L'identité européenne

Durant son quinquennat, le président Sarkozy avait sondé les Français sur leur conception de l’identité française, thème honni par la gauche, qui y voit a priori un relent de racisme et de  xénophobie. En Valais, le conseiller d’Etat Oskar Freysinger (UDC) a participé, le dimanche 9 mars 2014, à Paris, à une manifestation d’un groupe s’intitulant «Bloc identitaire», proche du FN, sur le thème suivant: non à l'islamisation. Qu'on le veuille ou non, la question de l'islam se pose désormais en Europe occidentale, liée à l'immigration de peuplement. Ce serait de l'obscurantisme que de ne pas vouloir la traiter, d'en censurer même l’énoncé.

Mais, je le concède volontiers, ce thème est de nature à échauffer les esprits et à en entraîner beaucoup dans une direction que l'histoire a connue et dont elle a montré à tous la nocivité. C'est la raison pour laquelle, dans un pareil enjeu, il convient d'éviter deux pièges: l'obscurantisme de la gauche, qui n'est en fait qu'une lâche démission de l'intelligence par asservissement idéologique1 d'une part, et d’autre part, l’écueil inverse, qui consiste à mêler non sans témérité les problèmes de culture à des appartenances raciales. C'est ce que firent en Allemagne les nationaux-socialistes, mais on oublie que leur succès s'explique par une continuité certaine de pensée avec la tradition prussienne dans ce pays.

Voici à ce propos ce que note J.-B. Noé dans son opuscule sur Pie XII face aux nazis2:«Pour bien comprendre le nazisme, il est nécessaire d’avoir à l’esprit que cette idéologie ne constitue en rien une rupture dans la tradition politique allemande. Les nazis reprennent la plupart des thèmes développés par le régime prussien et par les philosophes du XIXe siècle.» Ne pourrait-on pas en dire autant de la gauche en France par rapport au despotisme révolutionnaire et à l’héritage bonapartiste? Et en Italie, le fascisme n'est-il pas dans la droite ligne du Risorgimento?

Une fraction de l'idéologie de gauche en Europe a incontestablement des affinités très profondes avec le fanatisme. Ce n'était donc pas pour rien que le nazisme incluait le socialisme dans sa pensée. Mussolini lui-même fut un adepte, dans sa jeunesse, du parti socialiste. D'une certaine manière, la gauche et le despotisme sont des frères ennemis, mais des frères tout de même puisqu'ils partagent le même sang révolutionnaire, plus profondément enfoui dans la droite prussienne par son anticatholicisme rigoureux.

Ceci doit nous servir d'indication utile pour l’analyse de l’actualité, afin d'éviter les pièges idéologiques posés par la gauche à la droite, dans la mesure où nous parviendrons à briser le carcan idéologique qui paralyse la pensée politique en démocratie d'opinion et asservit littéralement celle-ci à la gauche. Charles de Foucauld va nous servir ici de point d'ancrage critique largement méconnu en raison du conditionnement de la pensée laïciste. Il écrivait ceci:  «Si les Français de France ne comprennent pas leur devoir d’évangéliser leurs colonies, c'est une faute dont ils devront rendre compte, et ce sera la cause de la perte d'une ·foule d'âmes qui auraient pu être sauvées.»3 De Gaulle a incontestablement pris acte du maintien de l'Algérie dans l'orbite musulmane pour favoriser, par la ruse, contre la droite qui l’avait porté au pouvoir, l’indépendance de ce pays, afin d'éviter d'intégrer à la métropole, massivement, des adeptes d'un culte générateur de conflits sérieux et graves avec _ la population française d'origine chrétienne. Néanmoins, ce que le fondateur de la Ve République n'avait pas prévu, c'est que cet appel à l'immigration de peuplement musulman constituerait un choix délibéré de la gauche, qui se sert de l'islam pour combattre l'identité française. Le laïcisme a sa logique, et cette logique est agissante tant que le laïcisme ne sera pas combattu en lui-même.

Une seconde menace pèse désormais non seulement sur la France mais sur toute l’Europe occidentale. Elle se manifeste à propos de l’Ukraine, où ressurgit, du côté russe, la tradition impériale. Car cette tradition impériale russe a elle aussi un fondement religieux anti-occidental: c’est la guerre, larvée ou déclarée, de la soi-disant «orthodoxie» orientale contre l’Eglise catholique romaine dont l’Occident se désolidarise aujourd’hui… Il vaut la peine de citer ici un religieux célèbre, Dom Prosper Guéranger, membre de l’Ordre de Saint-Benoît (OSB), abbé de Solesme , qui écrit ceci dans son Année liturgique: «De toutes les nations qui ont péri, il n'en est pas une seule qui ne l'ait mérité par son oubli de la loi de Dieu, et il en doit être ainsi. Quelquefois, le Seigneur attend avant de frapper; mais c'est afin que le châtiment soit plus solennel et plus exemplaire. Veut-on rendre compte de la solidité des destinées d'un peuple? Que l'on étudie son degré de fidélité aux lois de l'Eglise.»4

Connaître l’origine d’un mal, c’est déjà trouver la voie de la guérison. Vouloir ignorer cette origine, c’est choisir sciemment le déclin et la mort, également pour les sociétés.

Michel de Preux

 

NOTES:

1 «Aucune idée n’est libérale parce que, par sa nature, toute idée affirme quelque chose et nie autre chose», disait José-Antonio Primo de Rivera, fondateur de la Phalange. L'astuce de la gauche consiste à invoquer la libre expression de ses idées à seule fin de contester ce même droit à la droite sous prétexte qu'elles seraient, par le fait d'être de droite, anti-libérales!

2 Ed. du Laurier, Paris 2010, coll. Regards de l’histoire.

3 Ecrits spirituels.

4 Pour les samedi des Quatre-Temps de Carême.

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