Trop de stades

Acceptez-vous l’initiative populaire «Pour l’installation dans la région de la Pontaise des stades de football et d’athlétisme prévus sur les rives du lac par le projet “Métamorphose”»?

C’est à cette question et à elle seule que devront répondre les Lausannois lors des votations du 27 septembre.

Ainsi que nous le rappelle la brochure explicative publiée par la Commune de Lausanne au sujet de cette importante votation, «Métamorphose constitue le projet majeur de développement de la ville de Lausanne pour les 15 à 20 prochaines années. (…) Il s’inscrit dans le cadre du programme de législature et représente le volet lausannois du projet d’agglomération Lausanne-Morges (PALM).»

Ces beaux projets visent à préparer l’arrivée sous nos cieux de plusieurs dizaines de milliers de nouveaux habitants dans les années à venir, et prévoient la modernisation des infrastructures – sportives notamment –, le développement des réseaux de transports publics, la construction de nouveaux logements et la création d’emplois, le tout sur fond d’écologisme dégoulinant.

Métamorphose prévoit entre autres choses de créer des infrastructures sportives de qualité. Lausanne n’est-elle pas capitale olympique? La Ville ne saurait donc se contenter de moderniser le stade de la Pontaise et les piscines existantes. Il lui faut, outre un stade consacré à l’athlétisme, un stade de football à l’anglaise de treize mille places, une piscine olympique couverte et un boulodrome. A l’origine, toutes ces installations devaient voir le jour au sud de la ville, à proximité du lac, donc bien loin de la Pontaise qui allait voir disparaître son stade olympique. Les défenseurs du quartier ayant poussé des cris d’orfraie, on leur a consenti en échange le stade d’athlétisme, sans succès comme en témoigne l’initiative sur laquelle les Lausannois doivent voter le 27 septembre.

Le habitants de la Pontaise sont bien ingrats, car la perte de leur stade bien-aimé sera compensée par un véritable paradis. C’est leur quartier, en effet, qui aura l’insigne honneur de se transformer en éco-quartier ou quartier durable caractérisé par «une faible consommation d’énergie, le souci de la qualité de l’eau et de l’air, une limitation de l’usage des véhicules individuels, mais également une mixité sociale et générationnelle, ainsi que la création de nombreux espaces verts». Hélas! il n’y a rien à faire. Ils veulent garder le foot et l’athlétisme.

Et c’est là que les choses se gâtent pour le citoyen soucieux de voter en toute connaissance de cause, car il n’arrive pas à déterminer l’enjeu du vote. Le texte de l’initiative parle des stades de football et d’athlétisme. On est donc fondé à penser que les initiants réclament deux stades, ce que confirment leurs adversaires. Or, à en croire les explications du comité d’initiative par la voix de sa présidente Jacqueline Audemars [1], le but de l’opération est de sauver le stade de la Pontaise en tant que stade mixte: «Le Stade de la Pontaise a fait ses preuves. C’est une piste d’athlétisme de rêve qui compte plusieurs records du monde à son actif. C’est aussi l’une des meilleures pelouses de football de Suisse. (…) Rénové et modernisé, ce symbole identitaire pourra continuer d’être le stade polyvalent capable d’accueillir, comme jusqu’ici, de grandes manifestations sportives et des concerts mythiques, de Michael Jackson aux Rolling Stones.»

Pour Michael Jackson, ça va être difficile, et le «symbole identitaire» augure mal de la mixité sociale et générationnelle du futur éco-quartier.

Mais la question n’est pas là. La question est: qui nous ment? Sont-ce les tenants inconditionnels de Métamorphose et de ses projets mégalomanes, aux fins de déconsidérer les défenseurs de la Pontaise et leurs partisans, susceptibles d’enrayer leur marche triomphale vers les paradis sportifs? Faut-il croire, au contraire, que l’idée de départ des auteurs de l’initiative était bien de disposer de deux stades distincts, idée qu’ils auraient abandonnée en cours de route pour des raisons de cohérence mais qui serait, par la force des choses, restée gravée dans le texte soumis au vote?

Je n’en sais rien et ça m’agace. Je voterai donc blanc le 27 septembre.

NOTES:

[1] 24 heures du 12 septembre. Voir aussi la brochure explicative de la Commune de Lausanne, p. 8.

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