afrique, au Bourkina
Faso où repose son copain Sangaré, estourbi par son entourage démocratisé grâce à J.Z. Jadis, pour
imposer l’égalité, les jacobins voulaient raser les tours des églises. Ils sont tout juste arrivés à couper
quelques milliers de têtes. Au Bourkina Faso, on a bien retenu la leçon. Nous avons appris non sans
surprise que Jean Ziegler, puisqu’il faut l’appeler par son nom, avait été malmené par le "bandit Hitler".
Quel âge a donc le conseiller national ?

Nous avons entendu un farfelu de quarante ans à peine parler des militaires suisses de 1939-1945 : ils
étaient tous mal vêtus, mal équipés, mal nourris et mal instruits. Basta ! l’individu s’exprimait sans doute
au nom du GSsA. Le major Troyon, en retraite, aura certainement apprécié !

Une jeune historienne de moins de vingt-cinq ans a commencé à nous parler du STO, travail obligatoire
en Allemagne. Elle n’a évidemment pas appris, installée dans son fauteuil entre les bureaux et les WC,
qu’on libérait en contrepartie un certain nombre de prisonniers de guerre français et qu’on donnait aux
prisonniers de guerre français le statut de travailleurs libres à l’égal des ouvriers allemands. Historienne du
travail obligatoire, elle ignorait que cent mille ouvriers espagnols et portugais volontaires travaillaient en
Allemagne, surtout dans les branches du cuir, et que, tout comme les étrangers le font de nos jours, ils
envoyaient des mandats à leurs familles.

La Suisse est également responsable de la prolongation de la guerre. Les ultra-francophiles ont totalement
oublié qu’après le défaite de 1940 la Wehrmacht a récupéré en France des milliers de véhicules, de chars,
de canons et d’autres armes, des moteurs de véhicules et d’avions par centaines, avec lesquels elle a pu
engager en 1941 la guerre sur la terre russe. Décidément, les historiens fantoches pullulent chez nous.

En fin de compte, on constate que les questions simples mais actuellement pertinentes ont été éludées. En
outre, nous n’ignorons pas que les invités ont été triés sur le volet, que l’on a écarté les authentiques
témoins qui auraient pu tenir des propos gênants, afin de parvenir à un débat sans heurts, donnant raison à
la TSR.

On aurait pu pourtant poser ces trois questions :

1. Qu’auriez-vous fait, en tant que responsable de la population helvétique durant la période incriminée ?

2. Etes-vous frustrés par l’absence de situations conflictuelles ? Auriez-vous préféré que la Suisse soit en
guerre ?

3. Etes-vous mécontents d’être des citoyens suisses et condamnez-vous aujourd’hui les efforts déployés
par les diplomates et politiciens de l’époque pour sauver la neutralité et protéger l’ensemble de la
population, efforts dont vous êtes les bénéficiaires - ne serait-ce qu’avec le franc suisse, si vous ne
comprenez que cela ?

Opinion personnelle : M. Jean Ziegler ressemble à ces anciennes locomotives à vapeur fonctionnant au
charbon : elles crachent une fumée noire qui vous enveloppe et vous envoie des escarbilles dans les yeux.

Triboulet (fou du roi)