Diagnostic préimplantatoire: pas de ça!

Je suis opposée à toute destruction d'embryon ou de fœtus. C'est pour cette raison que je répondrai par un NON sec et sonnant, le 14 juin, à la question: «Acceptez-vous l'arrêté fédéral du 12 décembre 2014 concernant la modification de l'article constitutionnel relatif à la procréation médicalement assistée et au génie génétique dans le domaine humain?»

La procréation médicalement assistée (PMA) est réservée aux couples qui sont porteurs d'une maladie héréditaire grave ou qui ne peuvent pas procréer par voie naturelle.

Si la modification de l'article 119 de la Constitution fédérale était acceptée le 14 juin, ce qu'à Dieu ne plaise, le nombre d'embryons nécessaires au «traitement» des couples en question passerait de trois – qui, actuellement, doivent être implantés immédiatement dans l'utérus de leur mère sans diagnostic préimplantatoire – à douze, chiffre parfaitement arbitraire. Les Explications du Conseil fédéral sur les votations de juin prochain, dont je tire mes informations, ne nous indiquent pas pourquoi on a choisi ce nombre plutôt qu'un autre. Ce qu'on nous dit en revanche, c'est qu'il est nécessaire à la réalisation du diagnostic préimplantatoire (DPI), actuellement interdit, qui serait désormais autorisé et permettrait de sélectionner – mais oui! – les embryons utilisables: pour les couples porteurs d'une maladie génétique, ceux qui présenteraient le moins de risques d'hériter des prédispositions de leurs parents et, pour les couples empêchés de concevoir des enfants par voie naturelle, ceux qui auraient les meilleures chances de se développer dans le ventre maternel. En résumé: «Il serait possible de développer le nombre d'embryons nécessaires à une réalisation du traitement dans des conditions favorables», étant entendu que le succès de l'opération n'est garanti ni pour les couples porteurs de maladies héréditaires ni pour les couples inaptes à la procréation naturelle. Par bonheur, les embryons surnuméraires jugés dignes d'une chance de vivre – les autres, les malades et les faibles, seraient tués – «pourraient être congelés en vue d'un traitement ultérieur» pendant dix ans… après quoi on n'aurait plus qu'à les envoyer ad patres. Ce serait un vrai massacre, ce qui n'empêche pas le Conseil fédéral de considérer avec un parfait cynisme que «les principes de la dignité humaine et de la protection de l'embryon ser[aient] (…) respectés».

Nos sept simplets et les nains parlementaires qui leur emboîtent le pas prétendent, dans leur grande bonté et grâce au DPI, éviter aux couples concernés par la PMA la dramatique situation à laquelle se trouvent confrontés les couples «normaux» découvrant à la suite d'un diagnostic prénatal que leur enfant n'est pas «en ordre»: choisir d'interrompre ou non la grossesse. Mais au nom de quoi, dans un pays démocratique attaché à l'égalité de traitement, cette souffrance devrait-elle être subie par certains couples et pas par d'autres? C'est trop injuste! On voudra remédier à cela un jour ou l'autre, soyons-en sûrs. On franchira donc un nouveau pas qui permettra à tous les couples de recourir à la PMA et au DPI afin de s'éviter de mauvaises surprises. C'est ce qu'on appelle la tactique de la tranche de saucisson, qui est aussi vieille que la démocratie directe et permet, avec de la patience, de modeler la volonté populaire.

Un autre argument du Conseil fédéral, éculé au possible, consiste à vouloir éviter le tourisme médical. Il avait déjà été usé jusqu'à la corde par les partisans de l'avortement avant 2002: puisque l'avortement ou, aujourd'hui, le DPI se pratiquent dans de nombreux pays européens et que des Suisses se rendent à l'étranger pour obtenir ce que la loi interdit chez nous, il faut modifier la loi helvétique. En somme, c'est l'étranger qui fait la loi chez nous.

Eliminer des embryons porteurs de maladies graves ou d'infirmités relève de l'eugénisme. Mais je suis bien certaine que les parlementaires qui ont voté la modification constitutionnelle – sans parler de la loi – et le gouvernement qui la défend avec de si pauvres arguments pousseraient des cris d'orfraie si un partisan de cette pratique, avançant à visage découvert, venait les féliciter de préconiser cette solution radicale, utilisée en d'autres temps, paraît-il, par un régime dont on a fait le symbole de la barbarie.

M.P.

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