Editorial

Rarement une votation populaire aura donné lieu à un tel tsunami de commentaires, de réactions, de manifestations diverses. On a même entendu d’authentiques démocrates pur sucre nous démontrer sans rire qu’une votation populaire était, dans certains cas, antidémocratique.

Nous n’avons jamais été démocrates. Nous avons toujours cru que la monarchie était le régime politique le plus naturel et le plus adapté à la recherche du bien commun. Nous supportons néanmoins la démocratie que nous subissons depuis deux siècles, parce que nos concitoyens, formatés par les instituteurs issus de la Révolution française, n’envisagent même pas qu’un régime politique puisse surpasser la démocratie, en légitimité et en vertu… sauf évidemment dans les cas où le peuple se trompe et vote mal!

Nous partageons souvent cet avis. De temps en temps, le peuple se trompe. Et peut-être même cette fois-ci eût-il mieux valu que la question ne lui fût pas posée, parce que c’était une question absurde, et que les minarets n’ont, en soi, aucune importance.

L’important, c’est la liberté de conscience et de croyance garantie par l’article 15 de la Constitution fédérale qui confère à chacun le droit de choisir librement sa religion ainsi que de professer ses convictions philosophiques individuellement ou en communauté. Evidemment, le droit de professer ses convictions a ses limites: vous pouvez proclamer que vous ne croyez ni à Dieu ni au diable, que pour vous la terre est plate comme une pièce de cent sous, et que Darwin est un âne gris. Vous pouvez même affirmer qu’il n’y a pas de réchauffement climatique anthropique: vous serez considéré comme un imbécile inoffensif par la masse, et vous serez injurié par Philippe Barraud, mais vous ne risquez pas les foudres de la justice pénale.

Vous risquez la prison ferme, en revanche, si vos études vous ont incité à douter de la réalité des chambres à gaz homicides, car la religion holocaustique est devenue au XXIe siècle la seule religion à laquelle il est obligatoire d’adhérer.

Mettre sur pied d’égalité n’importe quelle croyance, n’importe quelle communauté religieuse, est une sottise. Il y a des religions dont les pratiques heurtent notre ordre juridique et nos mœurs. Nous ne sommes pas prêts à tolérer la polygamie, l’excision des petites filles, les mariages forcés et la servitude des épouses. Il y a des comportements sociaux qui, sans contrevenir à notre ordre juridique, marquent clairement le communautarisme et la volonté affichée de ne pas s’assimiler, comme le port de la burqa, le cimetière israélite ou le carré musulman, le refus d’apprendre la langue du pays, le bain séparé, le refus des étudiants de suivre les cours pendant certaines périodes de la semaine ou de l’année et j’en passe.

La plus grande partie de l’Europe a baigné depuis plus de mille ans dans la tradition chrétienne. Même un agnostique ou un mécréant le sait et il ne considère pas la Croix-Rouge comme une entreprise de prosélytisme du protestantisme genevois. C’est dire si est absurde une décision de la Cour européenne des droits de l'homme condamnant l'Italie, début novembre, pour la présence de crucifix dans les salles de classe, disposition jugée contraire au droit des parents d'éduquer leurs enfants selon leurs convictions, et au droit des enfants à la liberté de religion.

Les juges de Strasbourg ont estimé que la croix peut aisément être interprétée par des élèves de tous âges comme un signe religieux, signe qui peut être perturbant (sic) pour des élèves d'autres religions ou athées. La Cour a conclu à l'unanimité à la violation de l'article 2 du protocole 1 (droit à l'instruction) conjointement avec l'article 9 de la Convention (liberté de pensée, de conscience et de religion).

Quand on lit de pareilles fadaises, on peut se demander s’il ne serait pas sage que la Suisse dénonce la Convention imprudemment ratifiée en 1987 et ne permette en aucun cas à des juges étrangers de se mêler de nos affaires.

L’Italie est le berceau de l’Eglise catholique. Pourquoi n’aurait-elle pas le droit inaliénable de décréter que les élèves que la présence d’un crucifix dans une salle de classe perturbe sont libres de suivre un enseignement laïc privé, dans les locaux de la loge maçonnique la plus proche s’ils sont Italiens, ou de rentrer chez eux s’ils sont étrangers.

Pourquoi ne pas refuser la naturalisation aux islamistes, motif pris d’un défaut d’assimilation ou de l’absence d’une volonté d’intégration?

Un écrivain palestinien chrétien qui a reçu la nationalité suisse il y a quelques années nous racontait que la Commission de naturalisation lui avait posé de nombreuses questions, notamment sur la recette de la fondue au fromage, mais ne lui avait pas posé cette question fondamentale: «Etes-vous disposé à respecter notre ordre juridique et à vous conformer à nos mœurs?»

Ce pourrait être une question à poser à tous les musulmans fâchés de ne pouvoir ériger des minarets dans nos villes et nos villages.

Claude Paschoud

Thèmes associés: Politique fédérale

Cet article a été vu 3746 fois

Recherche des articles

:

Recherche des éditions