En direct de Sirius

«'Tschuldigung-sorry-eksküzé!» (On n'est jamais mieux excusé que par soi-même)

C'est fou cette manie de certains peuples de s'excuser. Chez les Suisses allemands, c'est un simple tic de langage sans portée aucune; le monsieur qui, par inadvertance, éclafferait les escarpins d'une dame dirait plutôt «Hopp-lah!». A dater des 8-9 mai 1945, les Allemands ont pris l'habitude de s'excuser de tous leurs péchés passés, à venir, réels ou imaginaires. Il y en a même qui admettent et déplorent que leurs aïeux aient agressé la Hongrie à l'occasion d'une guerre qui n'a jamais eu lieu. D'autres en sont à s'excuser d'exister au point que dans les ultimes générations – avant l'établissement définitif des envahisseurs d'aujourd'hui – il y en a d'assez violemment traumatisés pour se faire stériliser… oubliant, faute de calendrier ou de connaissances littéraires, que c'était le ventre fécond de la social-démocratie que Brecht qualifiait de «bête immonde». Conscients de l'outrance de la démarche, les francophones lettrés ne s'excusent jamais mais prient qu'on veuille bien leur accorder cette indulgence. Tout cela est, somme toute, bien excusable. Mais depuis l'«I'm terribly sorry» de cette touriste cyclomontée qui, après avoir arraché un rétroviseur à ma voiture, avait occasionné d'agaçants dégâts supplémentaires par suite d'une prise en chasse – la donzelle s'appliquant à continuer son tourisme comme si de rien n'était –, les seuls «excusants» auxquels je ne trouve plus du tout d'excuses sont les Anglo-Saxons; en particulier lorsque l'impavide Toni Blair se met tout soudain à s'excuser d'avoir, à l'issue de la représentation du 11 Septembre, emboîté le pas aux Etats-uniens courant sus à l'Irak et à son président.

En vertu du précédent nurembergeois, Blair – et pas mal d'autres anglophones – pourraient assez facilement avoir à répondre de complot contre la paix… On gagnerait du temps et on s'épargnerait des frais en maintenant le principe de ne pas mettre en doute la véracité des témoignages de pas mal de survivants irakiens, voire d'anciens soldats de la «coalition». Je rassure en passant ces adversaires de la peine de mort que je sens déjà frémir: on ne pendra pas la clique, parce que ses membres n'ont mené que des guerres «préventives» pour la défense du Bien et des démocraties et la mise à bas des tyrans, et parce qu'au terme de deux guerres mondiales et de pas mal d'autres aussi, la plupart des organisations internationales sont leurs; parce que le dollar est le roi incontestable de la planche à billets et parce que les diplomates francophones des générations «libérées» seront heureux de vous chanter, dans leur anglais de soumission, les multiples vertus de cette incontournable langue diplomatique tueuse et triomphante qu'est la langue d'Obama.

L'art de vous l'enfiler

J'ai observé sur les murs zuricois deux affiches de mise en garde. L'une représente une femme dans la trentaine, couchée, qu'on devine nue bien qu'à demi recouverte d'un drap. On sent qu'elle n'est pas au mieux de sa forme. On voit apparaître en arrière-plan une seconde paire de jambes d'aspect masculin. La légende dit en substance que si, à la suite d'une relation sexuelle «non protégée», on éprouve la sensation de couver une grippe, il faut courir faire un examen de repérage du sida chez son médecin. L'autre affiche développe le même thème, mais le personnage central est cette fois un homme. J'allais oublier! L'autre paire de jambes est velue aussi. Ainsi ouvre-t-on en douceur l'opinion publique suisse à l'acceptation du mariage entre personnes de même sexe. Tolérance, dites-vous? Fort bien. Mais ne vous étonnez pas ensuite du mépris que professent à l'égard de nos préoccupations majeures certains peuples plus en accord que nous avec les lois naturelles.

«Cette vidéo n'est pas disponible dans votre pays»

A cet ami qui me confirme la réception de ce message lorsqu'il voulut voir Hellstorm1, le remarquable documentaire sur ce que durent endurer dans leur chair les Allemands vaincus, j'ai rapporté de mémoire les scènes et témoignages les plus significatifs: on y voyait des exécutions massives, publiques et très spectaculaires de civils en Tchéquie, en Bohème ou en Moravie «libérées»; quelque part en rase campagne, une jeune femme aux traits germaniques, manifestement violentée, errant, hagarde, au hasard d'une route asphaltée au milieu de civils indifférents en plein exode, sous les yeux à peine intéressés de quelques vainqueurs; des grands blessés agonisant sans soins en plein soleil sous le regard intéressé de civils. Outre ceux de très peu de rescapés, on y entendait pas mal de témoignages de certains Tchèques écœurés par la violence de leurs compatriotes. En l'espèce, la censure n'aura donné que plus de poids à ma narration, ce que je pourrais presque déplorer par ce que je m'efforce volontiers à l'objectivité, laissant l'apanage du pathos aux nécessiteux.

Max l'Impertinent

 

1 Essayez! https://www.youtube.com/watch?v=GMCOKNCwHmQ&feature=youtu.be. Il paraît même qu'en Suisse alémanique, le message vous tutoie!

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